A voir en salles le 5 avril 2023

À voir

★★★☆☆ Les Trois Mousquetaires : D'Artagnan 

Jeune Gascon plein de fougue, François d’Artagnan gagne Paris pour mettre son épée au service de Louis XIII. Laissé pour mort après une algarade sur la route, il parvient cependant à rallier les mousquetaires. À peine arrivé, l’empressé provoque en duel les trois plus fines lames de la compagnie : Athos, Porthos et Aramis…

Les franchises modernes, avec leurs reboots, n’ont rien inventé : depuis que le cinéma existe, les grands classiques ont toujours constitué d’inépuisables sources d’inspiration. Et les adaptations en découlant s’apprécient comme des véhicules (ou des marqueurs) de leur époque — y compris lorsqu’il s’agit d’œuvres se déroulant au XVIIe siècle comme Les Trois Mousquetaires. Conjointement au “retour aux sources et sur investissement“, cette nouvelle version dirigée par Martin Bourboulon n’est pas loin d’avoir trouvé la formule idéale : elle s’empare en effet d’une valeur sûre voire universelle (merci l’estampille Dumas), insiste sur les arcanes politiques du récit en veillant à l’authenticité des détails historiques (tout ce qui scotche le public devant Stéphane Bern) ; sature l’écran de talents attractifs (Cassel et Green ouvrant aux marchés internationaux ; Civil, Khoudry, Marmaï, Garrel, Krieps pour toucher tous les publics) et carrosse le tout dans un colossal objet pensé pour la salle de cinéma (à l’ancienne, en deux volets aux sorties différées) dont la réalisation use des meilleures innovations contemporaines sans en abuser — à l’instar de Kingsman : première mission, par exemple. Résultat ? Un divertissement ample et épique de qualité, sérieux, sans petites répliques conniventes pour faire moderne. Une sorte de néo-classicisme sans doute, mais totalement justifiée et captivante, s’achevant sur un cliffhanger comme il se doit. Vivement la suite !

De Martin Bourboulon (Fr, 2h01) avec François Civil, Vincent Cassel, Romain Duris, Eva Green…


★★★☆☆ About Kim Sohee 

Corée du Sud. Les lycéens devant obligatoirement faire un stage en entreprise pour achever leur cursus, la jeune Kim Sohee est affectée dans un centre d’appels de Korea Telecom où sa situation va dégénérer. Enquêtant sur son suicide, l’inspectrice Yoo-jin va mettre au jour un système gravement dysfonctionnel…

Construit en deux volets se faisant face comme des miroirs, About Kim Sohee rappelle ce que l’on a pu voir jadis chez Asghar Farhadi : la mise en place d’une tragédie puis son autopsie établissant un implacable enchainement de causalités favorisé par un aveuglement général. Mais ce drame particulier  dépasse la cas de la malheureuse lycéenne puisque l’inspectrice montre au fil de son enquête qu’il résulte d'une suite de défaillances : l’État — à travers ses différentes strates administratives se renvoyant la balle — impose aux lycées (afin qu’ils gardent leurs financements, leur rang, leur prestige) de placer leur élèves dans des entreprises exploitant à très bon compte  et sans le moindre état d’âme cette main d’œuvre fatalement docile. Commençant comme un thriller psychologique, se poursuivant en polar, About Kim Sohee s’achève en charge virulente par un réquisitoire contre le culte de la performance et de la fausse émulation. En cela, il rappelle l’excellent Tunnel de Kim Seong-hoon (2016) — avec Bae Doona également — qui partait d’un éprouvant survival en huis clos pour sulfater la corruption politique sud-coréenne. Mais qu’on ne se méprenne pas : le modèle ici disséqué n’est en rien une verrue exotique. Plutôt le symptôme des sociétés sacrifiant leur service public sur l’autel du libéralisme, transformant de fait le film en lanceur d’alertes.

De July Jung (Co.du.S, 2h17) avec Bae Doona, Kim Si-eun…


★★★☆☆ L'Établi 

1968. Peu après “le joli mai“, un jeune prof de philo tendance mao se fait recruter à la chaîne chez Citroën afin d’infiltrer les “masses laborieuses“ et de relancer la révolution. L’étincelle qu’il espère survient quand l’usine impose aux ouvriers de travailler gratuitement quelques heures en plus…

Adapté du récit autobiographique de Robert Linhart relatant ses mois “d’établissement” comme ouvrier, ce film pourrait se revendiquer, comme le texte d’origine, des Éditions de minuit tant il s’attache à relater avec une précision clinique, sans faire roman ni les emballer, les faits et les dits de l’époque — la scansion blanche “à la Amalric“ de Swann Arlaud y contribue. Re(con)stitution qui se vit au présent, L’Établi met en lumière un “moment“ historique un peu oublié sans juger rétrospectivement l’engagement du protagoniste : aux yeux du spectateur de 2023 de mesurer, avec la facilité d’un inspecteur des travaux finis, la sincérité de cette implication dans l’action militante concrète… ou de constater la naïveté et l’impuissance de l’intellectuel déplacé dans le réel. Reste que le monde patronal, avec ses pratiques puant le XIXe siècle (intimidations, chantage, exploitation, paternalisme dans le plus épouvantable sens du terme, racisme, manipulation…) n’en sort pas grandi : une vraie incitation à se syndiquer. Et à poursuivre d’autres luttes contre les abus ordinaires.

De Mathias Gokalp (Fr., 1h57) avec Swann Arlaud, Mélanie Thierry, Denis Podalydès…


★★★☆☆  Normale 

Lucie, 15 ans, vit seule avec William, son père atteint de sclérose en plaques. Assumant un petit boulot, sa charge d’aide familiale en plus de sa vie de lycéenne, elle redoute d’être placée en foyer. Quand la visite d’une assistante sociale est annoncée, c’est la panique. D’autant que William est au plus mal…

Cas de conscience face à ce film cochant bien des cases… voire en cochant trop. Voyez plutôt : un grand sujet (les aidants familiaux, a fortiori adolescents) ; un sous-sujet sur l’affirmation d’une identité singulière/différente chez un adolescent ; une forme de comédie décalée entre humour noir belge et esthétique burtono-jeunetienne ; un acteur en général apprécié pour son jeu débridé optant pour une retenue seyant à la tragédie (non, on n’a pas dit “symptôme Tchao Pantin“ : Poelvoorde a déjà joué à maintes reprises de tels personnages sur le fil)… Sur le papier, tout convient, mais mis bout-à-bout, rien de neuf sous le soleil : Normale porte terriblement bien son nom puisque le film donne l’impression d’avoir déjà été vu dix fois ailleurs par bribes, ce qui gâche à tout le moins l’effet de surprise.

De Olivier Babinet (Fr.-Bel., 1h27) avec Justine Lacroix, Benoît Poelvoorde, Steve Tientcheu…


★★★☆☆  C’est mon homme 

Fin de la Grande Guerre. Julien Delaunay est porté disparu au front mais sa femme Julie le reconnaît dans le journal, décrit comme amnésique. Elle l’accueille chez elle et lui réapprend leur passé commun. Alors qu’ils s’apprêtent à reprendre leur vie commune, une autre femme prétend être son épouse…

Comment ne pas penser au Retour de Martin Guerre (1982), avec toutefois une différence de taille : le miraculé revenu des combats n’usurpe pas une identité, mais se trouve ici face à un dilemme : devoir choisir entre poursuivre la vie d’un homme ou celle d’un autre, auprès de la femme du premier ou celle du second. Une trame qui pourrait faire roman à l’eau de rose parfum années folles, où la passion est sans cesse contrecarrée par la raison : dans ce XXe siècle de la science triomphante, les médecins prennent l’ascendant sur l’autorité religieuse (mais agissent parfois en tordant le “dogme“ en fonction de leur intérêt personnel) et le corps impose ses souvenirs quand la mémoire semble comme javellisée. Par contagion, le film paraît hésiter lui aussi entre s’abandonner au franc mélo ou succomber à la tentation de la comédie musicale cabaret… Deux femmes, deux ambiances, mais un voile de théâtralité un peu pesant. Heureusement que le trio de comédiens captive.

De Guillaume Bureau (Fr., 1h27) avec Leïla Bekhti, Karim Leklou, Louise Bourgoin…

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