One dubstep beyond


Bande originale /Harmony Korine a le sens du contre-emploi. Caster de jeunes égéries Disney en bimbos assoiffées d'alcool fort, de semence masculine et d'argent liquide, il fallait oser (son film Spring breakers). En revanche, confier la mise en musique de leur virée hédoniste à Skrillex – et au pauvre Cliff Martinez qui, deux ans après avoir tracé son sillon au cul de la Ferrari Testarossa de Kavinsky pour Drive, se retrouve de nouveau sur le bas-côté médiatique – relève du perfect match. Parce que ce cyber goth de 25 ans est, qu'on le veuille ou non, l'un des musiciens les plus emblématiques de la jeunesse d'aujourd'hui, cette fameuse Génération Y, aussi connectée et désinvolte que la précédente, subordonnée à Nirvana, était repliée et angoissée.

Comment en est-il arrivé là ? En hissant le dubstep, musique urbaine et physique née au début du siècle à Londres, du rang de curiosité locale à celui de phénomène planétaire. Pas seulement en rompant avec le ton introspectif qui caractérisait le genre à son émergence, mais aussi et surtout en le salissant au contact de l'eurodance ou du rock – il fut le chanteur de From First to Last, groupe d'emocore sans génie. Les étudiants ricains comme les autres, quand ils se murgent et baisent au soleil, ne le font donc plus au son de riffs potaches, ils le font sur ses basses futuristes en se foutant bien qu'elles soient, à l'image du Spring break dépeint par Korine, autant un appel à la jouissance qu'un instrument d'aliénation. Vu l'énergie qu'elles confèrent au film et, plus généralement, aux corps qu'elles enveloppent, nous aussi.

Benjamin Mialot

Spring BreakersMusic from the motion picture (Warner)


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Harmony retrouvé