"Proxima" : Maman est au ciel
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Jack aurait tellement voulu être architecte… Un destin contraire l’a fait ingénieur et affligé de TOC lui empoisonnant la vie, surtout lorsqu’il vient de commettre un meurtre. Car si, l’on y réfléchit bien, le principal tracas de Jack, c’est de devoir obéir à ses pulsions de serial killer…
Peu importe si son esthétique ou ses dogmes évoluent au fil de sa prolifique filmographie — et lui confère au passage l’apparence d’un splendide magma —, Lars von Trier parvient à assurer à celle-ci une indiscutable cohérence par son goût maladif du défi stylistique et de la provocation morale, que celle-ci transparaisse dans la diégèse ou dans le discours d’accompagnement.
Épouser comme ici le point de vue d’un détraqué jouissant dans l’esthétisation de la mise à mort de ses victimes participe évidemment de cette démarche : la mécanique humaine et celle, perverse, du suspense conduisent inconsciemment le spectateur de The House that Jack built à éprouver de l’empathie pour son héros lorsqu’il commet ses actes. À trembler à sa place lorsqu’il vérifie dix fois n’avoir oublié aucune goutte de sang qui révèlerait son crime ; à souffrir davantage pour ses névroses que pour ses proies. D’ailleurs, la première à subir ses assauts ayant tout faut (voire davantage) pour le pousser à bout, on serait presque tenté d’accorder à Jack des circonstances atténuantes !
La rouerie von Trier tourne à plein régime… Et déverse son content de gore dans la première partie du film : multi-diffusion de l’exécution de Uma Thurman, abrasion exagérée de cadavre, canardage d’enfants… Mais, à l’instar d’Hitchcock, le cinéaste danois produit moins d’images abjectes ou obscènes qu’il n’en suscite dans l’esprit de son public ainsi conditionné. Ainsi, dans la seconde partie, ce fieffé manipulateur obtient par la seule suggestion la fuite des âmes trop craintives par la seule (abominable) promesse d’une mastectomie sur blonde vivante. Du grand art.
Comme Mother! d’Aronofky, The House… métaphorise dans l’horrifique la démarche de création, sur un mode proche de Thomas de Quincey, en faisant côtoyer le monstrueux avec le plus noir des humours absurdes. Quant à l’incapacité chronique (l’impuissance…) de Jack à concevoir un chef-d’œuvre digne de ses attentes, l’obligeant sans cesse à remettre l’ouvrage sur le métier et à recourir in fine à un deus ex machina pour y parvenir, elle trouve un étonnant écho dans le film. Enchaînant une cascade d’épisodes isolément brillants — morceaux de bravoure visuels, effets narratifs ou de montage virtuoses dont von Trier est coutumier —, celui-ci achoppe sur une issue de bric et de broc, longuette et prévisible. Dommage : aucune fin ne justifie d’être moyen.
The House That Jack Built de Lars von Trier (Dan.-Fr.-Sué.-All., int.-16 ans, 2h35) avec Matt Dillon, Bruno Ganz, Uma Thurman… (17 octobre)
Jack aurait tellement voulu être architecte… Un destin contraire l’a fait ingénieur et affligé de TOC lui empoisonnant la vie, surtout lorsqu’il vient de commettre un meurtre. Car si, l’on y réfléchit bien, le principal tracas de Jack, c’est de devoir obéir à ses pulsions de serial killer…
Peu importe si son esthétique ou ses dogmes évoluent au fil de sa prolifique filmographie — et lui confère au passage l’apparence d’un splendide magma —, Lars von Trier parvient à assurer à celle-ci une indiscutable cohérence par son goût maladif du défi stylistique et de la provocation morale, que celle-ci transparaisse dans la diégèse ou dans le discours d’accompagnement.
Épouser comme ici le point de vue d’un détraqué jouissant dans l’esthétisation de la mise à mort de ses victimes participe évidemment de cette démarche : la mécanique humaine et celle, perverse, du suspense conduisent inconsciemment le spectateur de The House that Jack built à éprouver de l’empathie pour son héros lorsqu’il commet ses actes. À trembler à sa place lorsqu’il vérifie dix fois n’avoir oublié aucune goutte de sang qui révèlerait son crime ; à souffrir davantage pour ses névroses que pour ses proies. D’ailleurs, la première à subir ses assauts ayant tout faut (voire davantage) pour le pousser à bout, on serait presque tenté d’accorder à Jack des circonstances atténuantes !
La rouerie von Trier tourne à plein régime… Et déverse son content de gore dans la première partie du film : multi-diffusion de l’exécution de Uma Thurman, abrasion exagérée de cadavre, canardage d’enfants… Mais, à l’instar d’Hitchcock, le cinéaste danois produit moins d’images abjectes ou obscènes qu’il n’en suscite dans l’esprit de son public ainsi conditionné. Ainsi, dans la seconde partie, ce fieffé manipulateur obtient par la seule suggestion la fuite des âmes trop craintives par la seule (abominable) promesse d’une mastectomie sur blonde vivante. Du grand art.
Comme Mother! d’Aronofky, The House… métaphorise dans l’horrifique la démarche de création, sur un mode proche de Thomas de Quincey, en faisant côtoyer le monstrueux avec le plus noir des humours absurdes. Quant à l’incapacité chronique (l’impuissance…) de Jack à concevoir un chef-d’œuvre digne de ses attentes, l’obligeant sans cesse à remettre l’ouvrage sur le métier et à recourir in fine à un deus ex machina pour y parvenir, elle trouve un étonnant écho dans le film. Enchaînant une cascade d’épisodes isolément brillants — morceaux de bravoure visuels, effets narratifs ou de montage virtuoses dont von Trier est coutumier —, celui-ci achoppe sur une issue de bric et de broc, longuette et prévisible. Dommage : aucune fin ne justifie d’être moyen.
The House That Jack Built de Lars von Trier (Dan.-Fr.-Sué.-All., int.-16 ans, 2h35) avec Matt Dillon, Bruno Ganz, Uma Thurman… (17 octobre)
Crédit Photo : © 2018 Concorde Filmverleih GmbH / photo by Zentropa: Christian Geisnaes
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