Mardi 1 mars 2022 Tant qu’il y aura des livres, il y aura des films — le cinéma aimant autant la littérature qu'Alexandre Dumas l’Histoire. Pour preuve, voyez le soir (...)
Drame acide / Stéphane Brizé ébranle nos certitudes en s’essayant avec un certain succès au mélo, épaulé par un surprenant Guillaume Canet et la formidable Alba Rohrwacher. En salles le 20 mars 2024.
On n’attendait pas le cinéaste dans une veine aussi grinçante. La première demi-heure, comédie à bout de nerfs et jubilatoire, observe un comédien à succès se morfondre dans une luxueuse station balnéaire. Hors-Saison accumule les gags visuels ou burlesques et transforme Guillaume Canet en parfait clown blanc.
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Qu’il soit confronté à une machine à café récalcitrante ou un prof de sport philosophe, ce dernier se fond parfaitement dans un comique de la passivité. Petit bourgeois solitaire face à des problèmes superficiels que l’acteur, valeureux de se moquer ainsi de sa propre image, incarne avec un plaisir palpable.
Portrait d’un acteur en dépression
Quelques semaines après Cédric Kahn, Stéphane Brizé rappelle que la comédie n’est jamais aussi réussie que lorsqu’elle est prise en main par de vrais auteurs. Humour ricanant à la Ruben Östlund, spleen contemporain à la Houellebecq (on pense forcément à Thalasso de Guillaume Nicloux), il mixe les références. Il s’autorise même des clins d’œil amusés à sa propre filmographie, notamment une allusion au scénario d’un mauvais drame social ou à la problématique du suicide assisté, au cœur de Quelques heures de printemps.
L’arrivée d’Alice, avec qui le protagoniste a jadis vécu une idylle cruellement interrompue, va rebattre les cartes. L’humour vachard est abandonné au profit du drame sentimental. Le réalisateur trouve le juste regard sans sombrer dans l’effusion lacrymale. Il filme avec attention Alba Rohrwacher, scrute tendrement la moindre de ses émotions. Cette brusque rupture de ton et la disparition presque totale de velléités comiques est contrebalancée par une élégante sensibilité et une dimension picturale inattendue.
Peintre paysagiste
Fort d’une vraie rigueur formelle, Stéphane Brizé n’utilise jamais le décor de la côte bretonne de manière anecdotique. Il tranche avec le naturalisme vif de sa collaboration avec Vincent Lindon ou de son adaptation de Guy de Maupassant (Une Vie). Il s’inscrit dans une imagerie proche de celle de Bruno Dumont en donnant naissance à de superbes plans tableaux, métaphore des tourments intérieurs de son couple de personnages.
Autre surprise, l’excellente bande originale de Vincent Delerm qui réactive le thème musical, un principe tombé en désuétude dans la production hexagonale. In fine, Brizé renoue avec une certaine tradition du cinéma populaire français tout en s’inscrivant pleinement dans son temps. C’est simple, drôle, beau et attachant.
Hors-Saison
De Stéphane Brizé (Fr, 1h55) avec Guillaume Canet, Alba Rohrwacher, Sharif Adoura...
Sortie le 20 mars
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