Lyon Bière Festival : La craft plie mais ne rompt pas

Le monde de la bière artisanale subit de forts coups de vent. Ça tangue, les micro-brasseries s'accrochent et redoublent même d'ardeur. Une centaine d'entre elles entend montrer que « craft is not dead ». 


Le Petit Bulletin co-organise avec Bieronomy la 7ᵉ édition de ce rendez-vous désormais international, en tout cas immanquable, de la bière artisanale : le Lyon Bière Festival, qui déménage cette année au Double Mixte. Avec une double thématique, d'un côté redécouvrir l'IPA, mais tendance West Coast — plus sèches, plus amères, moins aromatiques que leurs cousines de l'Est. De l'autre (re)plonger dans la Lager, bière allemande de fermentation basse qui, tout en restant une « bière de soif », s'avère plus intéressante que ce que l'industrie laisse croire. 

Le Lyon Bière Festival est une fête et on est heureux qu'il soit de retour. Mais on ne peut pas rater l'éléphant au milieu de la pièce : si depuis dix ans le nombre de brasseries grimpait, passant d'une poignée à près de 2 500, ces deux dernières années marquent une rupture. D'une, ça ne pouvait pas pulluler à l'infini, et de deux, c'est la crise ma bonne dame : il se dit qu'une sur dix envisage de mettre la clef sous la porte. Pourquoi ? Une baisse de la consommation, même dans les pays historiquement bièrophiles. Et la hausse du coût des matières premières, à commencer par l'énergie. Mais alors, va-t-on devoir revenir au pack de six de la supérette ? 

Choisir la bière que l'on veut

Non, non, la bière artisanale n'a pas dit son dernier mot ! Et son écosystème s'enrichit : avec des malteries et houblonnières françaises qui permettent aux brasseries de devenir hyper-locales ou de passer au bio. C'est le cas par exemple d'une des marraines du festival : Mappiness, fondée en région parisienne. Marguerite Nguyen et Pierre Schneider s'étaient ancrés localement, avaient planté du houblon, traversé le Covid en pratiquant la livraison de pintes, et puis en 2021 les voilà qui déménagent à Décines ! Pour le couple, le brassage est une forme d'engagement, engagement qu'ils espèrent retrouver en ces temps troublés dans le soutien des consommateurs. C'est le moment de choisir la bière que l'on veut, et le modèle de production, voire de société, qui va avec. 

Taproom et bières engagées

C'est le cas encore d'une autre brasserie locale, Nomade qui brasse à Genas. Locale et localiste : non contente d'utiliser des produits du coin, elle distribue ses bières uniquement autour de Lyon, ce qui lui permet notamment de réutiliser les bouteilles. Les résidus de brassage (les drêches) sont utilisés par une ferme voisine, et il est même possible de boire leurs brassins directement sur place. C'est l'idée (en vogue, car elle permet à la fois de vendre sans intermédiaire et d'être au contact du client final) de la taproom : on sirote ce qui vient d'être produit (en terrasse c'est encore mieux) et on grignote les plats d'un foodtruck (qui change selon le jour de la semaine). 

La bière artisanale n'a peut-être en fait jamais été aussi vivante. Dans le sens où elle se réinvente chaque jour. Redécouvre des styles historiques, en invente de nouveaux. Expérimente des techniques de vieillissement en fût de vin ou même en amphore. Tente un travail sur les levures, des fermentations dites sauvages. Se lance même dans le sans-alcool. Tout un monde, à découvrir fin avril au Double Mixte. 

Lyon Bière Festival 2024
Le Double Mixte, 19 av. Gaston Berger, Villeurbanne 
Les 27 et 28/04, de 12h à 23h (19h le dimanche). À partir de 7€.


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