Par Guillaume Guéraud (France). Cinéphile depuis son plus jeune âge par la force des choses - pas de télé à la maison - il revisite et parodie dans la Série B (éditions Sarbacane) différents films de genre pour les jeunes lecteurs, du western au film d’horreur. Il publie également des romans noirs pour un public adolescent aux éditions du Rouergue.
Il y a désormais plus de mille morts dans ma bibliographie. Je les ai comptés soigneusement. Environ deux cents dans King Kaloumar et Barbe Verte, quarante-six dans Duel dans la vallée, quatre dans La Rage du dragon, trente-cinq dans Déroute sauvage, six dans Je mourrai pas gibier, cinq dans Coup de sabre, un dans Cité Nique-le-Ciel, une dans Anka. J'ai franchi la barre des mille grâce à Plus de morts que de vivants où j'exécute six-cent-douze collégiens, soixante profs, plus une cinquantaine de flics et secouristes.
Cette lourde addition relève plus de la boucherie que de la poésie. Tant pis. Ou tant mieux. Le sang qui coule me plaît. Je trouve ça beau et romanesque. Et même romantique. J'ai éborgné-égorgé-éventré. J'ai tranché la langue d'un homme au sécateur et j'ai cloué la bouche d'un gamin avec une agrafeuse murale. Ça m'éclate. Et ça me calme. Ça me permet de desserrer les laisses invisibles qui m'étranglent. Ça me permet surtout d'éviter de tuer des vrais gens dans la vraie vie. Je serais un putain de serial-killer si je n'écrivais pas. J'assassinerais les grands patrons, les actionnaires, les exploiteurs de tout poil. Et je fusillerais les électeurs du Front National. Mais je reste malheureusement sage. En commettant mon carnage page après page.
Un hors-la-loi déclare dans la première scène de Pat Garrett et Billy the Kid de Sam Peckinpah : « Le monde devient pire qu'une prison pour les gens comme nous... » Je ne suis pas un cow-boy comme lui et je ne connais pas encore la prison mais c'est cette définition du monde qui me pousse à écrire des histoires.
