Parce qu'il ne peut plus faire de films, Arnaud Viard se filme en train de préparer un film. Un projet plus curieux en apparence qu'en réalité.
Le terme autofiction étant désormais galvaudé, il vaudrait mieux qualifier ce deuxième film écrit, réalisé et interprété par Arnaud Viard de performatif.
De son titre à son exécution, il s'agit en effet de transformer une impasse — faire un nouveau film — en réalité, par le simple geste de filmer. Arnaud Viard y est Arnaud Viard, cinéaste subissant refus sur refus, contraint de faire l'acteur dans un programme court télé et de reprendre son rôle de prof au cours Florent.
Sans aucune aigreur ni volonté de régler des comptes, il assume sa mouise et ses aventures deviennent la matière du film que nous regardons, moitié drôle — mais ce n'est pas son point fort — moitié dramatique — c'est déjà plus réussi.
Comme débarrassé de son enveloppe fictionnelle, ce projet pas si inclassable exhibe ainsi le squelette de ce qu'est aujourd'hui un "film français" : incertitudes sentimentales, crise de la quarantaine, mort de la mère pour les grandes lignes ; et dans les détails, l'incontournable scène de fête, les visites chez le psy ou la dispute en chambre.
C'est peut-être la plus grande qualité d'Arnaud fait son deuxième film : mettre à nu ce qui d'ordinaire est (mal) habillé chez les cinéastes hexagonaux, leur incapacité à se projeter dans l'altérité autrement que par des ficelles grossières que Viard a l'honnêteté de jeter à la poubelle.
Christophe Chabert