De Maryam Touzani (Mar.-Fr.-Bel., 1h33) avec Lubna Azabal, Nisrin Erradi, Douae Belkhaouda...
Samia erre dans la Médina, en quête d'un travail. Mais sa situation de jeune femme enceinte seule lui ferme toute les portes. Jusqu'à ce qu'elle arrive chez Abla, veuve revêche qui l'héberge à contrecœur sur l'insistance de sa fille de 8 ans. Les talents de pâtissière de Samia feront le reste...
Le chemin du cœur passe par l'estomac, dit la sagesse populaire, qui n'a certes jamais dû ouvrir un manuel d'anatomie. Tout aussi absurde semble l'assertion selon laquelle la gourmandise serait transmissible par le regard... Et pourtant ! Combien nombreux sont les films qui, exaltant les plaisirs du palais, suscitent d'irrépressibles réflexes de salivation pavloviens chez leurs spectateurs ! Adam appartient à cette succulente catégorie d'œuvres où l'art culinaire sert de méta-langage entre les individus, de truchement social et sentimental ainsi que de vecteur nostalgique. Comme dans Le Festin de Babette, La Saveur des ramen ou Les Délices de Tokyo, le miracle qui se produit en bouche redonne vie à des cœurs secs ; la sensualité de la dégustation et la complicité de la préparation des mets (ici, des rziza, entre autres gourmandises) sortent Abla de son deuil, et permettent à la Samia d'être acceptée avant qu'elle-même puisse s'accepter.
À la manœuvre de ce film d'intérieurs, on n'est guère étonné de retrouver Maryam Touzani, scénariste (et interprète) de Razzia, qui poursuit ici un travail au long cours sur la condition féminine au Maroc. Il s'agit moins ici des manifestations directes du patriarcat que de “l'imprégnation“ des femmes se considérant comme finies ou indigne dès lors qu'elles sont veuves ou “séduites et abandonnées“. La déconstruction des conditionnements est autant une affaire d'hommes que de femmes.