La Belle et la Bête

Hybride raté entre film populaire et vision auteuriste d'un conte par un réalisateur cultivé

L’histoire, tout le monde la connaît. Même moi qui n’ai vu aucune autre version du conte, Disney, Cocteau ou autre :
La Belle (Léa Seydoux) se retrouve prisonnière de la Bête, cherche à l’apprivoiser, puis à connaître son histoire, pour qu’ils puissent s’aimer et vivre heureux, forever after bla bla bla.

Le premier choc est de constater l’échec visuel du film : comme Star Wars épisode un il y a 15 ans, le film semble intégralement tourné en studio et recréé numériquement, avec par contre, une inspiration directe de l’esthétique des jeux vidéo. Le problème est que ce genre de direction artistique surchargée et saturée appelle à l’interaction, à la contemplation, à l’exploration… Le film échoue, à l’inverse d’un Avatar par exemple, à rendre vivant cet univers pourtant visuellement généreux. Tout est très joli, mais figé. Aucune communion, aucune interaction entre nous et le spectacle à l’écran.

L’histoire, par ailleurs, est racontée par Belle à ses enfants, et propose de replacer le conte dans un contexte crédible et étoffé. Cependant, outre le fait d’introduire de nombreux, mais inutiles personnages, ce choix a principalement pour conséquence de larguer d’emblée le spectateur, car cette introduction tente de maintenir un rythme élevé en multipliant les intrigues, mais aussi malheureusement, les ellipses narratives et les facilités scénaristiques.
Ce qui empêche tout développement psychologique des différents protagonistes, tout attachement aux personnages.
Surtout que le casting du film, excepté Cassel, manque globalement de charisme… Difficile dans ces conditions, d’enrichir un univers qui a déjà raté l’accroche visuelle.

Ajouter un aspect familial au film par simplification de la narration et des personnages semble donc avoir été l’idée prédominante pendant la production du film.
Le plus dommageable, c’est lorsqu’on entrevoit le squelette d’un film beaucoup plus sombre et cruel, poétique et immersif, lors de flashbacks racontant l’histoire de la bête. Ces aspect sont cependant ruinés en quelques instants, par des détails comme l’ajout dégueulasse de personnages qui décrédibilisent le reste – ces chiens numériques immondes, touche "jeune public", les Jar Jar binks du film. Sans compter l’impression constante d’assister à une vulgaire caricature d’un conte Disney, dans l’écriture des personnages Belle y compris… Puis ce story-telling moisi qui peine à trouver le juste tempo, et cherche trop le spectaculaire comme en témoigne cette accélération soudaine du rythme en fin de métrage, façon The Hobbit, avec ses titans, et qui ne prend même pas la peine de se justifier scénaristiquement… Gâchis.

J’ai quand même vu quelques points positifs :

Christophe Gans à l’air fasciné par la Bête, et s’attache à raconter son histoire, à l’étoffer, pour un résultat qui aurait pu constituer un super court métrage. Vince Cassel incarne parfaitement la bête, numériquement ou pas. Il arrive à faire ressortir son humanité derrière une apparence et des attitudes parfaitement bestiales.
La mythologie créée autour de ce personnage est pour moi un des seuls intérêts du film.

L’autre, très personnel, c’est le plaisir pris à relever les références vidéo-ludiques : outre l’aspect très Final Fantasy des environnements, on peut s’amuser à repérer les clins d’œil au genre : Belle et Bête qui dansent façon Squall/Linoa, la porte miroir, empruntée à Demon’s Soul, le réveil des titans, très Shadow of the Colossus, Le combat de titans épique comme dans God of War III, etc.

Au final, La Belle et la bête est un film que j’ai trouvé trop hétérogène et qui ne plaira ni aux cinéphiles car rendu beaucoup trop accessible (probablement pour des questions de rentabilité), ni au public familial, qui sera, malgré un enrobage écœurant, certainement troublé par quelques instants bien sombres et lyriques, pendant les apparitions de la Bête, dans son histoire.

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