La France bénéficie sur son territoire de tous les aspects nécessaires à la production du fameux liquide doré : des matières premières, aux savoir-faire, du climat au terroir, de l’audace à la connaissance du marché. Dans un pays grand consommateur de whisky, il y avait là un coche à ne pas rater. Les règles de ce secteur restent encore à établir, entre autres pour avoir le droit de disposer sur la bouteille, la fameuse mention d’âge, encore interdite à ce jour.
Un détail essentiel dans un marché aussi concurrentiel. Pour la suite, il nous faudra attendre car ce spiritueux français n’en est encore qu’à son balbutiement à l’échelle du monde. D’après La Fédération du Whisky de France, on dénombre pas moins de 100 distilleries sur tout le territoire. Des distillateurs et embouteilleurs pressés de pouvoir s’imposer et proposer au public un whisky de qualité à la saveur de notre terroir. Ici, le portrait de certaines d’entre elles, une liste non exhaustive ne dévoilant qu’une petite partie de l’excellence à la française.
Distillerie du Vercors
HISTOIRE
Un vent de renouveau souffle au cœur du Parc national du Vercors. Il y a de cela 7 ans, une ancienne magnanerie — lieu d’élevage des vers à soie — renaît de ses cendres. Éric et Anne-Hélène Cordelle entreprennent alors ce qu’il sera le travail d’une vie : la réhabilitation complète d’une bâtisse à l’abandon pour la transformer en une distillerie unique en son genre.
PRODUCTION
La Vallée du Royan permet un accès privilégié à une eau de source pure et cristalline ainsi que la culture de l’orge bio 100% maison. Éric Cordelle, ingénieur de profession, décide de dessiner et concevoir son alambic dédié à la première distillation, un modèle unique. Esthétiquement, avec son hublot, l’alambic évoque curieusement le célèbre sous-marin de Jules Verne. Un surnom bien trouvé pour cet alambic hors norme, le Nautilus. Un hublot subjuguant, comme dans le célèbre roman d’aventure, au travers duquel on peut apercevoir la magie du processus. On parle ici d’un alambic à repasse Honoré permettant une distillation à basse température, “une cuisson sous-vide, comme en cuisine” explique Anne-Hélène. Pour l’obtenir, Éric provoque une ébullition à 50°C en jouant sur une pression 2 fois plus élevée qu’au sommet de l’Everest ! La seconde distillation a lieu dans un alambic Charentais traditionnel muni d’un long serpentin.
LEUR WHISKY
Aujourd’hui, c’est à 4 qu’ils font vivre ce lieu et en délivre le meilleur dans un respect total de la nature environnante. Leur gamme de whisky, Sequoia, en l’honneur au séquoia vieux de 228 ans trônant majestueusement dans la cour de la distillerie, est la seule et l’unique. Un single malt tourbé, ou non, qui leur a valu des prix tels que le prix d’Edimbourg.
Distillerie Rozelieures
HISTOIRE
Parler de Rozelieures, c’est parler d’une passion familiale depuis 6 générations. Un savoir-faire céréalier perpétué par la famille Grallet depuis 1860, période à laquelle Amable et Ophélie Grallet ont créé cette exploitation arboricole céréalière de 35 hectares. Quelques décennies plus tard, le fils Grallet plante les premiers mirabelliers. Ce petit fruit jaune importé dans la région par le roi René au XVe siècle devenu spécialité de la Lorraine.
Dès lors, hormis l’exploitation céréalière d’orge, de blé et de maïs, Rozelieures commence à distiller sa propre eau-de-vie de mirabelle. Des débuts prometteurs et une commercialisation auprès du grand public fin des années 90.
PRODUCTION
Dans les années 2000, une nouvelle génération de Grallet aux commandes, Sabine et son mari Christophe Dupic, toujours aussi novateurs, sont à l’initiative d’un tournant décisif dans l’histoire de la distillerie.
Entrepreneur et cultivateur dans l’âme, Christophe et son beau-père, conviennent d’un élément essentiel, ils ont tout sous la main pour produire du whisky. Une bonne nouvelle pour ces passionnés de la boisson dorée.
Leur particularité ? Un processus de fabrication réalisé dans son intégralité à Rozelieures les rendant autonomes à 85 %, une fierté pour les Grallet. De la récolte, en passant par le maltage jusqu’à l’embouteillage.
LEUR WHISKY
Rozelieures fait aujourd’hui spécifiquement des single malts. On trouve 3 gammes, Collection, Fût Unique et Parcellaire — provenant d’une même parcelle.
Cette dernière est le résultat d’un long travail pour ces distillateurs avant tout agriculteurs. Sur le modèle viticole, les Grallet-Dupic exploitent 4 types de sol permettant de produire un whisky d’exception au goût marqué par le terroir lorrain.
Domaine des Hautes Glaces
HISTOIRE
À l’origine du Domaine des Hautes Glaces, il y a l’intention d’un homme, Frédéric Revol, qui souhaite réconcilier nature et culture. Depuis 2009, se niche au cœur des Alpes la plus ancienne ferme-distillerie de whisky biologique au monde. Cette aventure est avant tout le fait de cet homme au rêve un peu fou, celui de créer des whiskies d’excellence en accord avec ses valeurs. Paysan-agronome, il promeut une agriculture régénérative pour produire et enrichir ce terroir qu’il aime tant.
PRODUCTION
L’agriculture est au cœur de la démarche du domaine. Après 12 ans de travail et d’études, il l’affirme, le type de céréales est primordial et sa culture est déterminante dans la création du spiritueux. Une matière sublimée à chaque étape de création forgeant l’identité et le caractère du whisky. Dans le Domaine des Hautes Glaces, c’est dans les détails que se joue la spécificité de la production.
Du vieux moulin écossais pour le blé, aux levures indigènes permettant par une fermentation longue (très longue, plus de 100 heures !) de révéler le potentiel exceptionnel. Des alambics cognaçais au choix des fûts en chêne contenant le whisky. Une conscience des savoir-faire français mis à l’honneur par ces équipes et illustrant la riche tradition française.
Des critères qualitatifs élevés dans la continuité de la philosophie de Frédéric Revol. Il se joue là-haut, dans un cadre époustouflant, un projet à l’avant-garde rurale et écologique, de la céréale au whisky. Un travail à l’économie des ressources et à la circularité du modèle.
LEUR WHISKY
En 8 ans, la distillerie a fait son bonhomme de chemin et propose aujourd’hui un portefeuille riche de spiritueux. Deux pépites sortent du lot, dans leur gamme Moissons, le Malt soit un single malt à 100 % d’orge malté ainsi que le Single Rye à 100 % de seigle malté.
Distillerie des Menhirs
HISTOIRE
Direction les terres légendaires et pleines de mystère à l’abord de la forêt de Brocéliande dans le Finistère.
La distillerie des Menhirs est une histoire familiale depuis 1921, on ne compte pas moins de 5 générations de Le Lay. Originairement, les Le Lay distillent le cidre afin d’en extraire l’eau-de-vie, le lambig breton, une appellation d’origine contrôlée. Une contribution importante de la famille à faire de cette région la capitale régionale du lambig.
Dans ce vallon de Pont-Menhir en Plomelin, en 1986, un tournant décisif est pris par Guy Le Lay. Il quitte dès lors son métier de professeur de mathématiques afin de se consacrer pleinement à son travail de distillateur. Une reconversion et les débuts de la distillerie des Menhirs. Il ne faudra attendre que quelques mois pour le lancement du premier Pommeau de Bretagne dont il est à l’origine.
PRODUCTION
Après dix ans d’activité centrée uniquement autour de la pomme, il s’engage avec passion dans une autre aventure. Son rêve ? Elaborer un whisky de blé noir 100 % breton, une première mondiale.
L’épopée d’un whisky d’exception, néanmoins, bien plus complexe à obtenir. Le blé noir, autrement dit le sarrasin, ou encore le “blé du pauvre” affiche des rendements faibles ne permettant pas une production à grande échelle. C’était sans compter sur l’audace et le caractère bien trempé du patriarche qui l’ont conduit avec patience et de façon méthodique à adapter les méthodes artisanales pour apprivoiser la matière et en révéler les arômes uniques.
LEUR WHISKY
Il y a 10 ans, le premier whisky de la gamme EDDU a vu le jour. Une appellation évidente pour ces défenseurs de la culture bretonne, EDDU signifiant blé noir en breton. Entre autres, il y a EDDU Brocéliande s’inspirant de l’univers enchanté de la forêt et inscrivant ainsi la distillerie dans le folklore local. Un whisky au blé noir et un affinage en fût neuf breton venu tout droit de Brocéliande. Bénis par les druides en personnes, les fûts se sont vus affublés d’une gravure représentant l’iconique Merlin l’Enchanteur.
A découvrir très prochainement, une nouvelle version tourbée de la gamme EDDU, définitivement bretonne.