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"Adoration" : Ardennes que pourra
Par Vincent Raymond
Publié Mardi 21 janvier 2020

Photo : ©The Bookmakers/The Jokers
« Mes jeunes années (…)/Courent dans les sentiers/Pleins d'oiseaux et de fleurs » chantait Charles Trenet. À ce tableau pastoral, Fabrice du Weltz ajoute sa touche d’intranquillité et de dérangement faisant d’une fuite enfantine une course éperdue contre (ou vers) l’âge adulte.
Adolescent d’une petite dizaine d’années, Paul vit dans l’enceinte d’un hôpital psychiatrique où sa mère travaille. Lorsque Gloria, jeune patiente de son âge est internée, Paul éprouve pour elle une fascination intense. Un acte irréversible va lier leurs destins et les entraîner dans une cavale folle…
à lire aussi : Fabrice du Welz : « Ma trilogie a trouvé une forme de cohérence »
Retour aux fondamentaux pour Fabrice Du Welz, que sa parenthèse — ou la tentation ? —hollywoodienne avait sinon dispersé, du moins un peu dérouté de sa ligne originelle. Ultime volet de sa “trilogie ardennaise”, Adoration n’en est certes pas le moins sauvage ni le moins exempt de mystères non élucidés, mais il semble convertir en lumière pure la vitalité débordante de ses protagonistes. Et même s’autoriser, suprême audace, une espérance dans une conclusion en forme d’épiphanie. Le cadre lui-même s’avère propice puisque la nature dans laquelle se dissolvent ses fugitifs déborde de vie, de bienfaits estivaux ou de rencontres favorables ; quand aux poursuivants, ils demeurent à l’état de silhouettes — rien à voir avec La Nuit du chasseur !
Ados adorés
En fait, Gloria et Paul transportent avec eux leur propre menace comme ils sont leur remède réciproque : l’une est plus mûre, “habitée“ par des histoires terrifiantes dont on ne sait si elles sont réelles ; l’autre, encore sur les rives de l’innocence enfantine, obéit à moins à la raison qu’à cette étrange pulsion lui commandant de suivre sa fascinante comparse. Et si la perspective d’un abri se présente, la fatalité s’incarne dans les crises de la jeune fille pour leur faire reprendre leur voyage sans retour : ils iront jusqu’à brûleur leur vaisseau, au sens littéral du terme.
Derrière son titre aux échos mystiques et son allure de conte (avec l’incontournable séquence de poursuite en forêt aux influences gothiques), Adoration file une métaphore de cet âge des possibles que constitue l’adolescence : un mélange de troubles, d’émois, de peurs et d’aspiration à un envol hors de l’aimante “réclusion“ parentale. Un âge où il faut s’attendre à faire de nouvelles rencontres, ogres ou nouveaux substituts… qu’il faudra aussi apprendre à trahir pour achever son émancipation. Vus respectivement dans Jusqu’à la garde et Happy End, Thomas Gioria et Fantine Harduin forment un trio parfait… avec la peur entre eux deux.
Adoration de Fabrice du Welz (Bel.-Fr., 1h38) avec Thomas Gioria, Fantine Harduin, Benoît Poelvoorde…
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