Un sage en hiver

Chris Garneau

Le Ciel

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Des nappes de claviers comme autant de couches de poudreuse, une atmosphère enveloppante, des cors résonnant comme des cris de loup, une rythmique martiale, une voix aussi séraphique que fantomatique : dès son ouverture avec le funèbre et pourtant lumineux Our Man, le dernier disque de Chris Garneau Winter Games n’est pas sans rappeler la splendeur boréale des enregistrements de l'Américain Bon Iver. Ce résultat, d’une beauté absolue, Chris Garneau ne le doit pas exclusivement au fait d’avoir fait appel, pour boucler son exercice, à C.J. Camerieri et Rob Moose – hommes de mains (d'or) d’Iver.

Ce résultat, il le doit surtout, comme il le raconte, à un concept de départ qui met en avant l’hiver mais aussi au fait de s’être libéré l’esprit, apaisé, en partant s’isoler à la campagne, du côté d’Hudson, « upstate New York » comme on dit là-bas – entendre, au nord de cet état dont NYC n’est que la pointe de flèche. À partir de souvenirs hivernaux envoyés par des proches, Garneau continue de tisser une œuvre intime aux thématiques graves. Il faut dire que le Little (1, 53m) Big Man de la Big Apple s’est délesté au fil des ans de tous ses tabous, parlant très librement, y compris dans la presse (mais en mettant un point d'honneur à ne pas jouer, comme il le dit, les "drama queens") des saloperies qui ont jalonné sa vie (abus sexuels, drogue, dépression, décès de sa meilleure amie, traumatisme du 11 septembre) comme de son homosexualité, qu’il ne cache pas tout en refusant d’en faire un sujet.

C’est aussi sans doute ce qui rend son œuvre si touchante, honnête et en perpétuelle évolution. De Winter Song #1 et #2, premiers morceaux écrits pour cet album, très proches du Garneau "d’avant", tantôt folk, tantôt baroque-pop, à l’épique Oh God qui a clos son processus d’écriture et débute comme du Aqua avant de se noyer dans les chœurs et de noyer les cœurs tout en citant Phil Collins, on voit Garneau évoluer sous nos yeux dans le désordre et en parfait équilibriste de la composition (les sublimes The Whore in yourself et Danny, le très touchant Pas grave (en Français dans le texte donc) et son refrain à double détente (« C’est pas grave, tu me manqueras plus tard / (…) It’s so sad, i’ll miss you so bad… in a while »). Et on entrevoit s’ouvrir devant lui des pistes pour l’avenir qui, à défaut d’être enneigées ou même radieuses, s’annoncent magnifiques. SD

 

Winter Games (Clouds Hill / Differ-ant)

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