A hard month

Pas grand chose à se mettre sous la dent en ce mois de janvier cinématographique… En attendant les locomotives américaines de février, conseillons un polar sud-coréen, une machine à oscars plutôt sophistiquée et… un téléfilm enfin à sa mesure sur grand écran ! Christophe Chabert


C'est la rentrée, mais c'est encore vent calme dans les salles de cinéma… Les déceptions sont légions (les ratages Beauvois et Egoyan ou les arnaques Les Nouveaux sauvages et Foxcatcher) et les vrais grands films sont déjà sortis (Whiplash, La Terre éphémère ou l'incroyable polar de J. C. Chandor, A most violent year). Du coup, il faut un peu de curiosité pour dénicher les bonnes surprises de janvier. À commencer par Hard day de Kim Song-hun (7 janvier) qui, sans fondamentalement renouveler le genre du thriller sud-coréen, y apporte une délectable perversité. Suivant les tribulations d'un flic corrompu sur lequel tombe une pluie de tuiles qu'il tente tant bien que mal d'éviter, le film ose aller au bout de son mélange des genres, toujours à la limite du cartoon live, tout en forçant l'identification du spectateur à un protagoniste pourri jusqu'à la moelle.

L'identification, c'est la grande affaire des biopics. Imitation game de Morten Tyldum (28 janvier) raconte ainsi l'histoire vraie d'Alan Turing, ingénieur visionnaire qui, pendant la deuxième guerre mondiale, cherche à décrypter le langage codé utiliser par les nazis et invente au passage le premier ordinateur de l'histoire. Une sorte de proto-geek que la performance, stupéfiante, de Benedict Cumberbatch achève de rendre énigmatique. Imitation game n'échappe pas aux travers du cinéma à sujet, avec son héros qui affronte la pesanteur du système pour imposer ses idées et participer à la victoire du bien sur le mal. Sauf que derrière le combat de Turing se cache un secret : son homosexualité, qu'il dissimule mais qui finira par le renvoyer dans le placard, et son invention avec lui. Cela, Tyldum le raconte à la manière d'un Citizen Kane, comme un puzzle qui unirait l'homme à sa machine dans un même Rosebud. Ce trouble fait tout l'intérêt d'une œuvre moins calibrée qu'elle n'en a l'air.

(In)soumission

Alors que sort en librairies Soumission, son dernier roman, et que la Comédie de Saint-Étienne programme la pièce tirée des Particules élémentaires (cf. notre Une de ce mois-ci), Michel Houellebecq est aussi à l'affiche au cinéma avec L'Enlèvement de Michel Houellebecq, téléfilm Arte de Guillaume Nicloux dont la qualité valait bien un rattrapage en salles (au Méliès à partir du 23 janvier). S'appuyant sur la brève disparition de l'écran, le film invente un kidnapping complètement bouffon, sans tenants ni aboutissants, où Houellebecq promène sa tête de petit vieux, son goût pour la picole et sa tabagie aiguë au milieu d'un happening permanent où il ira même jusqu'à s'initier à la lutte avec ses ravisseurs. C'est hilarant, irrévérencieux et ça se déguste aussi sur un grand écran !


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