Mort

Par Samar Yazbek (Syrie). Originaire de Syrie, cette grande figure de l’opposition à Bachar el-Assad a publié quatre romans dans son pays. Journaliste et écrivaine reconnue, elle est contrainte à l’exil en 2011 et se réfugie alors en France. Son dernier livre, relatant ses différentes infiltrations en Syrie malgré son interdiction d’y retourner, est un témoignage poignant sur l’horreur de la révolution et la montée du djihadisme. Indifférente au danger, elle multiplie les rencontres et se fait un devoir de raconter ces destins brisés.

La mort est la réponse aux grandes questions. Une réponse close ouverte sur des interrogations encore plus complexes. Chaque réponse y ouvre sur une question.

C’est une fin. C’est un début. Elle est l’unique consistance indivisible… la fragilité enveloppée de secrets et de silence, le lieu infini de l’imaginaire…

La mort est le seul mot valable comme synonyme tous de tous les autres, inclusif de toutes les significations possibles. Le mot porte le sens et son contraire. Il est le sens dans sa plénitude complète en même temps qu’il en est l’insignifiance et le silence absolu !

Avant la révolution et la guerre en Syrie, la mort était pour moi une question et une interrogation. A présent, la mort est devenue une banalité. La mort est facile, c’est la vie qui est difficile. La mort est désormais un fait habituel, on s’en accommode comme s’accommode du mal, et elle devient partie intégrante de notre vie. J’ai vu la mort de près, je l’ai vue effriter des corps sous mes yeux. Je lui ai fait face, j’ai été en sa présence. A plusieurs reprises, je l’ai manquée et j’en ai davantage compris le sens dans les instants qui précédaient ma mort potentielle sous l’effet des bombes et des obus ! C’est le rien… et le tout. Elle est plus facile et toujours plus proche qu’on ne croit. La mort était circonscrite là-bas, je n’en comprenais plus aucune définition, si ce n’est qu’elle était l’habitant de ce lieu oublié dont tout le monde parlait, sans savoir ce qui s’y passait.

La mort est en ce moment le seul bien que je possède et dont je puisse parler. Elle est le thème dans mes écrits. Nous sommes devenues une part l’une de l’autre. Nous sommes réconciliées. Je la comprends parfaitement. Sans la mort, l’humanité disparaîtrait. Elle fait partie du cycle de la vie. Et si seulement la parque n’existait pas ? Imaginons un monde où ni les hommes, ni les êtres vivants ne s’éteignaient. Ce serait un monde totalement mort. La vie ne pourrait se poursuivre, et la terre deviendrait un tas de moisissure. Aussi, j’appréhende la mort avec une complète acceptation. Je n’en ai pas peur. Elle fait partie de notre vouloir, une volonté que la raison humaine conditionne par la question de la compréhension et de la connaissance. D’où les légendes, les religion, mais aussi les questions d’histoire et de philosophie. De grandes questions qui, à différents niveaux, convergent toutes vers celle de la mort, que nous nous efforçons de comprendre et d’insérer dans le cours de notre vie.

La mort ne supporte pas que l’on se tienne à une même distance d’elle. Elle peut être tranchante et explicite. Elle peut survenir immédiatement ou pas. Telle un être invisible se mouvant parmi nous, elle est déterminée par le silence et l’inconnu.

A son égard, nous n’avons d’autre moyen que de la laisser libre, et en faire le dernier de nos soucis. Nous pourrons la vaincre par la vie qu’on épuise et en contrant la logique. Pour comprendre la mort, il n’y a que l’issue du mouvement, de la vie, de la plénitude au quotidien, de la puissance vitale même qui nous met à pied d’égalité face à la mort en faisant fi des questions qui nous incitent à la fuir.

La mort est la vie même. Une simple contemplation la transforme en un maillon dans la chaîne de l’existence. La mort découle de la vie qui découle de la mort, et ainsi de suite, selon des cycles auxquels nous sommes soumis d’office, conformément à la nécessité de survivre et à la crainte d’extinction.

Ce n’est pas tant la mort qui pose problème. Car il y a longtemps que l’humanité s’est réconciliée avec la mort, en en fournissant des outils d’explication. Le plus grand problème qui nécessite une définition, c’est bien la vie. La vie même qui advient par la mort, et sans laquelle, il n’y aurait pas d’ailleurs.

C’est le grand secret, et l’inconnu suprême. Jusque dans ces mots, nous ne ferons jamais que… ruser avec la mort.

Traduit par Hana Jaber

Version originale

الموت جواب الأسئلة الكبرى. جواب مغلق. يفتح على أسئلة أكثر تعقيدا. كل جواب فيه يفتح سؤالا.

هو نهاية. هو بداية. الصلابة الوحيدة غير القابلة للتفتت...والهشاشة المغلفة بالأسرار والصمت، المكان اللامتناهي للخيال...

الموت هو المفردة الوحيدة الصالحة كي تكون مرادفا لكل الكلمات، والتي نستطيع تضمينها ما نريد من معاني. المعنى ونقيضه معا. هي امتلاء كامل بالمعاني، وهي خواء المعنى والصمت المطلق!

قبل الثورة والحرب في سوريا كان الموت بالنسبة لي هو سؤال وبحث. الآن تحول إلى فعل عادي. الموت سهل، الحياة صعبة. تحول الموت إلى حدث اعتيادي، مثلما نعتاد الشر، ويتحول إلى جزء من حياتنا. رأيت الموت عن قرب. عرفته وهو يفتت الأجساد أمامي. واجهته، ووقفت في حضرته. أخطأني مراراً، وفهمت معنى الموت أكثر في اللحظات التي سبقت موتي المحتمل تحت وقع البراميل والقذائف ! إنه اللاشيء... وهو كل شيء. إنه أسهل وأقرب مما نتوقع دائما. الموت كان محصوراً هناك، ولم أعد أفهم تعريفا واحداً له، سوى أنه الساكن في ذلك المكان المنسي الذي يتحدث عنه الجميع، ولا أحد يفهم ما يحصل به.

الموت هو كل ما أملك للحديث عنه الآن. هو موضوعي في كتاباتي. صار جزءا مني، وأنا جزء منه. نحن متصالحان. أفهمه تماما. لولا الموت، لفنيت البشرية. هو جزء من دورة الحياة، لو نتخيل فقط أن الموت لم يكن موجودا؟ لنتخيل عالما لا يموت فيه البشر ولا تفنى فه الكائنات الحية، سيكون عالما ميتا بالكامل. لن تستمر الحياة، وستتحول الأرض إلى كتلة من العفن، لذلك أواجه الموت برضى تام. لا أخاف منه. هو جزء مما نريده، هذه الارادة مشروطة عند العقل البشري بسؤال الفهم والمعرفة، لذلك كانت هناك الاساطير والديان، وأسئلة الفلسفة والتاريخ. الأسئلة الكبرى التي تنتهي كلها وعلى تعدد مستوياتها ضمن سؤال الموت ومحاولة فهمه وتطويعه ضمن سياق حياتنا.

لا يحتمل الموت الوقوف على مسافة واحدة منه. هو حاد وواضح. إما أن يأتي مباشرة أو لا يأتي، هو مثل كائن خفي يتحرك بيننا، وهو محكوم بالصمت والمجهول.

لا نملك اتجاهه سوى تركه حراً طليقا، وجعله في مؤخرة اهتمامنا. يمكن لنا هزيمته عبر الحياة نفسها واستنفاذها بما يخالف منطقه. الحركة والحياة والامتلاء بالعيش، هي السبيل الوحيد لفهم الموت، العلاقة الندية مع الموت تصنعها قوة الحياة عبر مواجهتنا لأسئلة الهروب منه.

الموت هو الحياة نفسها. تأمل بسيط له يحوله الى جزء من سلسلة الحياة. الموت تخلقه حياة آخرى، ومن الحياة الأخرى ينشأ الموت، وهكذا دوائر ودوائر نحن نتبعها ولا نستطيع سوى الخضوع لها كجزء من منطق الاستمرار والخوف من الفناء.

ليست المشكلة في الموت نفسه، فقد تصالح معه البشر من زمن طويل ووضعوا أدوات شرح له. المشكلة الأكبر التي تحتاج لتعريف هي الحياة. الحياة نفسها التي تأتي بالموت، ولولاها لما كان هناك.

إنه السر الكبير، والمجهول الأعظم، وكل ما نفعله، حتى هذه الكلمات...هي للتحايل عليه.

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