Portrait / C'est le collectif stéphanois qui monte, qui monte, qui monte... Savant cocktail de jazz et de musiques électroniques tous azimuts, le bien nommé Gin Tonic Orchestra vient de créer son propre label, Floors Records. Nous avons rencontré cette team de jeunes musiciens dans les studios du Fil, quelques jours avant la sortie de l'album Shyance.
C'est l'histoire d'une bande de potes, réunis par l'amour du son pour jouer, mixer et refaire le monde de la musique. Le producteur et musicien Victor Dijoud (alias Kaffe Crème) fait tout d'abord appel au batteur Léo Puccio. « Au départ il s'agissait simplement de poser une batterie acoustique sur des productions électro, mais après un premier concert au F2 avec le vibraphoniste Félix Joubert et le pianiste Josselin Marnat, de nouvelles envies ont germé. »
Quelques copains sont alors naturellement appelés en renfort. Rappliquent ainsi Théo Giroudon (claviers et machines), Clément Ceni (guitare) et Léo Aoun (basse). Quelques autres musiciens gravitent autour du quintet : Tom Jallet (guitare), Antoine Martin (saxophone) ou encore Pierre Mendola (flûte traversière). « On se connait tous assez bien depuis pas mal de temps, certains sont même colocataires ! »
Depuis la création du groupe en 2019, tout est allé très vite, le bouche à oreille faisant pleinement son œuvre, la sauce a pris quasiment aussitôt : le GTO fait sensation partout où sa musique est diffusée. Les Stéphanois feront notamment une performance très remarquée en 2021 lors du festival Nuits Sonores, une référence. Il faut dire qu'avec de solides bagages (cursus au Conservatoire Massenet ou fac de musicologie à l'Université Jean-Monnet), les cinq zicos sont de la même trempe : parmi les musiciens les plus prometteurs de la scène stéphanoise, aussi inventifs en studio que sur scène. En une traînée de poudre, les concerts en France et au-delà vont alors se succéder.
« Même si on bosse clairement pour ça, on est quand même agréablement surpris et donc hyper satisfaits de la tournure que tout cela a pris en peu de temps. »
Inclassable
Collision de nombreux courants, jazz, house, broken beat, rock indie jusqu'aux musiques latines, le style du Gin Tonic Orchestra est pluriel, inclassable. C'est justement là qu'entre en jeu toute la liberté créatrice des jeunes formations actuelles, boostées par des musiciens curieux de tout et dont la culture ne connaît ni freins ni frontières. Le son du collectif se réinvente instinctivement au fil des répétitions et des prestations. « Notre objectif principal reste de faire danser les gens en remettant le live et l'acoustique au centre des dancefloors. »
Les cinq garçons opèrent un gros travail autour des textures sonores, des rythmiques et de la structure même de chaque composition. En concert, la recette fait mouche. Le public remue, puis secoue la tête à s'en dessouder les cervicales, danse, transpire et finalement décolle. « C'est vraiment en live que ça se passe, de toute façon, c'est clair, on fait de la musique pour ça, pour partager un bon moment et oublier tout le reste... »
« Notre objectif principal est de faire danser les gens en remettant le live et l'acoustique au centre des dancefloors. »
Parcourant frénétiquement la scène, Victor passe des claviers au micro, à la fois maître de cérémonie et ambianceur décomplexé. Avec Théo, il alterne nappes et combinaisons mélodiques, insufflant aux titres des couleurs tour à tour vintages ou futuristes. Léo déploie pied au plancher des tourneries faites de boucles et de ruptures rythmiques diaboliques. Immense et droit comme un i majuscule, Clément jongle entre plusieurs lutheries, s'interposant dans le flux continue et accouchant de solos stratosphériques. Enfin, la basse tellurique de l'autre Léo s'impose en colonne vertébrale, telle une imparable locomotive qui ouvre la route et maintient le cap, tentant de garder le contact avec le sol au milieu du big bang collectif.
Vinyle
La multiplication des concerts (en clubs ou en festivals) comme les nombreux passages en radios (de Radio Nova à la BBC) attestent de l'intérêt que manifestent les programmateurs pour le Gin Tonic Orchestra, en passe de devenir une référence dans le milieu des musiques actuelles. Sorti sur le label italien indépendant Mother Tongue, l'EP Stefania annonçait clairement la couleur dès 2019. La sortie de Shyance, premier vrai album du groupe, était fêtée le mois dernier lors d'une très festive release party au Fil. Après un warm up assuré par Dj NoWay, le collectif livrait deux heures de live à couper le souffle devant un public chaud-bouillant. « C'est presque plus flippant de jouer à la maison, on sait que nos familles et nos amis sont dans la salle... »
Le club de la SMAC stéphanoise avait également attiré un grand nombre de musiciens de la région, tels des papillons de nuit captivés par les lumières et les décibels. « Pour prolonger la soirée en beauté, nous avons invité Saint-James et Clémentine, nos anges parisiens du label Chuwanaga, on leur doit beaucoup. » Au stand merchandising, entre deux piles de tee-shirts, cassettes et vinyles soulignent l'absence du support CD. Alignant sept titres hallucinants d'énergie (enregistrés à Sainté à l'Ohmnibus Studio), le 33 tours marquera sans doute d'une pierre blanche l'histoire de ce groupe qui n'a pas fini de faire parler de lui.
Future jazz
Au printemps dernier, le Gin Tonic Orchestra créait son propre label, Floors Records, véritable laboratoire de création qui accompagnera et regroupera sous un même toit tous les projets nés dans le giron du collectif. Pour la seconde année en collaboration avec l'équipe du Solar, le GTO invite également chaque mois un groupe issu de la nouvelle scène jazz française ou étrangère, à se produire dans l'écrin du jazz club stéphanois. Le public ligérien doit ainsi à cette belle initiative la découverte de brillants musiciens comme Marc Bianco, de formations comme Eiwa, Fungi et Zeitgeist Freedom Energy Exchange, sans oublier l'excellent combo de musiciens-danseurs Oswèla.
« C'est important pour nous de faire jouer à Sainté des formations que l'on a croisées sur notre route et dont on apprécie la musique. » A noter que le collectif figure parmi les sept jeunes formations sélectionnées en 2022 par le festival Jazz à Vienne pour figurer sur le double album Past & Future, dans la seconde catégorie bien entendu : une belle reconnaissance ! Le Gin Tonic Orchestra donnera une seconde release party, cette fois-ci parisienne, le 24 mars sur la scène du New Morning.
Principaux faits d'armes sur scène
New Morning, La Petite Halle (Paris)
Roots Corte Radisi (Vérone)
Isulia (Bordeaux)
La Bobine (Grenoble)
Nuits Sonores, Le Sucre, Le Paradox (Lyon)
Foreztival (Trelins)
Cité du Design, Disorder Club, Guinguette Stéphanoise... (Saint-Étienne)
« Notre objectif principal est de faire danser les gens en remettant le live et l'acoustique au centre des dancefloors. »