Écouteurs / Il se dit que les podcasts s’écoutent partout, facilement, et sont particulièrement adaptés à nos rythmes de vie effrénés, au temps passé dans les transports en commun. Mais quand vient l’été, l’herbe et le farniente, ils s’écoutent aussi bien. Voici 12 compagnons que l’on recommande à vos oreilles.
Produit par Binge Audio et diffusé par Spotify, le podcast On est chez nous est incarné par la comédienne et journaliste Sophie-Marie Larrouy. Personnalité fascinante, elle maîtrise l’art de la conversation, la curiosité bien placée et sait faire un feu d’artifice d’une discussion informelle. Ce podcast ne serait rien sans son énergie et sa faim de rencontrer les autres, avec un intérêt presque anthropologique. Si SML ne va pas jusqu’à pousser la chambre à coucher des Français, elle aime les « trifouiller sous le capot », comme elle dit. Pour ça, elle arpente la France depuis la rentrée 2020 à la rencontre d’anonymes plus ou moins taiseux, dont a priori il n’y a rien à montrer ni entendre. On aime cette galerie de portraits tourbillonnante de Monsieur et Madame tout le monde, ce mélange de gouache, de vies, de détails, de pauvres, d’intellos, d’enfants cassés et d’adultes résilients. Coups de cœur pour les épisodes "La colline et le pastre/Bouches-du-Rhône" et "Choupinette/Région parisienne".
Le podcast Les couilles sur la table, c’est quelques pointes à 500 000 écoutes par mois depuis sa publication à l’automne 2017. Une réussite emblématique du studio indépendant Binge Audio, enviée par toute la profession. Ce contenu, plébiscité par les féministes (mais pas que), est mené par Victoire Tuaillon, créatrice et animatrice du podcast. Il a également été adapté à l’écrit par Binge audio éditions en 2019. Son objectif ? Parler des masculinités contemporaines d’un point de vue féministe, un jeudi sur deux, en compagnie d’un invité de marque (chercheurs, philosophes, artistes ou activistes). Les « couilles sur la table », métaphore par excellence de la virilité, tordent le cou à une longue liste de préjugés. De quoi lancer de bonnes discussions autour du barbecue !
C’est l’histoire d’une scène de sexe ordinaire, supposée conclure en beauté un rancard. Sauf que tout ne se passe pas comme prévu. « Je te le laisse », lâche mystérieusement l’amant, avant de prendre la fuite au milieu de la nuit, et de la laisser sur le carreau. Dans cette enquête façon Sherlock féministe 2.0, Ovidie, la narratrice, reconstitue ce qu’elle appelle la « scène du crime ». Se faire tej’ par texto, au lendemain d’une nuit qui laisse l’amère impression d’avoir été utilisée comme un Kleenex® à usage unique, une mésaventure tristement banale. Comme souvent en zone féministe, le cadre de l’anecdote personnelle sert de point de départ, vite dépassé par des réflexions impliquant la société dans son ensemble.
« Sérieux ? Tes grands-parents aussi, ils étaient d’Algérie ? » Avec Sauce algérienne, le politiste Paul-Max Morin discute avec 5 interlocuteurs de leurs histoires de famille, étroitement mêlées à celle de la guerre d’Algérie. Immigrés, pieds-noirs, anciens soldats, harkis ou juifs d’Algérie : 39% des jeunes Français ont un lien familial avec le pays du couchant. Docteur en sciences politiques et auteur du livre Les Jeunes et la guerre d’Algérie, Paul-Max Morin considère que 60 ans après la fin de ce conflit, la France ne parvient toujours pas à regarder son passé en face. D’où l’intérêt d’interroger ceux qui n’ont pas vécu cette guerre, mais disent avoir hérité de « ses silences ».
Avec Défense de filmer, podcast coproduit par Brut et Spotify, les palpitations commencent au premier coup d’œil jeté aux titres des épisodes. La découverte du slogan « le micro va là où les caméras ne vont pas » les intensifient. Addictif, ce contenu ne ménage pas l’insatiable curiosité mal placée de l’auditeur. Nul besoin de se draper d’une bonne conscience, en faisant semblant de se documenter sur les narcotiques, les free parties en Guyane, les thanatopracteurs, les prêtres homosexuels, les escorts, les tribunaux ou les esclaves modernes. Récits et parcours extrêmes, milieux méconnus et fantasmés, voilà ce qu’on vient chercher et voilà ce qu’on trouve dans ce podcast.
Parti de Copenhague le 1er juillet, le Tour de France 2022 s’est fait devancer de peu par la sortie d’une 10e saison des Mécaniques du journalisme, podcast de renom de France Culture. En 4 épisodes, le journaliste Damien Ressiot revient sur l’une des affaires les plus retentissantes de l’histoire du sport de haut niveau : la chute de Lance Armstrong. C'est ce journaliste du quotidien L'Équipe qui s’était attaqué à "l'extraterrestre", avec ses sept victoires d’affilée dans le Tour de France de 1999 à 2005, en fournissant les preuves de sa tricherie au dopage EPO. Après l'affaire Cahuzac, la guerre chimique en Syrie, ou l’affaire Xavier Dupont de Ligonnès, ce podcast réflexif continue d’accroître la visibilité et la crédibilité des méthodes journalistiques.
Les faits divers passionnent les foules et mis bout à bout, ils en disent long sur notre société. Philippe Pujol, resté 11 ans au service du quotidien La Marseillaise, est l’un des plus reconnus par la profession. Moins racoleurs que Hondelatte raconte sur Europe 1, les épisodes de Désordres ordinaires reviennent sur la carrière singulière du fait-diversier devenu chasseur de scoop à Marseille. Crush inévitable pour cette narration signée de la voix d’un auteur, également récompensé du prix Albert Londres 2014 pour sa série d’articles Quartiers shit.
Né en 2012 dans la chambre de Jean Morel, Grünt désigne à l’origine la chaîne Youtube sur laquelle paraissent des freestyles de rap débridés. Devenu un podcast incontournable pour la planète rap francophone, Grünt a longtemps été hébergé par Radio Nova. Depuis l’an dernier, le collectif parisien dispose de ses propres locaux et d’une webradio pour explorer les différentes facettes du rap français. Ceci dit, la nouvelle indépendance du média s’accompagne d’un élargissement de sa palette musicale (soul, funk, etc.), de formats inédits (entretiens et documentaires) et d’un positionnement politique plus affirmé qu’auparavant, notamment dans son podcast Révolutions. Qu’il s’agisse de l’ancienne ou de la nouvelle formule, on fait une confiance presque aveugle à ces observateurs aussi scrupuleux que passionnés !
On a tout de suite accroché aux Casseroles, titre du podcast de Zazie Tavitian, journaliste pour L’Obs et chroniqueuse culinaire dans l’émission On va déguster de France Inter. Dans ce podcast, publié un jeudi sur deux, la jeune femme cuisine chez des membres de sa famille, des amis ou des inconnus. Paradoxalement, il n’est pas rare d’écouter un épisode entier dédié à un mets, dont la recette passera finalement à la trappe. Dans les Casseroles de Zazie déferlent des histoires tissées entre des plats et des hommes, des anecdotes ou des secrets en provenance des cuisines. C’est pourquoi l’auditeur repart bredouille après l’épisode touchant consacré aux blinis de Mamie Catherine. Exécutée au pifomètre, la recette n’a que peu d’importance comparée aux jaillissements d’une grand-mère russophile !
Émilie Wadelle, trentenaire originaire de la Tarentaise et Grenobloise d’adoption, voue une passion au milieu montagnard autant qu’à la création sonore. Lorsqu’elle réunit les deux, cela donne le podcast Le camp de base. Cette création indépendante par son studio Skadi & Co achève sa saison 1 riche en invités de marque : avec entre autres les témoignages de Jérémy Prevost et Charlène Plaisance, tous deux freeriders professionnels, Tiphaine Duperier, guide de haute montagne, ou encore Emmanuel Salim, docteur sur le tourisme en montagne.
Extraterrien, podcast de Barthélémy Fendt, est une série de discussions au long cours avec des athlètes, sportifs de haut niveau hors du commun. De simples passionnés aux champions olympiques, en passant par des aventuriers ou pratiquants d’handisport, chaque épisode souhaite porter le message d’un sportif inspirant. Une fois traversées les désignations hyperboliques des invités et de leur palmarès, l’auditeur se laissera emporter dans l’univers du crossfit, par exemple, dont il ignorait presque tout avant d’appuyer sur play. Les invités y racontent l’origine de leur passion pour le sport, leur vision d’une discipline, leur rapport à la compétition, leur mode de vie unique. Pas inintéressant pour donner du tonus aux vacances !
Malgré une législation des plus répressives en Europe, la France reste le premier pays européen en termes de consommation de cannabis. Bien entendu, il est dangereux pour la santé et illégal dans notre pays. Tous les 15 jours, dans Banana Kush, podcast de Nique - la Radio, le cannabis est abordé moins comme une substance illicite que comme un véritable objet culturel, un phénomène ayant son actualité, son business, son langage et sa politique. De prime abord, on s’attend à une table ronde enfumée. En réalité, quelle surprise de voir se déployer un très large panel de personnalités issues du monde culturel et politique (Benoît Hamon, Frédéric Beigbeder, Monsieur Poulpe, Oxmo Puccino, etc). Parmi elles, notre coup de cœur va à la doyenne de Banana Kush : Liliane Rovère. L’actrice qui, à 87 ans lors de son passage, glissait un inoubliable : « Le pétard, ça dispose. »
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