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Apocalypse No(w)

Entre supposées prédictions mayas, sortie de "4h44, dernière nuit sur terre", le dernier film d'Abel Ferrara, et autres événements thématisés « fin du monde », tout semble concorder vers un 21 décembre apocalyptique – même si on n'y fait que se bourrer la gueule. Peu étonnant quand on songe que la « fin du monde » est vieille comme... le monde. Et qu'elle n'a pas fini de nous tarauder. Stéphane Duchêne

ACTUS

Apocalypse No(w)

Entre supposées prédictions mayas, sortie de "4h44, dernière nuit sur terre", le dernier film d'Abel Ferrara, et autres événements thématisés « fin du monde », tout semble concorder vers un 21 décembre apocalyptique – même si on n'y fait que se bourrer la gueule. Peu étonnant quand on songe que la « fin du monde » est vieille comme... le monde. Et qu'elle n'a pas fini de nous tarauder. Stéphane Duchêne

Apocalypse No(w)

par Stéphane Duchêne

Vendredi 14 décembre 2012
2750
LECTURES

par Stéphane Duchêne

Vendredi 14 décembre 2012
2750
LECTURES

« Dans le roman qu'est l'histoire du monde, rien ne m'a plus impressionné que le spectacle de cette ville jadis grande et belle, désormais renversée, désolée, perdue […], envahie par les arbres sur des kilomètres à la ronde, sans même un nom pour la distinguer. » Ce pourrait être la voix-off du survivant d'un film post-apocalyptique déambulant dans Londres, New-York, Paris, Grenoble... Ce ne sont « que » les mots de l'explorateur américain John Lloyd Stephens, découvrant au XIXe siècle la splendeur passée d'une ancienne ville maya mangée par la jungle du Yucatan. Ces mêmes Mayas dont le calendrier aurait prévu la fin du monde pour le 21 décembre 2012. Peu importe que la Nasa elle-même ait démenti ces rumeurs dont les illuminés, les conspirationnistes et les survivalistes font leur miel et la fortune des agents immobiliers du village français de Bugarach, censé être épargné.

 

Qu'on la nomme Apocalypse (« révélation » dans la Bible) ou Armageddon (d'Harmaguédon, le « Waterloo » hébreu du livre de l'Apocalypse), la « fin du Monde » est depuis toujours le sujet de conversation préféré de l'humanité (avec la météo) et les occasion d'en parler sont nombreuses : extinctions, catastrophes comme lorsque le tremblement de terre de Lisbonne en 1755, le « 11 septembre des Lumières », ne manqua pas de faire s'écharper Voltaire et Rousseau sur la question de la contingence face à celle de la responsabilité humaine et son goût de la démesure – une question qui a eu sa résonance de l'ouragan Katrina à Fukushima. Ou lorsque la Shoah et Hiroshima firent prendre conscience à l'Humanité de la possibilité de son auto-anéantissement.

 

La Fin de toutes choses

 

Dans son indispensable Effondrement – Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, qui vaut mode d'emploi, le géonomiste Jared Diamond passe en revue les causes de l'effondrement d'une poignée de civilisations passées : Pascuans, réduits à néant par leur sale manie de vouloir ériger des statues monumentales jusqu'à détruire un écosystème, Anasazis, Mayas, Moches (le peuple, pas les gens laids)... Diamond s'y demande si, un jour, « des touristes médusés admireront les débris rouillés des gratte-ciel new-yorkais comme nous contemplons les ruines des cités mayas englouties par la jungle ». Une image que la fiction a rendu familière.

 

Sans doute, dans cette interprétation superstitieuse et fumeuse du calendrier maya – qui nous renvoie, à travers l'idée d'une civilisation jadis dominante éteinte en un clin d'oeil (ou quasi), le reflet de nos propres crises –, faut-il voir l'oblitération d'une mauvaise conscience de la modernité autant qu'un atavisme humain, un rappel à la finitude et à la lucidité. « Les signes annonciateurs du dernier jour, nous dit Kant dans La Fin de toutes choses, certains les reconnaissent dans le triomphe de l'injustice, dans l'oppression des pauvres sous la débauche insolente des riches et dans la disparition générale de la loyauté et de la confiance ; ou encore dans les guerres sanglantes déchaînées aux quatre coins du monde. (…) D'autres (…) dans des changements inhabituels de la nature, des tremblements de terre, des tempêtes, des inondations ou des comètes et des météores ». Nous sommes alors en 1794 et la Révolution française vient de changer le monde.

 

Naufrage

 

Comment ne pas voir dans 2012 de Roland Emmerich – qui manque de finesse mais pas nécessairement d'à propos témoignant au mieux du fait que le film catastrophe est l'une des manières dont une société se juge, fut-ce naïvement – cette métaphore d'un monde où seul les riches s'en sortent (ici, en monnayant leur Salut comme on se paie un voyage de luxe dans une arche de Noé new look – on peut en faire un parallèle ironique avec le Costa Concordia choisi comme symbole de décadence européenne par Jean-Luc Godard dans Film Socialisme et échoué quelques mois plus tard) ? Ailleurs, la peur d'un déclassement introduit par l'annihilation pure et simple de la lutte des classes : dans la recrudescence de la figure zombiesque, ce sous-prolétariat de la fiction apocalyptique ; dans La Route (où, The Day cette étonnante série B qui pourrait en être le sequel), dans des séries comme Terra Nova, Revolution, Falling Skies. Soit autant de « fins du monde », quelles qu'en soient les modalités, en appelant à une remise à zéro hobbesienne, à la possibilité d'une seconde chance qui ne vaudrait pas mieux qu'une punition. Comme le serait au fond la mort elle-même.

 

Dernière nuit

 

Dans 4h44, dernière nuit sur terre d'Abel Ferrara, l'espoir n'est plus permis mais la culpabilité demeure : un passage onirique de ce film pré-apocalyptique montre Cisco (Willem Dafoe) abattre le dernier palmier de l'île de Pâques, dans l'ombre fantomatique des Statues qui ont conduit à sa déforestation, comme un écho à l'analyse du biologiste américain Jared Diamond sur la civilisation pascuane. « Comment peut-on être aussi aveugle et ne pas penser à l'avenir. Comment ont-ils pu se foutre des conséquences ? Que ce soit en abattant un arbre, en construisant les Twin Towers ou la bombe atomique » se lamente ensuite Cisco dans un reproche à la terre entière et à lui-même. Là encore, nous voilà renvoyés dos-à-dos à un constat de Diamond sur l'extinction des Mayas cette fois, trop occupés à « privilégier la guerre et la construction de monuments au lieu de résoudre les problèmes de fond ».


Dans Melancholia de Lars Von Trier et Take Shelter de Jeff Nichols (tournés au même moment), on ne sait si la catastrophe annoncée est le fait de la folie de faux-prophètes névrosés, ou s'ils la provoquent par une sorte de regard médiumnique, d'extra-lucidité mélancolique, de culpabilité christique. Dans Le monde comme Volonté et comme représentation, Schopenhauer écrit que « des soleils et des planètes sans un œil pour les voir » ne sont rien, car « c'est bien de ce premier œil une fois ouvert que tout l'univers tient sa réalité ». « Le monde s'est ouvert avec le premier œil, complète Peter Szendy dans Apocalypse-cinéma, il se fermera aussi avec lui ». Celui de Justine (Melancholia), de Curtis (Take Shelter) et de Cisco (4h44), regard plongé dans celui de sa compagne, comme à l'instant d'avant l'éclat final du très similaire Last Night de Don McKellar (1998).

 

À propos de la métaphore à l'oeuvre dans son film, Ferrara a dit : « c'est tous les jours la fin du monde » et « chaque soir, quand vous allez dormir, c'est le dernier jour du monde ». Au définitif « le monde va finir » de Baudelaire, l'un des personnages de 4h44, doutant de l'Apocalypse mais désireux de ne pas louper le spectacle au cas où, répond d'ailleurs qu'il « n'en finit plus de finir ». Comme nous n'en finissons plus de fantasmer sa fin à la moindre occasion, de nous en inquiéter et, en guise d'exorcisme, de nous en amuser.

 

« Dans le roman qu'est l'histoire du monde, rien ne m'a plus impressionné que le spectacle de cette ville jadis grande et belle, désormais renversée, désolée, perdue […], envahie par les arbres sur des kilomètres à la ronde, sans même un nom pour la distinguer. » Ce pourrait être la voix-off du survivant d'un film post-apocalyptique déambulant dans Londres, New-York, Paris, Grenoble... Ce ne sont « que » les mots de l'explorateur américain John Lloyd Stephens, découvrant au XIXe siècle la splendeur passée d'une ancienne ville maya mangée par la jungle du Yucatan. Ces mêmes Mayas dont le calendrier aurait prévu la fin du monde pour le 21 décembre 2012. Peu importe que la Nasa elle-même ait démenti ces rumeurs dont les illuminés, les conspirationnistes et les survivalistes font leur miel et la fortune des agents immobiliers du village français de Bugarach, censé être épargné.

 

Qu'on la nomme Apocalypse (« révélation » dans la Bible) ou Armageddon (d'Harmaguédon, le « Waterloo » hébreu du livre de l'Apocalypse), la « fin du Monde » est depuis toujours le sujet de conversation préféré de l'humanité (avec la météo) et les occasion d'en parler sont nombreuses : extinctions, catastrophes comme lorsque le tremblement de terre de Lisbonne en 1755, le « 11 septembre des Lumières », ne manqua pas de faire s'écharper Voltaire et Rousseau sur la question de la contingence face à celle de la responsabilité humaine et son goût de la démesure – une question qui a eu sa résonance de l'ouragan Katrina à Fukushima. Ou lorsque la Shoah et Hiroshima firent prendre conscience à l'Humanité de la possibilité de son auto-anéantissement.

 

La Fin de toutes choses

 

Dans son indispensable Effondrement – Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, qui vaut mode d'emploi, le géonomiste Jared Diamond passe en revue les causes de l'effondrement d'une poignée de civilisations passées : Pascuans, réduits à néant par leur sale manie de vouloir ériger des statues monumentales jusqu'à détruire un écosystème, Anasazis, Mayas, Moches (le peuple, pas les gens laids)... Diamond s'y demande si, un jour, « des touristes médusés admireront les débris rouillés des gratte-ciel new-yorkais comme nous contemplons les ruines des cités mayas englouties par la jungle ». Une image que la fiction a rendu familière.

 

Sans doute, dans cette interprétation superstitieuse et fumeuse du calendrier maya – qui nous renvoie, à travers l'idée d'une civilisation jadis dominante éteinte en un clin d'oeil (ou quasi), le reflet de nos propres crises –, faut-il voir l'oblitération d'une mauvaise conscience de la modernité autant qu'un atavisme humain, un rappel à la finitude et à la lucidité. « Les signes annonciateurs du dernier jour, nous dit Kant dans La Fin de toutes choses, certains les reconnaissent dans le triomphe de l'injustice, dans l'oppression des pauvres sous la débauche insolente des riches et dans la disparition générale de la loyauté et de la confiance ; ou encore dans les guerres sanglantes déchaînées aux quatre coins du monde. (…) D'autres (…) dans des changements inhabituels de la nature, des tremblements de terre, des tempêtes, des inondations ou des comètes et des météores ». Nous sommes alors en 1794 et la Révolution française vient de changer le monde.

 

Naufrage

 

Comment ne pas voir dans 2012 de Roland Emmerich – qui manque de finesse mais pas nécessairement d'à propos témoignant au mieux du fait que le film catastrophe est l'une des manières dont une société se juge, fut-ce naïvement – cette métaphore d'un monde où seul les riches s'en sortent (ici, en monnayant leur Salut comme on se paie un voyage de luxe dans une arche de Noé new look – on peut en faire un parallèle ironique avec le Costa Concordia choisi comme symbole de décadence européenne par Jean-Luc Godard dans Film Socialisme et échoué quelques mois plus tard) ? Ailleurs, la peur d'un déclassement introduit par l'annihilation pure et simple de la lutte des classes : dans la recrudescence de la figure zombiesque, ce sous-prolétariat de la fiction apocalyptique ; dans La Route (où, The Day cette étonnante série B qui pourrait en être le sequel), dans des séries comme Terra Nova, Revolution, Falling Skies. Soit autant de « fins du monde », quelles qu'en soient les modalités, en appelant à une remise à zéro hobbesienne, à la possibilité d'une seconde chance qui ne vaudrait pas mieux qu'une punition. Comme le serait au fond la mort elle-même.

 

Dernière nuit

 

Dans 4h44, dernière nuit sur terre d'Abel Ferrara, l'espoir n'est plus permis mais la culpabilité demeure : un passage onirique de ce film pré-apocalyptique montre Cisco (Willem Dafoe) abattre le dernier palmier de l'île de Pâques, dans l'ombre fantomatique des Statues qui ont conduit à sa déforestation, comme un écho à l'analyse du biologiste américain Jared Diamond sur la civilisation pascuane. « Comment peut-on être aussi aveugle et ne pas penser à l'avenir. Comment ont-ils pu se foutre des conséquences ? Que ce soit en abattant un arbre, en construisant les Twin Towers ou la bombe atomique » se lamente ensuite Cisco dans un reproche à la terre entière et à lui-même. Là encore, nous voilà renvoyés dos-à-dos à un constat de Diamond sur l'extinction des Mayas cette fois, trop occupés à « privilégier la guerre et la construction de monuments au lieu de résoudre les problèmes de fond ».


Dans Melancholia de Lars Von Trier et Take Shelter de Jeff Nichols (tournés au même moment), on ne sait si la catastrophe annoncée est le fait de la folie de faux-prophètes névrosés, ou s'ils la provoquent par une sorte de regard médiumnique, d'extra-lucidité mélancolique, de culpabilité christique. Dans Le monde comme Volonté et comme représentation, Schopenhauer écrit que « des soleils et des planètes sans un œil pour les voir » ne sont rien, car « c'est bien de ce premier œil une fois ouvert que tout l'univers tient sa réalité ». « Le monde s'est ouvert avec le premier œil, complète Peter Szendy dans Apocalypse-cinéma, il se fermera aussi avec lui ». Celui de Justine (Melancholia), de Curtis (Take Shelter) et de Cisco (4h44), regard plongé dans celui de sa compagne, comme à l'instant d'avant l'éclat final du très similaire Last Night de Don McKellar (1998).

 

À propos de la métaphore à l'oeuvre dans son film, Ferrara a dit : « c'est tous les jours la fin du monde » et « chaque soir, quand vous allez dormir, c'est le dernier jour du monde ». Au définitif « le monde va finir » de Baudelaire, l'un des personnages de 4h44, doutant de l'Apocalypse mais désireux de ne pas louper le spectacle au cas où, répond d'ailleurs qu'il « n'en finit plus de finir ». Comme nous n'en finissons plus de fantasmer sa fin à la moindre occasion, de nous en inquiéter et, en guise d'exorcisme, de nous en amuser.

 

Crédit Photo : Melancholia de Lars von Trier

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