Oxmo Puccino : « Il faut avancer, continuer à trouver des solutions »

Oxmo Puccino, c’est la puissance et la sérénité entremêlées. Du haut de ses 45 printemps qu’il assume pleinement, le rappeur et poète continue à creuser le sillon d’une musique pleine et globale, mêlant textes forts et sons efficaces. Un artiste bien dans ses baskets qui inspire le respect tout en surprenant toujours son monde. La preuve avec par exemple des collaborations fournies sur sa dernière galette sortie en 2019, La Nuit du Réveil, où l’on croise avec gourmandise Orelsan aussi bien que le trompettiste Erik Truffaz, Lonepsi tout comme Caballero & JeanJass. Oxmo Puccino démontre encore une fois qu’il est le patron, respecté et respectueux. Rencontre avec un artiste qui incarne la classe, en toute simplicité.


Tu as expliqué que La Nuit du Réveil constitue une rencontre avec toi-même. Est-ce également un retour aux sources du coup ?

Je ne pense pas que l’on peut parler de retour aux sources. L’important est de ne jamais quitter ses sources. Ce que je dirais, c’est que j’ai fêté les 20 ans de mon premier album, celui-là est mon huitième disque, donc forcément il y a des questions qui se posent. Ce sont des moments très importants. Il y a tout ce qu’il s’est passé et tout ce qui va suivre. C’est un point clé. Nous vivons tous une époque très bouleversante, avec la manière dont le temps avance, l’évolution du monde, la vision que l’on en a et qui peut provoquer des angoisses. Dans tout cela, il faut avancer, continuer à trouver des solutions. En ce qui me concerne, créer encore. Aujourd’hui j’ai 45 ans et forcément c’est une période charnière, car on est plus sur la suite que sur l’avant. Donc il y a des remises en question mais cela ne m’effraie pas. Les gens ont peur de mourir mais aussi de vieillir. Alors que vieillir c’est vivre. C’est la conséquence d’une vie qui avance, c’est quelque chose que je regarde dans les yeux, en face !

Dans cet album autant on trouve de l’humour comme par exemple sur le titre Ma life avec Orelsan, mais également de la profondeur. Ombre et lumière cohabitent dans ce disque…

C’est inévitable. Il faut composer avec cette part d’ombre en nous. Il faut l’accepter car ce n’est pas quelque chose qui nous est étranger. La refuser n’est pas s’en arracher, justement c’est la mettre en évidence en voulant la fuir, lui laisser prendre trop de place. C’est avoir une bonne explication pour une vie dont on peut se plaindre. Pour moi, j’embrasse ce côté sombre car il fait partie de nous, essayer de négocier avec pour l’adoucir. Ça a toujours été le discours.

Sur l’album se trouvent de nombreux featurings très différents comme Caballero & Jeanjass, Erik Truffaz, Lonepsi… Est-ce toi qui es allé les chercher ou eux qui t’ont proposé de travailler ensemble ?

C’est moi qui suis allé les trouver. Aujourd’hui, je trouve que l’album est complet, il ne lui manque rien. C’est un projet qui s’écoute en longueur, avec cohérence. Cela est dû au fait qu’à chaque chose qui manquait pour enrichir ce projet, il fallait trouver le puzzle manquant c’est-à-dire un créateur complémentaire. C’est la chance d’avoir trouvé les personnes qu’il fallait pour chaque morceau pour que ce projet sonne complet.

Est-ce la composition de cet album t’a pris beaucoup de temps ?

La composition ne prend pas toujours du temps mais les arrangements et l’aboutissement du morceau peuvent en prendre au contraire. Vous trouvez une mélodie et vous ne pouvez pas la jouer comme au 18e siècle ou dans les années 60… Il faut l’adapter à la manière dont on écoute la musique à l’époque où sort le projet. L’adapter sans la transformer. Avec Eddie Purple, on compose, on travaille, on cherche… On peut chercher longtemps car on ne manque pas de propositions. Puis on a la chance d’avoir Phazz, un des producteurs qui comptent sur la place depuis un moment. Il permet de codifier et terminer le morceau comme on veut l’entendre aujourd’hui. Voilà, c’est exactement ça. C’est un travail d’équipe.

En live, pour parler d’équipe, comment ça se passe sur cette tournée ? As-tu les mêmes musiciens qu’avant avec toi ?

À défaut d’avoir un bassiste acoustique avec nous, nous avons passé les basses au synthétiseur. Par contre, nous avons pris un Dj/producteur qui envoie des séquences et qui anime le spectacle d’une manière plus hip hop on va dire.

Concernant les visuels, on peut apercevoir sur la pochette de ton album que tu t’éloignes vers le large alors que sur l’affiche du live, tu viens vers nous de manière déterminée, en samouraï…

Merci de le noter ! J’ai envie de rendre hommage à Fifou, le concepteur graphique de la pochette de l’album. Cette dernière est une vision philosophique de cette lumière qu’il faut atteindre coûte que coûte et quelque soit le chemin, quitte à plonger dans la mer habillé en costume. Concernant l’affiche de la scène, c’est une affiche avec une personne qui vient vers vous d’un pas décidé, préparée pour vous emmener avec détermination. Et puis j’aime beaucoup ce concept de samouraï, de chevalier avec des valeurs héroïques.

Tu avais expliqué lors d’une interview accordée à La Croix, avoir encore beaucoup de choses à faire en France et que la matière ne manquait pas. Tu es donc attaché à ce pays ?

La France est un pays fantastique. Je connais la France, contrairement à beaucoup. Je connais le Nord, le Sud, le Sud-Est, le Centre, les villes frontalières, les mentalités différentes, les cuisines de chaque région… on n’a pas besoin de prendre l‘avion pour faire un voyage incroyable. Tout cela mérite un livre. Les gens sont incroyables. Ça explose dans ma tête, et c’est difficile de répondre à une telle question en cinq minutes… Mais ce dont je peux être sûr, c’est qu’il existe un sens de l’accueil et un art de la cuisine extraordinaires. Je participe à un projet assez particulier qui s’appelle le Consulat du Pérou. Il consiste à mettre l’hospitalité au rang de patrimoine universel. Je trouve ça très beau car on ne prend pas suffisamment en compte l’invisible et que l’hospitalité est la première chose qu’il devrait y avoir entre deux inconnus. Ce projet met par exemple en avant le parcours de certains migrants qui sont arrivés en France et qui n’ont pas trouvé que de la noirceur et des bras fermés.

Oxmo Puccino, jeudi 19 mars au Fil à Saint-Étienne

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