Les Colons

Western chilien / Prix de la critique internationale à Cannes, Les Colons marque les débuts fracassants de Felipe Galvez avec une odyssée à cheval entre le Chili et l’Argentine, les deux pieds dans le génocide fondateur d’une nation dépeinte comme une grande machine à fabriquer de l’horreur et du déni.

Du cinéma chilien, nous sont parvenues ces dernières années des fictions qui tentaient de mettre des images sur la dictature Pinochet, sa réalité d’hier et ses conséquences aujourd'hui. Pour son premier long-métrage, Felipe Galvez va creuser bien plus loin dans l’histoire de son pays, avec des conclusions similaires.

En 1901, en Terre de Feu, le riche propriétaire terrien José Menendez recrute des mercenaires pour exproprier les populations autochtones, et ces brutes s’offrent les services d’un jeune métis pour leur servir de guide. Le film prend alors des allures de western, même si on est de fait plus proche de Werner Herzog que de John Ford… Les constantes mutations du paysage, dont on peine autant que les personnages à saisir la géographie, sont autant de façons de relier la sauvagerie des humains à une nature indomptable.

Des images pour effacer les images

Tout est en fait une affaire d’images. Il y a celles que Galvez fabrique avec son chef-opérateur Simone d’Arcangelo, sculptées dans la nuit, le crépuscule et la brume, fascinantes visuellement, mais où se joue aussi le trouble de ce que l’on montre et ce que l’on cache. Les massacres sont ainsi laissés dans le brouillard du hors-champ ou dans les plis d’un récit oral. Et si la violence est bien là à l’écran — jambe sectionnée, oreilles coupées, viols en tout genre… — elle n’est qu’un signe, parmi d’autres plus subtils, de la barbarie ambiante.

Dans son dernier tiers, le film opère un bond temporel et un renversement de perspectives, se projetant en 1908 dans les salons et l’esprit des colons "civilisés" qui tentent de dépasser le génocide pour fonder une nation réconciliée. Mais c’est encore une histoire d’images, officielles celles-ci, et des mises en scène qu’elles impliquent. Doit-on s’en rendre complice ou pas ? Ultime dilemme posé au spectateur, qui trouvera ici un affluent en apparence modeste au fleuve scorsesien sorti récemment, la fougue d’un jeune cinéaste très doué en prime.

Les Colons
de Felipe Galvez (Chili-Arg-Fr-R.U.-Dan-All-Suède-Taïwan, 1h37) avec Camilo Arancibia, Mark Stanley, Benjamin Westfall…
Sortie le 20 décembre 

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