Événement / La petite mais très vive Helvétie nous prouve qu'elle n'est pas qu'un paradis fiscal. La belle voisine pond de l'art comme des œufs. Dalya Daoud
On commencera d'abord par un bémol. Car en dehors de celui-ci, la grosse cavalerie helvète va peut-être bien détrôner pour l'hiver nos amis Belges qui détiennent, depuis un moment déjà, le trophée de meilleurs voisins artistiques en Europe. En effet, programmer les Young Gods, rock band fribourgeois d'influence, formé en 1985, paraît une excellente idée dans un événement suisse, mais Lyon a loupé le coche. C'est au Brise-Glace à Annecy que la musique industrielle sera déversée. Et de notre côté, privé de rock expérimental, on se consolera avec une bonne dose de programmation électro, principalement garantie par Arty Farty (l'asso de Nuits Sonores), qui propose notamment de rencontrer les cinq quadras zurichoises déjantées des Reines Prochaines, et les artistes du label Voodoo Rythm. Ajoutons à cela de la chanson en quantité dans la bonne lignée du chant suisse alémanique, mais aussi des expositions, une adaptation aux Célestins de l'histoire de Mephisto, de la littérature au Goethe-Institut, des rencontres avec des représentants de l'innovante architecture suisse et, surtout, de la danse. Pas de panique, la pacifique Suisse ne prépare pas de conquête, le tout s'étend de janvier à mars, de Thonon à Grenoble, et ne noyautera donc pas complètement Lyon.L'opération séduction du petit suisseMais pourquoi une telle vitrine, plantée d'un seul tenant et cogitée depuis trois ans ? L'objectif est simple : en montrant la vitalité de sa création contemporaine, la Suisse veut faire oublier son image de banquier coincé avec une croix rouge sur le veston. «Nous traînons cette réputation de paradis fiscal partout, aussi bien en Chine que chez nos voisins les plus proches, en France», constate Lukas Heuss, coordinateur du projet. On n'aura pas manqué de lui faire remarquer que c'est quand même la raison pour laquelle Jonnhy a emménagé chez eux. Ce à quoi Monsieur Heuss a judicieusement rétorqué que l'OL avait volé à la Suisse «le plus sympa des joueurs de foot, Patrick Muller». Imparable. Mais la leçon ne s'arrête pas là : glissé discrètement dans la programmation, un colloque à la bibliothèque de la Part-Dieu posera en mars cette étrange question : «la Suisse et sa démocratie directe, un exemple à suivre ?». Et voilà. Signe de la crise politique française où on sert la démocratie participative en plat principal du menu démagogique, on se prend en pleine figure une leçon d'autogestion par les Suisses... Ils n'ont pas froid aux yeux et c'est peut-être bien cette histoire de colloque qu'on va préférer.La Belle Voisine, du 12 janvier au 31 marsProgrammation complète sur www.labellevoisine.fr