Laurent Wauquiez, les subventions et la culture : le point après les dernières annonces

La commission permanente de la Région AURA a validé les baisses de subventions à destination des structures culturelles du territoire que nous vous annoncions la semaine passée. 7 établissements ou événements de la Loire sont donc concernés ainsi que 5 structures de Haute-Loire, avec les inquiétudes que cela entraine pour tout un écosystème.


Jeudi 19 mai, nous vous annoncions que plusieurs structures culturelles de la Loire et de la Haute-Loire seraient concernées par des baisses de subventions de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. C'est désormais confirmé, puisque les montants ont été validés par la commission permanente, qui se tenait ce mercredi 25 mai.

Justifiant un "rééquilibrage" entre les territoires, dans un premier temps, puis la sortie d'une "logique de rente" pour en venir à une logique "de projets", l'équipe de Laurent Wauquiez a ainsi tranché en faveur d'une diminution des subventions de 139 acteurs culturels du territoire régional. Et, alors qu'il nous avait été indiqué que le budget culture de la collectivité ne diminuerait pas, l'on constate aujourd'hui qu'il a en réalité été amputé de 3, 2 millions d'euros.

Pas de concertation

Le groupe d'oppostion écologiste au conseil Régional a immédiatement réagi à ces décisions, soulignant qu'elles ont été prises : " sans concertation avec tous les acteurs et animateurs d'Auvergne-Rhône-Alpes, qui ont été mis devant le fait accompli ". Et de noter qu'il ne pourrait s'agir selon eux du simple rééquilibrage précédemment invoqué, dans la mesure où "des structures de certaines zones éloignées des grandes villes sont victimes de la diminution de leur subvention". Pour preuve, le festival Les Bravos de la Nuit à Pélussin qui voit son montant alloué être amputé de 2250€, les Lectures sous l'Arbre du Chambon-sur-Lignon, qui perd l'intégralité de sa subvention de 9000€, le festival Celte en Gévaudan de Saugues, qui perd 1500€, le festival du Monastier, qui perd 1500€. 

Au sein des structures, la nouvelle, attendue car soupçonnée depuis quelques semaines, semble néanmoins avoir laissé derrière elle un sentiment de stupeur. De nombreux acteurs culturels, démunis face à la situation, préféraient pour l'instant s'abstenir de tout commentaire, craignant que les choses ne puissent se dégrader davantage. La peur s'ajouterait-elle à la consternation?

Voie diplomatique

Ce mercredi soir, Marc Chaussaubéné, adjoint à la Culture de la Ville de Saint-Etienne, et par ailleurs président de la Cité du Design, qui voit sa subvention tronquée de 180 000 euros, en appelait de ses voeux un rétropédalage du président de Région, comprenant les inquiétudes des uns et des autres : " Cela soulève de lourdes questions. Il est normal que tout le monde reste jusque-là sur la réserve : tout le monde a tellement à perdre... Le peu qu'il nous reste, c'est déjà beaucoup, et il faut qu'on puisse le conserver. C'est pour cela que pour le moment, la voie diplomatique semble être la plus appropriée".

Voie diplomatique confirmée plus tard dans la soirée par le Maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau, qui indiquait dans un communiqué avoir envoyé récemment deux courriers au président de Région : l'un, pour la Cité du design, l'autre, pour l'Ecole de la Comédie de Saint-Etienne, dont la subvention a été amputée de 30 000 euros, en réclamant des explications.

Une lettre ouverte

Mardi, les acteurs culturels concernés par les coupes budgetaires avaient pour leur part adressé une lettre ouverte doublée d'une pétition à Sophie Rotkopf, vice-présidente de la Région en charge de la Culture, soulevant les risques que ces coupes comportent pour l'écosystème culture, et dénonçant la "méthode inacceptable" avec laquelle les décisions ont été prises. Dans la Loire, Benoît Lambert, directeur de la Comédie de Saint-Etienne, et Thierry Mandon, directeur de la Cité du design, sont tous deux signataires du document.

A Saint-Chamond ce mercredi, Mustapha Kerroua, le directeur du festival la Rue des Artistes amputé quant à lui de 15%, soit 4050€, regrettait la "méconnaissance du monde culturel par des élus, trop peu présents sur le terrain", et donc peu au fait "du travail quotidien de structures qui, par leurs actions et leur engagement, contribuent au vivre ensemble". Désolé de constater ce qu'il envisage comme "un manque de considération pour les acteurs culturels", le directeur concluait : "l'ancien président de l'association Atout Monde qui porte le festival avait pour habitude de dire que les structures culturelles font le boulot des politiques. Qu'est-ce qui peut se passer, si on ne nous donne plus les budgets pour agir?"

Répercussions dramatiques

Reste en effet que ces coupes budgétaires pourraient, sans rétropédalage, entraîner des dégats considérables, non seulement dans le monde culturel, mais également sur les territoires. A Saint-Etienne, la Cité du design pourrait être grandement impactée : "Il faut savoir que notre subvention au titre de l'exercice 2021 ne nous a pas été versée, ajoute Marc Chassaubéné. Voilà 20 ans, que nous touchons cette subvention, et à présent que la Cité se développe, on nous en retire une partie? Le risque zéro n'existe pas. Si les montants sont confirmés, les choses peuvent aller très vite, les sommes représentent potentiellement des emplois, des postes d'enseignants. Or, comment l'école pourrait-elle fonctionner sans enseignants?"

La question se pose aujourd'hui globalement pour toutes les structures, quels que soient les montants retirés. A l'Ecole de la Comédie de Saint-Etienne, la subvention régionale, octroyée afin de contribuer au financement de la classe préparatoire égalité des chances et tronquée de 10%, pourra-t-elle être compensée, et que se passera-t-il sans cela? 

Interpellée à différentes reprises, Sophie Rotkopf n'a pour l'instant donné suite à aucune sollicitation, laissant acteurs culturels, artistes, élus d'opposition, mais aussi, public fidèle de chacune de ces structures, sans réponse quant aux raisons de ces arbitrages et quant à l'avenir. Un silence qui pourrait être perçu comme une stratégie systématique : tandis que le Conseil d'administration de la Cité du design  doit se tenir mardi prochain, les élus à la Région qui doivent y siéger ont d'ores et déjà indiqué qu'ils ne seraient pas présents, invoquant une "indisponibilité".


Quelles structures concernées?

L'Ecole de la Comédie de Saint-Etienne : -30 000 euros

La Cité du design : -180 000 euros

L'Ecole de l'Oralité : -2000 euros

La Rue des Artistes : -4050€

Curieux Voyageurs : -2250€

Les 7 Collines : - 3750€

Les Bravos de la Nuit (Pélussin) : -2250€

Les Nuits de Saint-Jacques (Le Puy-en-Velay) : -7500€

Celte en Gévaudan (Saugues) : -1500€

Interfolk (Le Puy-en-Velay) : -1800€

Festival du Monastier : -1500€

Lectures sous l'arbre (Le Chambon-sur-Lignon) : -9000€, soit 100% de la subvention

 


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