Le parc de la Tête-d'Or : « Verdure contre béton »

Lyon Spleen / Le parc de la Tête-d’Or est un passage obligé quand on erre dans Lyon. Que l’on y traine (ou soit trainé·e) le dimanche pour s’y balader, qu’on le traverse pour aller travailler ou qu’on choisisse d’y courir ou d’y marcher rapidement avec des bâtons en aluminium. On vous épargnera ici les anecdotes sur la tête d’or qui serait enterrée sous le lac : au-delà des légendes, la Fête des Lumières nous offre l’occasion de voyager à travers l’histoire réelle des arbres et des bâtiments de notre Central Park des marais. 

« Verdure contre béton ». C’est de cette manière que Louis Pradel alias Zizi Béton, maire de la ville de 1957 à 1976, présente la végétation lyonnaise dans un chapitre dédié de son livre Mon Lyon superbe, paru en 1976[1]. Il développe : « Je tiens à signaler qu’à Lyon, à côté du béton, il y a aussi de la verdure ; c’est ce que certains font semblant d’oublier. Lorsqu’on survole la ville en avion et, mieux encore, si on le peut, en hélicoptère, on se rend compte qu’à Lyon il y a énormément de surfaces vertes. Elles ne sont pas toujours publiques et c’est pourquoi, du sol, on ne les voit pas toutes »[2]. Une façon très seventies de mettre la verdure à l’honneur, entre des chapitres d’anthologie sur l’autoroute, la pollution, le béton, la Part-Dieu ou Perrache. N’ayant malheureusement pas d’hélicoptère, nous sommes donc contraints de profiter de la végétation municipale. 

Pour que la transition soit douce entre le gris et le vert, intéressons-nous à l’histoire de deux des édifices de la Tête-d’Or. Si, dans l’enceinte du parc, les arbres traversent les siècles presque sans bouger, il n’en est pas de même pour ses bâtiments. La Grande Serre en offre un parfait témoignage. Elle a été soumise à un défi architectural de taille : reconstruire entièrement son pavillon central un siècle après sa construction sans déplacer les beaux palmiers qui sont à l’intérieur pour qu’ils continuent à vivre leur meilleure vie. La prouesse date de 1972 et elle dit tout le soin qu’on porte aux végétaux du parc. Elle est d’autant plus précieuse lorsque l’on sait qu’elle a été réalisée sous une mandature prompte à accélérer le réchauffement climatique, celle de Louis Pradel.

Bibliothèque municipale de Lyon / B01CP69000 000436

Il y a une prouesse architecturale qui tisse des liens étroits entre le parc et la presqu’île, et qui a commencé avant que la Tête-d’Or n’existe, en 1829 : celle de son Orangerie. Imaginez le tableau : à l’époque, des orangers dans des pots décorent la place des Terreaux. Pour les faire hiberner, on leur construit une orangerie dans le jardin des Plantes (il se trouvait dans les Pentes). Quelques années après l’ouverture du parc, l’Orangerie est démontée et reconstruite pierre par pierre à l’emplacement où elle se trouve encore aujourd’hui. Les orangers n’ayant plus besoin d’hiberner, elle accueille maintenant des expositions et regarde passer les trains. 

Vieilles branches

Assez parlé de béton, laissons à présent le micro aux végétaux. Si vous arrivez par le lycée du parc, attardez-vous à l’arboretum pour faire la connaissance du pin de Bunge (Pinus bungeana) et de toutes les nuances de sa splendide écorce. L’espèce a été découverte en Chine en 1855. Comme beaucoup de découvertes autocentrées (et coloniales), on lui a donné le nom de son trouveur, même si l’arbre existe depuis des millénaires. Il s’appelle donc Bunge, comme le botaniste voyageur qui en a rapporté les graines. Le spécimen du parc de la Tête-d’Or serait issu du lot de graines rapportées par Bunge, ce qui en ferait l’un des plus anciens… d’Europe. 

À l’occasion de la Fête des Lumières, on redécouvrira aussi une zone de ceinture sur laquelle on s’attarde peu, que l’on appelle « la Petite Suisse ». À quelques pas de la porte des Enfants du Rhône, elle abrite quelques-uns des plus anciens arbres de la Tête-d’Or, plantés au moment de son ouverture pour délimiter les abords du parc. C’est l’espace choisi pour accueillir All The Trees, l’illumination de l’artiste Joanie Lemercier, qui utilise le laser pour révéler la beauté des arbres et les histoires secrètes que leurs branches nous racontent.

All The Trees  -  Joanie Lemercier

 

Le roi des pleureurs

La Fontaine Enchantée - Aglaé Design

Ne vous fiez pas au titre : on ne parle pas ici d’un homme politique qui devrait abandonner ses privilèges suite à un scandale sexuel, mais d’un drôle d’arbre pleureur dans la Roseraie, à quelques pas de la Fontaine Enchantée du studio Aglae Design. Il est issu d’une mutation involontaire des premiers cèdres de l’Atlas, introduits dans les pépinières françaises au XIXe siècle. Sa particularité : il ne donne que des graines de cèdres « non pleureurs », et ne peut être reproduit que par bouture ou par greffe. Vous le saurez si vous en croisez d’autres au gré de vos balades (en haut de la montée de la Boucle par exemple) : ces arbres mutants in vitro ne sont jamais là par hasard. Un peu comme vous en ce soir du 8 décembre ! 

Balade sonore : des podcasts pour se promener au parc

Pour explorer le parc en bonne compagnie, on vous conseille : 

Curiosités plus ou moins végétales pour prolonger la balade

  • Tâter l’écorce d’un séquoia dans l’Arboretum : elle est molle ! Si vous voulez donner des coups de poings sans finir aux urgences, c’est l’arbre qu’il vous faut. 
  • Calmer son arthrite bien au chaud dans la serre Madagascar et des milieux arides (climat sec bénéfique à vos genoux et à certaines espèces endémiques).
  • Récupérer un souvenir dans la boite à livres à côté de l’Orangerie (ou essayer de deviner qui a déposé des livres ici, en se basant sur les titres des ouvrages).
  • Acheter une barbe à papa très chère, la manger de manière à avoir les doigts, joues et cheveux (si vous en avez) qui collent. Bonus spleen si vous en mettez sur vos lunettes. 

Informations pratiques :

Parc de la Tête-d'Or, rue de Créqui, Lyon 6e
Horaires des illuminations :
Du jeudi 7 au samedi 9 décembre de 19h à 23h
Le dimanche 10 décembre de 18h à 22h
Les portes du Parc de la Tête d'Or ferment 30 min avant la fin de chaque soirée


[1] Il y invente un genre littéraire : une histoire de sa ville prétexte à faire le bilan de sa vie. Une autobiographie géographique en quelque sorte. Malgré un usage parfois hasardeux de la ponctuation, ça se lit bien.
[2] Louis Pradel, Mon Lyon Superbe, chapitre « Verdure contre béton » p. 48, Solar éditeur Paris

 

 

 

 

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Suivez la guide !

Clubbing, expos, cinéma, humour, théâtre, danse, littérature, fripes, famille… abonne toi pour recevoir une fois par semaine les conseils sorties de la rédac’ !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X