Greffier de profession, photographe de plaisir, Joseph Apprin sort de l'anonymat avec une exposition intitulée "Le spectacle des rues & des chemins" au Musée de l'Ancien Évêché. Témoignage photographique de la vie iséroise à la fin du XIXe siècle, l'ensemble dévoile la ruralité de l'époque et la malice d'un photographe en avance sur son temps. Charline Corubolo
Nous devrions renommer Grenoble la capitale de la photographie tant les expositions en la matière ne cessent de fleurir, telles des futures noix au printemps. Pour cette nouvelle proposition très clichés, le Musée de l'Ancien Évêché propose d'élucider un nouveau mystère de l'art : le cas Joseph Apprin (1859-1908), greffier et photographe amateur.
À l'instar de Vivian Maier, il a été découvert récemment mais son œuvre offre un tout autre regard. Pas d'envolées hollywoodiennes pour ce Grenoblois du siècle dernier : le fonds photographique a été retrouvé en Savoie puis cédé à un galeriste parisien. Un ensemble de 640 négatifs sur plaque de verre représentant Grenoble et sa région que le galeriste vend à Jean-Louis Roux, critique d'art grenoblois. Un long travail de recherches a été nécessaire pour dater et situer les prises de vues. Numérisées et retouchées, le musée expose 110 images de l'œuvre de Joseph Apprin entre 1890 et 1908, dont l'originalité et la modernité intriguent.
Grenoble, il y a 100 ans
Bien qu'amateur, le photographe exprimait un sens aigu de la composition et une esthétique particulière à contre-courant de l'époque. À l'orée du XXe siècle, la photographie imitait la peinture dans un mouvement alors appelé "pictorialisme". Mais Joseph Apprin préfèrait la netteté de l'image au flou et s'amusait à mettre en scène sa famille dans des portraits.
Découpée en plusieurs sections, l'exposition accorde une place importante à ses vues rurales du Trièves, du Vercors, de la Chartreuse ou encore de l'Oisans. Dans cette campagne non urbanisée, on reconnaît certains paysages de l'Isère. Adhérant de la Société dauphinoise d'amateurs photographes, Joseph Apprin aimait à saisir les arbres avec une approche presque picturale non sans rappeler les toiles de Jean Achard.
En fin de parcours, les images révèlent la vie grenobloise intra-muros dont les allées sont brutes, pour une vision sobre et enchantée d'une ville aujourd'hui bétonnée jusqu'aux noyers. Un témoignage vieux de 100 ans qui porte un nouveau regard sur ce qui nous entoure.
Le spectacle des rues & des chemins, Joseph Apprin photographies 1890-1908, jusqu'au dimanche 29 mai au Musée de l'Ancien Évêché