Derrière la toile

La nouvelle exposition du musée « caution scientifique » de Grenoble, La Casemate, donne le ton dès son titre en posant la question très à propos : « Tous connectés ? ». Une interrogation à la mode, traitée ici avec ludisme et didactisme. Laetitia Giry

C’est ainsi que l’exposition se présente comme une « enquête sur les nouvelles pratiques numériques ». Ce qu’elle est en bien des points. Pour cela, elle s’arme d’un didactisme à toute épreuve, comme le visiteur doit s’armer de courage pour l’affronter et pouvoir profiter de ses bienfaits. Chacune des cinq pièces se déploie comme une dissertation bien sage et académique, avec des textes remplissant leurs rôles d’introduction, d’annonce du plan et d’un développement en trois points : enjeu, enquête, actualité. Si l’intérêt varie selon les salles (on préfère quant à nous les sujets plus sociétaux que purement scientifiques, un peu rébarbatifs à notre goût), les informations données sont souvent pertinentes, et les illustrations en vidéos, objets et expériences s’imposent comme des faire-valoir nécessaires.On veut jouer
Qu’il est étrange de revoir les modèles de téléphone portable de la décennie écoulée, exposés sous cloches de verre – en grands princes – comme un regard déjà historicisant sur une étape qui parait loin, mais sans l’être. Chaque étape du parcours réserve des surprises de ce genre : portable disséqué à observer à la loupe, imprimante 3D (la dernière née), ou encore détecteur d’émotions. Ce dernier fait immanquablement son petit effet, et ce malgré ses résultats approximatifs, voire désastreux – un grand écran diffuse l’image en direct du visiteur, immédiatement passé au scanner : âge, genre, émotion. Pour l’avoir allègrement essayer, on peut vous dire qu’il est possible d’être un garçon de neuf ans énervé à un instant t, et une femme de 30 ans heureuse cinq minutes plus tard : ce qui nous permet de douter de son efficacité, mais pas de sa capacité à fasciner. La diffusion du court-métrage ultra graphique de New York en cours de pixellisation (déjà vu à l’occasion de la soirée Narkolepsy cet été, et ayant également fait un gros buzz sur le net) ponctue une amorce de réflexion sur l’apparition d’une cyberculture et de la « génération numérique » concomitante, sur la question de la propriété industrielle et celle de la vie privée – vaste débat. Tous connectés ?
jusqu’au 27 mars, à la Casemate.