"Entropie, j'écris ton nom" : l'art du désordre au Magasin des horizons

Entropie, j'écris ton nom

Magasin CNAC

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Exposition / La nouvelle exposition collective du centre d'art grenoblois est une ode au désordre nécessaire à toute transformation. Stimulant !

En témoignant une fois de plus d’un intérêt notable pour les réalités sociales de son époque (l'entropie étant, selon le dictionnaire Larousse, « l'état de désordre d'un système »), le Magasin des horizons prend le parti, avec ce nouveau projet d’exposition, que la nécessaire destruction de certaines logiques de domination peut être fertile. Et comme il est toujours bon d’allier la théorie à la pratique, Entropie, j’écris ton nom réunit une majorité d’artistes femmes ainsi qu’un bon nombre d’artistes non-occidentaux, contribuant ainsi, à son échelle, à renverser le modèle dominant.

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Un parti pris qui n’exclut pourtant pas la présence de quelques mâles blancs puisque l’exposition s'ouvre avec un artiste majeur des années 1970 : l'Américain Gordon Matta-Clark (1943-1978). Un film projeté documente la réalisation, par la destruction, d’un gigantesque cône en creux dans un immeuble parisien condamné à disparaître. Destructrice, éphémère et vertigineuse, cette intervention renverse non seulement les conventions de la sculpture, mais également notre perception de l’architecture.

Plus loin, également documentées par d’élégantes photographies et une vidéo, les interventions d'Heidi Bucher (1926-1993) sont fascinantes : l’artiste suisse réalisait des empreintes de grandes maisons bourgeoises en les recouvrant d’une couche de latex qu’elle décollait par la suite. Aérienne, la forme ainsi obtenue évoque une sorte d’ectoplasme qui dévoilerait ce que dissimulent ces bâtisses cossues dont l’appartenance sociale des propriétaires exige une conformité qui n’est souvent qu’apparence.

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Gymnastique et domination patriarcale

Après un brin de gymnastique pour quitter la première salle et passer au travers de la sobre et efficace installation de la Polonaise Dominika Skutnik dont on ne dira rien, le parcours propose plusieurs vidéos de performances qui interrogent les processus de dominations coloniales ou patriarcales. En face, une série de photographies témoigne du projet de l’architecte espagnole Elena Carrillo Palacios qui entreprend de valoriser le savoir-faire des femmes nicaraguayennes en matière de construction en terre dans une perspective à la fois écologique et émancipatrice.

Un projet qui fait écho au film de la Belge Bie Michels que l’on trouve plus loin et qui propose une réflexion hypnotique sur l’origine de la tradition des briques artisanales à Madagascar (photo). Enfin, après cette série de vidéos, on arrive dans la grande rue du Magasin où le Belge Adrien Tirtiaux nous invite, tels des archéologues, à ausculter les traces des prestigieuses interventions artistiques passées dont les murs du centre d’art ont conservé la mémoire – renversement encore, ce ne sont finalement que de modestes couches de peintures et de placoplâtre.

En s’offrant au visiteur comme une réflexion ouverte, cette exposition prône ainsi l’émancipation créatrice et remet joyeusement en question les modèles établis, à commencer par ce que "doit être" un centre d’art. Bref, comme à son habitude, le Magasin des horizons perturbe les nôtres (habitudes et horizons) et c’est tant mieux !

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Entropie, j’écris ton nom
Au Magasin des horizons jusqu’au dimanche 28 juillet

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