The Survival of kindness

Post-apocalypse / La perte de la bonté comme premier signe de l’extinction de notre espèce ? Dans une fable pessimiste racontée sans le moindre dialogue, l’Australien Rolf de Heer juxtapose l’horreur des hommes et la beauté du monde en grand maître du cinéma.

Masques à gaz sur le nez et murmurant d’incompréhensibles onomatopées qui sont autant des cris de plaisir que des éructations, des hommes célèbrent un génocide avec un immense gâteau dont le glaçage représente des scènes de massacre. Le prologue de The Survival of kindness en pose les bases : il est déjà trop tard, le Mal est fait et s’est répandu comme un virus sur le monde. Élaboré et tourné pendant le COVID, le film en porte les stigmates, même s’il va savoir s’en affranchir pour viser une forme d’universalité.

Rolf de Heer, génial cinéaste australien de retour après dix ans d’absence (et de galères), a ainsi recours à l’abstraction pour raconter l’odyssée d’une femme noire anonyme, abandonnée dans une cage en plein désert, qui parvient à s’en échapper pour traverser les vestiges de ce que l’on n’osera pas appeler la civilisation : pas de dialogues (compréhensibles), des paysages dont la diversité dessine une impossible géographie et des situations qui, à défaut de renvoyer à une réalité existante, écrivent une histoire éternelle des rapports de domination.

Voyage au bout (de la fin) du monde

Refusant toute thèse pontifiante, De Heer filme son actrice comme un bloc dépourvu d’empathie face à la violence, la folie et la mort. Il n’y a pas d’autre but à son voyage que la survie — et encore… — et même lorsque débarquent dans le récit deux enfants, c’est plus son instinct qui lui dicte de leur venir en aide qu’une quelconque conscience morale. La majesté des plans composés par le cinéaste, avec cet œil que seuls les grands maîtres du cinéma savent aiguiser au fil des films, entre ici en conflit avec la laideur des êtres et de leurs actes, dans une dialectique pessimiste que tout le monde ne voudra pas entendre. La conclusion, ouverte à de multiples lectures, enfonce le clou tout en donnant à l’ensemble une portée métaphysique assez sublime.

The Survival of kindness
de Rolf de Heer (Aust, 1h36) avec Mwajemi Hussein, Deepthi Sharma…
Sortie le 13 décembre

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