Le tourbillon de la vie

La journée de deux enfants confrontés à la vie, la vraie : "Ma mère qui chantait sur un phare" est un agréable spectacle de François Rancillac, porté par deux comédiens épatants. Aurélien Martinez

Le théâtre a plusieurs buts. Il peut questionner, alerter, dénoncer... Il peut aussi amuser, enchanter, voire divertir (un gros mot pour certains puristes). Le metteur en scène François Rancillac et l’auteur Gilles Granouillet ont, eux, pris le parti de se contenter de faire du théâtre, avec des outils tout simples : un texte, quelques éléments scéniques, et une poignée d’acteurs. Un alliage léger qui suffit à embarquer le public dans une aventure familiale drôle, touchante et amère à la fois, racontée du point de vue de deux gamins contraints de rentrer de plein fouet dans le monde des adultes. Car leur mère, quittée par leur père, n’a plus la force de continuer à vivre, préférant s’abandonner à son chagrin, là-haut, sur le phare. Finis alors les jeux avec les grenouilles et les tentatives pour noyer les chiots, il faut aller la secourir. Mais que peuvent bien faire deux petits êtres face au tourbillon de la vie que personne, pas même les grands autour d’eux, ne semble pouvoir contrôler ?

Mon frère

L’écriture de Gilles Granouillet, simple et imagée, ne s’interdit rien, allant aussi bien du côté du dépouillement que de l’emphase. Les deux prénoms des enfants – Marzeille et Perpignan – sont à eux seuls emplis de poésie, et en même temps marqués du sceau du réalisme. Les mots sont ainsi l’essence même de ce spectacle, et François Rancillac a l’intelligence de ne pas les surligner, de ne pas les maltraiter, préférant les laisser s’exprimer dans une scénographie évocatrice qui autorise toutes les projections mentales. Le metteur en scène fait pleinement confiance au texte, et surtout à ses deux acteurs principaux pour incarner le récit.

Deux interprètes beaucoup plus vieux que les personnages, mais qui réussissent à théâtraliser l’enfance sans la singer. Antony Breurec (Perpignan, le plus jeune) compose une partition savoureuse, quand Riad Gahmi (Marzeille, l’aîné) contrebalance les excès désopilants de son partenaire, à la façon de deux clowns se renforçant l’un l’autre. Un numéro de duettiste qui porte habilement un spectacle tout aussi drôle que poignant et divertissant qu’intelligent. Du beau théâtre en somme, simple et sans prétention.

Ma mère qui chantait sur un phare, du 3 au 5 avril à 20h à La Comédie

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