Bellflower

Impliqué dans toutes les strates de confection de son bel OVNI cinématographique, Evan Glodell nous livre un vrai film indépendant, dans le sens originellement oublié du terme : libre de toutes contraintes et d’un quelconque formatage. François Cau

Avec les années, on en était venus à se méfier comme de la peste du label “sensation du festival de Sundance“. Le raout surmédiatisé de Robert Redford n’était devenu qu’une vitrine pour des objets interchangeables (entre naturalisme crapoteux et vernis petit-bourgeois névrosé), produits par des filiales de gros studios, confinant la notion de cinéma “indépendant“ à une image de plus en plus policée. Fort heureusement, quelques anomalies parviennent encore à se glisser dans cette mécanique trop bien huilée. Il en va ainsi de Bellflower, dernière “sensation du festival de Sundance“ en date. Un projet porté pendant trois ans par son réalisateur - scénariste - monteur - producteur - acteur principal Evan Glodell, qui aura poussé le système D jusqu’à bricoler lui-même ses caméras. Ce label d’authentique indépendance logistique suffit-il à lui garantir un crédit aveugle ? Bien sûr que non. Le fait est que Bellflower est porteur d’une vision cinématographique sincère, se nourrissant du vécu et de la volonté à toute épreuve de son auteur, où la forme est en adéquation avec le fond - et en marge des canons narratifs actuellement en vigueur.

Tempête sous un crâne

Tout part de l’amitié foutraque entre Woodrow et Aiden, deux grands gamins occupant leur temps à confectionner un lance-flammes et une bagnole à la Mad Max pour être prêts à survivre dans un futur post-apocalyptique. Puis Woodrow tombe fou amoureux de Milly, perd ses projets de vue jusqu’à ce que… Interdiction d’en dire plus. La plus grande qualité du film est sa propension à brouiller les pistes, à faire se chevaucher les degrés de réalité grâce à une mise en scène volontairement elliptique, heurtée, qui finit par épouser le chaos mental de ses protagonistes. Mais c’est avant tout l’immédiate crédibilité des relations pourtant foutraques entre les personnages qui porte Bellflower ; les complicités irradient l’écran, les rancœurs le consument. Quand un réalisateur se lance dans un projet dont il est le cœur névralgique, soit ça finit par puer le narcissisme, soit, comme quand le cas d’Evan Glodell, ça recentre le 7e art comme l’un des plus beaux moyens d’expression de ceux qui ont réellement quelque chose à partager. 

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Mardi 8 juillet 2014 De Vincent Grashaw (ÉU, 1h44) avec P. J. Boudousqué, James C. Burns…

Suivez la guide !

Clubbing, expos, cinéma, humour, théâtre, danse, littérature, fripes, famille… abonne toi pour recevoir une fois par semaine les conseils sorties de la rédac’ !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X