Mardi 23 janvier 2024 De tous les festivals de courts ayant lieu dans la métropole, Un poing c’est court à Vaulx-en-Velin a toujours eu un statut à part : c’est un festival engagé, (...)
Les films à voir au cinéma à Lyon la semaine du 2 mars
Par Vincent Raymond
Publié Mardi 1 mars 2022 - 3336 lectures
Photo : © Condor distribution
Indispensable
★★★★☆ Belfast
1969. Les quartiers nord de Belfast où vit le petit Buddy sont la proie d’émeutes cristallisant la rivalité séculaire entre catholiques et protestants. Chronique d’une enfance entre blindés britanniques, premières amours, et perspective d’exil…
Branagh aura donc attendu trente ans et dix-neuf longs-métrages pour signer son réel “premier film“, le plus ouvertement intime, sincère, autobiographique — et sobre, à mille lieues des remakes ou adaptations (Shakespeare, Christie, Marvel, Disney…) faisant jusqu’alors écran à son moi profond. Si ce carnet de souvenirs pudique reste classique dans la fond (le petit héros ayant neuf ans, c’est l’âge de toutes les découvertes, des bêtises et des premiers chagrins marquants), le climat politico-social le colore d’une teinte originale. Une teinte d’autant plus travaillée que l’ensemble du film est photographié en noir et blanc, à l’exception du prologue, de l’épilogue et des séquences de spectacle vivant, moments d’épiphanie pour le futur comédien. Resserré sur la famille, Belfast insiste sur la chance d’avoir été entouré de grands-parents ouverts, soudés et aimants (Ciarán Hinds et Judi Dench, couple inattendu porteur de toute une mémoire ouvrière) ainsi que de parents aux principes moraux structurants. Une œuvre sans afféterie et universelle, puisque dédiée à « ceux qui sont restés et ceux qui sont partis ».
Un film de Kenneth Branagh (G-B, 1h39) avec Caitriona Balfe, Jamie Dornan, Ciarán Hinds… (sortie le 2 mars)
★★★★☆ Rien à foutre
Cassandre travaille comme hôtesse de l’air pour une compagnie low-cost basée dans une île méditerranéenne. Entre vols répétitifs et coups d’un soir arrosés, sa vie tient de la routine d’une spring breakeuse à l’année. Vient le moment d’évoluer et de revenir au bercail…
Rarement on aura autant eu l’impression de “voir“ sur écran un livre de Houellebecq : mêmes protagonistes roboïdes, petits soldats interchangeables du capitalisme zombifiés par la consommation de sexe et de stupéfiants divers ; même minutie dans la description des process, du vocabulaire corporate, du management standardisé des multinationales ; même observation clinique du vide existentiel et de l’ennui abyssal que ces métiers survendant du kif, du fun et des sourires de façade procurent à leurs employés. Il faut, au passage, un sacré talent pour documenter le désœuvrement sans lasser son public : le choix des cinéastes de filmer de manière quasi amateur les séquences de soirées restitue parfaitement l’improvisation totale des nuits sans lendemain de Cassandre.
Et puis Rien à foutre bifurque, passée sa moitié, sur un autre film évoquant davantage le cinéma des Dardenne, quand Cassandre rentre chez son père et sa sœur en Belgique. Ce segment permet de comprendre son besoin de changer d’air et de s’inventer une vie à elle. Avec sa moue lasse, Adèle Exarchopoulos est l’interprète idéale de ce faux film mineur qui, contrairement à ce que son titre en apparence provocateur pourrait laisser croire, travaille son sujet en profondeur.
Un film de Emmanuel Marre & Julie Lecoustre (Fr-Bel, 1h52) avec Adèle Exarchopoulos, Alexandre Perrier, Mara Taquin… (sortie le 2 mars)
À voir
★★★☆☆ Ali & Ava
Ils vivent dans des quartiers et familles que tout oppose : lui dans la communauté indienne, elle jadis avec un nationaliste anglais. Mais la musique et leur solitude va rapprocher ces quadra-quinqua, en dépit des autres. L’amour est toujours un combat au pays de Shakespeare.
Dans le sillon du Ken Loach de Just A Kiss (2004), Clio Barnard montre le manque de porosité toujours marqué dans une société britannique favorable au communautarisme — avec notamment pour conséquences le fait que les groupes ethniques ou cultu(r)els se trouvent assignés à des quartiers, rendant plus difficile la possibilité de la mixité et favorisant le repli identitaire de toutes parts. Il ne reste que le langage universel de la musique pour fédérer les âmes de bonne volonté ; à cette enseigne, la séquence montrant Ali se faire caillasser sa voiture par des gosses lorsqu’il pénètre le quartier où vit Ava, avant de conquérir tout le monde en parlant du DJ local et de pousser du gros son, est la plus enthousiasmante de cette histoire, hélas immortelle.
Un film de Clio Barnard (G-B, 1h35) avec Adeel Akhtar, Claire Rushbrook, Shaun Thomas… (sortie le 2 mars)
★★★☆☆ Robuste
Acteur monumental dans tous les sens du terme, Georges dépend pour le quotidien des services d’un garde du corps. Quand celui-ci part pour une autre mission, il se fait remplacer par la jeune Aïssa, une lutteuse tout aussi robuste que Georges. Peu à peu, elle va gagner sa confiance…
C’est presque un documentaire animalier qu’a réussi ici Constance Meyer autour de la Bête, du “monstre” cinématographique Depardieu — qu’elle avait déjà dirigé dans deux courts-métrages — : la contiguïté entre le rôle et le comédien/modèle est obvie. Le portrait indirect passe d’autant mieux que l’acteur n’est pas saisi dans sa caricature éculée d’ogre, mais dans son intériorité d’homme massif vieillissant, seul, intranquille, sans-gêne ; et surtout, à travers les yeux d’une jeune femme capable (physiquement et psychologiquement) de lui tenir tête. Le titre a beau être au singulier, la robustesse se trouve bien partagée par les deux protagonistes se jaugeant et s’affrontant à égalité, comme des fauves ou des lutteurs durant tout ce film inattendu, mêlant séquences crépusculaires abstraites et saynètes cocasses de l’artiste au travail. Une jolie surprise.
Un film de Constance Meyer (Fr, 1h35) avec Gérard Depardieu, Déborah Lukumuena, Lucas Mortier… (sortie le 2 mars)
À la rigueur
★★☆☆☆ Viens je t’emmène
Médéric s’éprend d’Isadora, une prostituée quinquagénaire clermontoise. Mais tout vient contrarier son amour : un attentat qui éclate en ville, le mari-souteneur d’Isadora, l’irruption de Selim dans son hall, un jeune SDF qu’il va aider malgré lui…
Certaines histoires peuvent se révéler difficilement miscibles entre elles, à l’instar de l’eau et de l’huile dont l’émulsion s’avère des plus instables. C’est le cas ici, où l’on a bien du mal à oublier le contexte de couvre-feu et de la paranoïa anti-Arabes une fois l’attaque terroriste survenue (Belvaux au Guédiguian en auraient tiré un drame d’enfer) pour suivre les mésaventures de quéquette d’un clone de Vincent Macaigne — désolé pour Jean-Charles Clichet, mais le ton qu’il emprunte ici l’efface au profit de l’image de son confrère et néanmoins ami. L’hybridation de sujets aussi radicalement éloignés tourne court, donnant lieu à une cacophonie trouvant sa plus parfaite incarnation dans le thème musical final, aux sonorités divergentes. Bref, la mayonnaise ne prend pas.
Un film de Alain Guiraudie (Fr, avec avert., 1h40) avec Jean-Charles Clichet, Noémie Lvovsky, Iliès Kadri… (sortie le 2 mars)
★★☆☆☆ Là-haut perchés
Dans un village d’altitude des Alpes-de-Haute-Provence, une poignée d’obstinés résiste à l’isolement, à la vieillesse, aux nouvelles anxiogènes du monde extérieur et raconte son itinéraire…
Depuis La Vie comme elle va (2004) de Jean-Henri Meunier, on a vu une petite poignée de documentaires exaltant la ruralité authentique et brossant ses habitants pittoresques. S’y ajoute toujours une touche de roman (ici, la légende d’une météorite) et un p’tit fond de nostalgie donnant envie d’entonner le refrain de La Montagne de Jean Ferrat. Bien sympathique à regarder, tous ces films sont malheureusement un peu interchangeables, faute de mettre l’accent sur un personnage en particulier. Administrativement, un village a besoin de plusieurs âmes pour exister ; au cinéma, une seule suffit.
Un documentaire de Raphaël Mathié (Fr, 1h47) (sortie le 2 mars)
à lire aussi
derniers articles publiés sur le Petit Bulletin dans la rubrique Actus...
Mardi 31 octobre 2023 Le festival Lumière vient de refermer ses lourds rideaux, les vacances de la Toussaint lui ont succédé… Mais ce n’est pas pour autant que les équipes de (...)
Mardi 31 octobre 2023 Si le tourisme en pays caladois tend à augmenter à l’approche du troisième jeudi de novembre, il ne faudrait pas réduire le secteur à sa culture du pampre : depuis bientôt trois décennies, Villefranche célèbre aussi en beauté le cinéma francophone....
Mardi 5 septembre 2023 C’est littéralement un boulevard qui s’offre au cinéma hexagonal en cette rentrée. Stimulé par un été idyllique dans les salles, renforcé par les très bons débuts de la Palme d’Or Anatomie d’une chute et sans doute favorisé par la grève affectant...
Mardi 29 août 2023 Et voilà quatre films qui sortent cette semaine parmi une quinzaine : N° 10, La Beauté du geste, Alam puis Banel & Adama.
Suivez le guide !
Lundi 12 juin 2023 Parmi les jeunes maîtres du cinéma nippon, Kôji Fukada est en train de se tailler une place de plus en plus importante. Présenté à la dernière Mostra, Love Life est un film sur les liens invisible, l’incommunicabilité, la famille et la résilience....
Mercredi 19 avril 2023 Invité aux Rencontres du Sud pour présenter sa nouvelle comédie avec Charlotte Gainsbourg, "La Vie pour de vrai", Dany Boon évoque les lointaines inspirations qui l’ont aidé à modeler son personnage de candide. Comme son rapport inattendu à Agnès...
Mercredi 30 novembre 2022 Deux lieux atypiques accueillent des projections en ce début décembre. D’abord, la Maison de l’Écologie dans le 7e arrondissement ce jeudi 1er à 20h à (...)
Mercredi 30 novembre 2022 Le Festival du Film Court du Zola ayant servi de warm-up, on ne lâche pas l’affaire et l’on continue avec entrain avec la deuxième édition de Mutoscope, (...)
Jeudi 1 décembre 2022 Le titre un brin lapidaire de la livraison mensuelle du cycle Ciné Collection concocté par les salles du GRAC (“Femmes à la caméra“) ne doit pas susciter (...)
Mercredi 30 novembre 2022 L’un aurait fêté son centenaire, l’autre ses 130 printemps en 2022. Mais tous deux sont d’une étonnante contemporanéité et — curieusement — complémentaires. Ernst Lubitsch et Francesco Rosi finissent l’année à l’Institut Lumière.
Jeudi 6 octobre 2022 Huit ans après "La French", le réalisateur et le comédien se retrouvent pour un film à nouveau tiré d’un fait historique mais beaucoup plus contemporain : les attentats de 2015. Rencontre autour de la conception d’un film sur une tragédie française.
Lundi 5 septembre 2022 Bien qu’il atteigne cette année l’âge de raison avec sa 7e édition, le Festival du film jeune de Lyon demeure fidèle à sa mission en programmant l’émergence des (...)
Lundi 5 septembre 2022 Appelés à retrouver leurs chères études, les écoliers se sentiront-ils moins seuls en sachant que les cinéphiles lyonnais doivent suivre un programme au moins aussi chargé en ce mois de septembre avec moult rencontres et événements dans les salles ?...
Mardi 23 août 2022 Après avoir endossé sur scène le rôle d’Hortense dans La Dégustation d’Ivan Calbérac, Isabelle Carré le reprend avec enthousiasme pour l’adaptation réalisée par l’auteur. L’occasion de converser avec une comédienne toujours impeccable, devenue...
Lundi 5 septembre 2022 Malavida ressort l'un des films phares de la Nouvelle Vague tchèque, dont l'inventivité et la pertinence demeurent totalement d'actualité.
Mercredi 17 août 2022 Et si Forrest Gump portait un turban et dégustait des golgappas plutôt que des chocolats ? L’idée est audacieuse mais aurait mérité que le réalisateur indien de Laal Singh Chaddha se l’approprie davantage. Si l’intrigue réserve forcement peu de...
Mercredi 11 mai 2022 Lauréat début mai du Meilleur premier film de fiction et Meilleur acteur dans un second rôle aux 9e Prix Platino (attribués aux productions du monde ibérique), Karnawal incarne la relève du cinéma latino-américain. Avant de recevoir ses récompenses,...
Mercredi 11 mai 2022 Alors que son film posthume Plus que jamais réalisé par Emily Atef sera présenté dans la section Un certain regard du 75e festival de Cannes, l’Aquarium (...)
Jeudi 12 mai 2022 Tous deux ont porté le Nouvel Hollywood sur les fonts baptismaux, joué (sans avoir de scène en commun) dans le plus célèbre film de mafia/la plus fameuse (...)
Jeudi 12 mai 2022 Et vous, comment vivrez-vous ?, le nouveau long-métrage de Hayao Miyazaki n’étant annoncé que l’année prochaine (une décennie après le dernier), le Pathé Bellecour (...)
Vendredi 13 mai 2022 Mercredi, jour de sorties en salles : voici notre sélection des films à voir à Lyon cette semaine.
Mardi 10 mai 2022 Mercredi, jour de sorties en salles : voici notre sélection des films à voir à Lyon cette semaine.
Mardi 26 avril 2022 Comédienne chez Denys Arcand (L’Âge des ténèbres) et surtout Xavier Dolan (Les Amours imaginaires, Laurence Anyways), la Québécoise Monia Chokri avait réalisé en 2019 un premier long-métrage remarqué, La Femme de mon frère. Elle est de retour...
Mardi 26 avril 2022 Un très joli conte de printemps s’apprête à sortir sur les écrans : le bien nommé C’est magnifique !, troisième long-métrage du comédien et cinéaste Clovis (...)
Mardi 26 avril 2022 Retour à un calendrier habituel pour le festival Cinémas du Sud concocté par la galerie Regard Sud et accueilli par l’Institut Lumière du mercredi 27 au (...)
Mardi 26 avril 2022 Faut-il une raison pour aller au musée contempler les toiles des Impressionnistes ? Évidemment non. Il en va de même pour les chefs-d’œuvre du cinéma (...)
Mardi 26 avril 2022 Les organisateurs d’On vous ment ont de le sens de l’humour (ou de l’à propos) puisqu’ils ont calé la septième édition de leur festival pile entre la présidentielle et les législatives. Une manière de nous rappeler qu’il ne faut pas tout...
Mardi 26 avril 2022 Mercredi, jour de sorties en salles : voici notre sélection des films à voir à Lyon cette semaine.