"Sentier"Art
En 2009 la commune de Vatilieu, dans les collines au-dessus de Vinay, à moins de 30′ de Grenoble, s’engageait dans un projet artistique original, proposant à quelques sculpteurs de venir enrichir le paysage de leurs œuvres monumentales. Avec un double défi à relever : les créer sur place en dix jours et les intégrer à l’environnement local.
Depuis, chaque année, de nouveaux artistes étoffent cette exposition permanente qui allie culture et nature. En effet les créations sont disséminées sur un sentier qui fait une boucle de 5 kilomètres partant de l’église du village : il alterne chemins en balcons, qui offrent un panorama qui embrasse Chartreuse et Vercors, encadrant Belledonne au fond de l’horizon, et sous-bois dans lesquels se nichent malicieusement certaines des œuvres.
A l’époque où se développe et s’institutionnalise le StreetArt, Vatilieu a en quelque sorte inventé le « Sentier »Art !
C’est une démarche remarquable, surtout de la part d’une commune de 400 habitants, que de rendre l’art accessible au plus grand nombre le long d’une simple promenade.
Ce n’est évidemment pas possible avec toutes les formes de créations ; le choix des sculptures monumentales est particulièrement judicieux : leur taille leur permet d’occuper l’espace sans être perdues dans le paysage ni écraser le promeneur ; bien évidemment les matériaux sont choisis pour résister aux aléas météorologiques ; enfin nombre d’entre elles rentrent en communion avec le panorama.
Celle qui ouvre le sentier, « L’arbre aux 4 vents, Made, 2010 », vous fait sentir le souffle dominant qui balaie régulièrement cette crête.
« Levant dominant, Gilbert Frizon, 2010 » pointe vert l’Est et circonscrit la chaîne de Belledonne.
« Rayonner, Xavier Ott, 2010 » tisse une immense toile d’araignée entre deux arbres au bord du chemin.
« Face à face, Thierry Chollat, 2012 » fait surgir de la forêt un immense hibou aux ailes déployées chassant un petit mammifère.
C’est la force et la poésie de cette galerie à l’air libre : les œuvres pourraient se suffire à elles-mêmes mais elles rentrent en écho avec leur environnement et s’en trouvent sublimées par ce dialogue entre art et nature. Face à certaines d’entre elles, j’aurais même souhaité un temps moins clément car on imagine facilement que par fort vent, s’ajoute une spectaculaire dimension sonore.
« Cascade, Charlie Skubich, 2011 » et ses longues chaînes métalliques prêtent à s’entrechoquer au moindre souffle.
« L’équilibre Bidon, Stéphane Rozand, 2012 » qui doit raisonner dans la forêt et la campagne environnante dès que le fut rouge juste suspendu à une branche se met en mouvement et heurte la colonne fixe toute proche. « Echos, Jonathan Bernard, 2013 » dans la bouche de laquelle doit s’engouffrer le vent et produire le son puissant d’un instrument de musique surdimensionné.
On aimerait aussi revenir l’hiver dans une ambiance ensoleillée et de neige fraîche pour voir les sculptures se détacher, par contraste, encore plus fortement de leur cadre naturel.
La balade s’achève par une des œuvres les plus belles et sans conteste la plus émouvante : ce corps qui s’éloigne de la forme avec laquelle elle ne faisait qu’un et qui s’appelle « L’ombre des regrets, Jean-Claude Escoulin, 2013».
Pour terminer un petit mot sur le site où j’ai découvert cette sortie : Mhikes, une application d’une startup grenobloise, qui ne se contente pas de proposer un trajet mais l’enrichit de conseils pour le parcourir, de photos, de vidéos et de commentaires pour mettre en valeur les principaux points d’intérêt, et même de quizz pour motiver les plus jeunes !
Sculpture aux 4 vents, Commune de Vatilieu, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 !
