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CINEMA

«Un divorce, une rupture définitive…»

Entretien avec Éric Guirado, réalisateur de "Possessions" Propos recueillis par Christophe Chabert

CINEMA

«Un divorce, une rupture définitive…»

Entretien avec Éric Guirado, réalisateur de "Possessions" Propos recueillis par Christophe Chabert

«Un divorce, une rupture définitive…»

par Christophe Chabert

Mardi 6 mars 2012
7749
LECTURES

par Christophe Chabert

Mardi 6 mars 2012
7749
LECTURES

Révélé par Quand tu descendras du ciel, un premier film qui prolongeait le court-métrage qui lui avait valu un césar, Éric Guirado avait connu son premier succès public avec Le Fils de l’épicier, un film qui s’inspirait des nombreux reportages réalisés au cours de ses années France 3 Rhône-Alpes. Aujourd’hui, après de longs mois d’attente, sort Possessions, libre adaptation de l’affaire Flactif. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il se livre avec une franchise devenue rare sur son métier de réalisateur, l’état du cinéma français et de la société française.

On dit souvent qu’un cinéaste fait toujours un film contre le précédent, mais cela m’a paru rarement aussi flagrant qu’entre Possessions et Le Fils de l’épicier…
Éric Guirado :
C’est vrai, je ne sais pas si c’est conscient ou pas… J’aime beaucoup Le Fils de l’épicier, mais ce qui me dérangeait, c’est qu’au cours des cent projections où j’ai accompagné le film, les gens me disaient souvent : «C’est ça le cinéma qu’on veut». Ils ne disent pas ça en étant malveillant, il faut plutôt s’en interroger… Pourquoi y aurait-il un seul cinéma, celui où l’on montre que la France est un pays formidable, où les gens sont formidablement gentils. Tout en aimant mon film, j’étais quand même en réaction à un certain esprit qu’il engendrait. Cela dit, les projets ne se font pas forcément avec ce genre de logiques. Dans mon mac, c’est un grand foutoir où je mélange plein de projets dont beaucoup ne verront jamais le jour. Mais il y avait la volonté de m’intéresser à quelque chose de très sombre qui pointait déjà dans un court-métrage que j’ai fait.

Au bout de la tournée du Fils de l’épicier, je me suis dit que le prochain serait quelque chose de noir. C’est aussi un moyen d’être cohérent avec quelque chose que je défends, c’est-à-dire le cinéma de la diversité. Il y avait aussi des raisons instinctives à ce choix. J’ai beaucoup pensé au premier film de Terrence Malick, Badlands…

…qui partait aussi d’un fait-divers…
Ah bon ? Je ne savais pas ! Il y avait des Bonnie and Clyde comme ça aux Etats-Unis ? Du coup, sans me renier, je me suis dit que c’était bien de ne pas faire Le Fils de l’épicier 2.

Un autre aspect est en réaction au Fils de l’épicier : le retour à une mise en scène plus expérimentale, qu’on trouvait déjà dans le court Le Début de l’hiver…
Est-ce que c’est le contexte, est-ce que c’est l’équipe qui fait ça ? Pour Le Fils de l’épicier, j’avais choisi un chef opérateur très talentueux, mais avec qui je ne me suis pas entendu. Il avait fait de très belles choses avec Raphaël Nadjari, notamment, mais on ne s’est pas compris. Je ne veux pas rejeter la faute sur les autres, mais il y avait un contexte qui faisait que je pouvais plus ou moins assumer le résultat.

Sur Possessions, j’ai eu une production qui m’a fait une immense confiance, et j’ai repris Thierry Godefroy à la lumière. On est comme chien et chat car je suis assez dur avec lui, mais on a travaillé dans une réelle complicité car on a quinze ans de travail ensemble. J’ai pris quelqu’un d’autre au cadre et je me sentais bien dans mes bottes de réalisateur sur ce film. Les acteurs étaient avec moi alors que sur Le Fils de l’épicier, ils ne l’étaient pas forcément. Nicolas Cazalé est maintenant un ami, mais on ne l’était pas encore sur le tournage, il n’y avait pas cette confiance suffisante entre nous.

Donc Le Fils de l’épicier est un film qui s’est fait de façon assez étrange, c’est un film sympathique mais que je n’ai pas vraiment bien vécu au tournage. Là, Jérémie Rénier ne cessait de me montrer la confiance qu’il avait en moi et sa volonté que j’aille dans une direction personnelle. Pareil pour Julie, Lucien, pour les gens de la production. Quand je leur disais qu’on essayait de faire des sténopés, ils me disaient «Tiens, c’est quoi ?» et ils m’ont foutu une paix royale. Sur la note d’intention, j’avais écrit comment je voyais le film et c’est là-dessus qu’on est tombé d’accord. Je me suis retrouvé à faire des choses plus instinctives, plus sensuelles…

Les côtés expérimentaux sont venus très vite. À la fin de la semaine, j’ai regardé les rushs avec ma monteuse Isabelle et je lui ai dit : «C’est bien, mais on ne va pas passer huit semaines à faire des champs contrechamps…». C’est dur de tourner un film tous les trois ans, il faut se remettre dedans, savoir comment on découpe. Donc on a commencé à se détendre et tenté des choses plus personnelles. Comme on tournait à la montagne, on avait toujours par sécurité un deuxième corps de caméras et je me disais qu’il n’allait pas rester tout le tournage dans le camion. Du coup, on a expérimenté avec. Plus on recevait les rushs de ces trucs bizarres, plus ça nous excitait. Au-delà du côté ludique et petit chimiste de l’image, ça s’est inscrit dans la cohérence qu’on partageait avec Isabelle et Thierry. C’est forcément moi qui ai généré cela et je l’assume pleinement, mais j’étais en confiance.

Pour parler du fait-divers, le fait qu’il se soit produit à un endroit que tu connais constitue-t-il la part autobiographique que tu mets dans chacun de tes films ?
Mon village natal n’est pas un village de chalets. Le chalet, c’est le folklore que voulaient les touristes en venant à la montagne. Je suis curieux de beaucoup de choses et ça déclenche tout de suite un récit. Quand il y a eu cette affaire, il y avait une sidération par rapport aux éléments que je découvrais : le cliché du meurtrier qui revient sur les lieux du crime, qui donne une interview à la télé au pied du chalet. Ça me parlait immédiatement car les images, je les connaissais. J’ai passé mon enfance dans ce petit village de prairies, d’hivers très enneigés, de forêts. Mon développement sensoriel s’est fait par cet univers-là. Quand je lis les articles, le bûcher dans la forêt m’évoque des images, beaucoup de choses me parlent. Mais je n’ai pas eu envie tout de suite d’en faire un film, j’ai surtout été effaré par cette affaire.

Tu parles d’un type de personnes que l’on voit peu au cinéma : ces gens qui ont profité de l’or blanc, des parvenus ayant surfé sur cette mode-là…
Ce n’est pas la première fois que j’entends ça. Je l’avais déjà abordé dans un de mes reportages sur France 3, où dans des coins comme Miribel, les gens étaient super-pauvres, et comme les petits-enfants, parce qu’ils avaient des terres, sont devenus très riches. Lors d’une projection aux Arcs, on m’a dit que je parlais d’un problème assez tabou : ces familles devenues riches sans l’assumer, sous peine de se faire montrer du doigt. J’avais quelque chose d’assez proche chez moi : c’est une zone frontalière, et il y avait ceux qui bossaient en France et ceux qui bossaient en Suisse. Au collège, il y avait les enfants des ouvriers en France et ceux dont les parents étaient ouvriers au CERN, qui gagnaient quatre fois mieux leur vie pour le même travail. Quand on allait dans les boums, ça se voyait, et je trouvais ça injuste.

Ces deux couples ne sont pas si éloignés de ça, il y en a juste un qui était là au bon moment et au bon endroit. Comme s’il y avait une fatalité sociale et existentielle et que le malentendu ne pouvait que s’installer…
Comme si l’un des couples était dans des sables mouvants : plus il bouge, plus il s’embourbe. Je suis assez d’accord. C’est assez troublant de voir un bâtisseur, un entrepreneur, un homme qui construit et un homme qui cherche à s’installer. L’un fait des fondations, l’autre cherche encore les fondations de son couple. Ce parallèle était réel, il était là. C’était tellement fort par exemple le double sens de la cheminée : le foyer de la cheminée et le foyer du couple. On décrivait Xavier Flactif comme un bon vivant, quelqu’un dans le partage, la jouissance, alors que les autres n’étaient jamais dans la jouissance, ils n’étaient que dans l’envie d’être voisins et voyeurs de la vie des autres. Je trouve ça furieusement contemporain, tellement humain aussi.

C’est comme ça que ça se déroule dans la fiction du film : ils sont toujours en train de mesurer ce qui les sépare, dès qu’ils ont quelque chose, ils veulent déjà quelque chose de plus…
Ils ne regardent pas seulement les autres, mais ils sont obsédés par l’écart. Au départ, il n’y a qu’une fracture, et à l’arrivée, c’est un canyon qu’ils pensent ne jamais pouvoir passer. C’est tellement invivable, insupportable qu’ils ne peuvent que le détruire. C’est plus le manque qu’ils regardent.

Comment as-tu géré ce problème incontournable : qui est le bourreau, qui est la victime et comment ne pas les désigner trop vite pour privilégier la mécanique qui conduit à la tragédie ?
Je n’ai pas assez de recul sur le film pour savoir si je l’ai bien géré. Je l’apprécie, mais chaque fois que je le revois, je me dis que j’aurais pu enlever ça, changer ça… Il y a encore des choses que je pourrais parfaire…

Tu as déjà beaucoup enlevé ?
J’avais une très bonne monteuse, et ce n’est pas tellement une question de couper, mais d’être vigilant sur cette question que tu abordes. Qu’est-ce qui sert vraiment notre projet qui consiste à être attentif pour ne pas être manichéen, injuste ou diffamatoire, ou encore tomber dans le romantisme du héros, lui donner raison de détruire cette famille. J’espère qu’on a répondu à ça, en tout cas, on y a mis une immense attention. Il n’y a pas de fautifs, de responsabilités. Quand Gladys est maladroite en voulant donner ses vêtements, elle est dans une réelle bienveillance. Parfois, tu peux être humiliant sans t’en rendre compte, juste parce que tu ne sais pas qu’en face il y a un baril de poudre.

Le personnage de Lucien Jean-Baptiste, au départ, est un propriétaire parfait, attentif, sympa ; puis tu montres qu’il est un peu le chef du village qui vit sur des arrangements pas très clairs, il a beaucoup de choses mais c’est un peu du sable…
Un truc me plait dans ce genre de personnages, comme celui de Mathieu Amalric dans Tournée : ce sont des flambeurs, des bons vivants, qui essaient toujours de montrer le meilleur d’eux-mêmes alors qu’ils sont en souffrance, qu’ils sont fragiles. Quand j’ai découvert le personnage de Xavier Flactif, j’ai découvert cela : un bon vivant, qui payait des coups au bar, mais qui suscitait aussi de l’animosité car il était dans le bluff. Je vois ça aussi dans le monde du cinéma, et c’est peut-être en cela où le film est assez personnel. On croise des gens qui sont soit dans la complainte, soit dans la surenchère : je fais un fim génial, avec un producteur énorme, avec de grands acteurs…

Dans le film, il y a un événement qui déclenche la mécanique tragique : quand Julie Depardieu s’introduit dans l’ordinateur du couple. Comme si c’était la frontière : d’accord pour partager l’espace privé, mais pas l’espace de l’argent. Ce qui dit beaucoup de choses sur le fossé de la société aujourd’hui : on sait que les gens sont riches, mais il ne faut pas savoir comment ils le sont devenus.
C’est vrai. Je n’y avais même pas pensé. On sent à plein de moments qu’elle est dans l’éblouissement ; mais le jour où le conte de fées s’arrête, c’est quand les chiffres sont là. On est dans du concret, et c’est insupportable pour elle. L’ultime intimité du couple, c’est les comptes. Quand elle rentre dans les comptes, elle veut leur régler leur compte (rires).

Le dernier espace privé, c’est l’argent.
C’est peut-être en cela que c’est un film social (rires). C’est aussi le fantasme des pauvres, on voit ça souvent dans les titres de Une : les vrais salaires des patrons. On a presque autant envie d’acheter le magazine que si il y avait des photos de vacances d’une star !

L’absence de l’ordre est très frappante dans le film, il n’y a pas ce retour rassurant de la police pour remettre la morale à l’endroit. C’est ce qui fait la différence avec L’Appât de Tavernier, par exemple…
C’est ce que je voulais, mais c’est dangereux. J’ai serré les fesses là-dessus. J’ai envie de continuer à considérer que le public peut par lui-même savoir où est la morale. Autant j’aime les contes et la structure des contes, et Possessions est d’une certaine manière un conte, autant la morale du conte ne m’intéresse pas. La morale, j’ai envie de la laisser dans le camp du public. Pour moi, c’est très clair, mais je reconnais que je brouille les pistes de temps en temps. Hier à la projection, quelqu’un était dérangé par ça, il se demandait si je ne disais pas qu’il avait bien fait de les assassiner.


Mais on peut le voir comme ça ! Il y actuellement des gens qui sont irréconciliables socialement et devant la volonté de ne pas partager des uns et la précarité des autres, il faut bien une solution…
Irréconciliables, c’est vraiment ça. Je ressens ça, c’est un divorce, une rupture définitive. C’est marrant que le film Intouchables s’appelle comme ça : deux milieux qui ne peuvent pas s’atteindre.

La dernière image est une image de solitude absolue : il n’y a plus de couple, plus rien. L’individu désolé, désorienté, perdu, face à lui-même…
C’est l’anéantissement. À vouloir réduire au néant les autres, il s’est réduit lui-même à néant. C’est comme un terroriste qui saute avec sa bombe. Il a tout perdu, et même pas gagné la considération qu’il voulait de sa femme. C’est aussi un réveil, du moins un peu. Il n’est plus dans le fantasme mais dans la réalité de ce qu’il a fait.

Tu le plonges dans la lumière bleue d’une télévision, comme s’il était noyé dans un océan…
La fascination de la télévision a tout aspiré, tout vidé, comme un trou noir. Il a créé un immense vide. La lumière, ce n’est pas forcément réfléchi, ça s’est fait sur le moment. Je me suis vraiment demandé comment ça s’est passé pour eux, comment tu vis tes nuits avec ce poids-là.

Il y a chez lui la sensation d’avoir fait ce qu’il fallait faire, qui est très dérangeante pour le spectateur.
C’est ce qu’ils disaient dans le 7 à 8. J’ai regardé les rushs du reportage. Ils disaient : «Bon, ils ont disparu, ils sont partis dans les îles. Ou alors on les a tués, et si ce n’est pas le cas, quelqu’un l’aurait fait à leur place.» Genre, ils l’ont bien cherché.

Révélé par Quand tu descendras du ciel, un premier film qui prolongeait le court-métrage qui lui avait valu un césar, Éric Guirado avait connu son premier succès public avec Le Fils de l’épicier, un film qui s’inspirait des nombreux reportages réalisés au cours de ses années France 3 Rhône-Alpes. Aujourd’hui, après de longs mois d’attente, sort Possessions, libre adaptation de l’affaire Flactif. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il se livre avec une franchise devenue rare sur son métier de réalisateur, l’état du cinéma français et de la société française.

On dit souvent qu’un cinéaste fait toujours un film contre le précédent, mais cela m’a paru rarement aussi flagrant qu’entre Possessions et Le Fils de l’épicier…
Éric Guirado :
C’est vrai, je ne sais pas si c’est conscient ou pas… J’aime beaucoup Le Fils de l’épicier, mais ce qui me dérangeait, c’est qu’au cours des cent projections où j’ai accompagné le film, les gens me disaient souvent : «C’est ça le cinéma qu’on veut». Ils ne disent pas ça en étant malveillant, il faut plutôt s’en interroger… Pourquoi y aurait-il un seul cinéma, celui où l’on montre que la France est un pays formidable, où les gens sont formidablement gentils. Tout en aimant mon film, j’étais quand même en réaction à un certain esprit qu’il engendrait. Cela dit, les projets ne se font pas forcément avec ce genre de logiques. Dans mon mac, c’est un grand foutoir où je mélange plein de projets dont beaucoup ne verront jamais le jour. Mais il y avait la volonté de m’intéresser à quelque chose de très sombre qui pointait déjà dans un court-métrage que j’ai fait.

Au bout de la tournée du Fils de l’épicier, je me suis dit que le prochain serait quelque chose de noir. C’est aussi un moyen d’être cohérent avec quelque chose que je défends, c’est-à-dire le cinéma de la diversité. Il y avait aussi des raisons instinctives à ce choix. J’ai beaucoup pensé au premier film de Terrence Malick, Badlands…

…qui partait aussi d’un fait-divers…
Ah bon ? Je ne savais pas ! Il y avait des Bonnie and Clyde comme ça aux Etats-Unis ? Du coup, sans me renier, je me suis dit que c’était bien de ne pas faire Le Fils de l’épicier 2.

Un autre aspect est en réaction au Fils de l’épicier : le retour à une mise en scène plus expérimentale, qu’on trouvait déjà dans le court Le Début de l’hiver…
Est-ce que c’est le contexte, est-ce que c’est l’équipe qui fait ça ? Pour Le Fils de l’épicier, j’avais choisi un chef opérateur très talentueux, mais avec qui je ne me suis pas entendu. Il avait fait de très belles choses avec Raphaël Nadjari, notamment, mais on ne s’est pas compris. Je ne veux pas rejeter la faute sur les autres, mais il y avait un contexte qui faisait que je pouvais plus ou moins assumer le résultat.

Sur Possessions, j’ai eu une production qui m’a fait une immense confiance, et j’ai repris Thierry Godefroy à la lumière. On est comme chien et chat car je suis assez dur avec lui, mais on a travaillé dans une réelle complicité car on a quinze ans de travail ensemble. J’ai pris quelqu’un d’autre au cadre et je me sentais bien dans mes bottes de réalisateur sur ce film. Les acteurs étaient avec moi alors que sur Le Fils de l’épicier, ils ne l’étaient pas forcément. Nicolas Cazalé est maintenant un ami, mais on ne l’était pas encore sur le tournage, il n’y avait pas cette confiance suffisante entre nous.

Donc Le Fils de l’épicier est un film qui s’est fait de façon assez étrange, c’est un film sympathique mais que je n’ai pas vraiment bien vécu au tournage. Là, Jérémie Rénier ne cessait de me montrer la confiance qu’il avait en moi et sa volonté que j’aille dans une direction personnelle. Pareil pour Julie, Lucien, pour les gens de la production. Quand je leur disais qu’on essayait de faire des sténopés, ils me disaient «Tiens, c’est quoi ?» et ils m’ont foutu une paix royale. Sur la note d’intention, j’avais écrit comment je voyais le film et c’est là-dessus qu’on est tombé d’accord. Je me suis retrouvé à faire des choses plus instinctives, plus sensuelles…

Les côtés expérimentaux sont venus très vite. À la fin de la semaine, j’ai regardé les rushs avec ma monteuse Isabelle et je lui ai dit : «C’est bien, mais on ne va pas passer huit semaines à faire des champs contrechamps…». C’est dur de tourner un film tous les trois ans, il faut se remettre dedans, savoir comment on découpe. Donc on a commencé à se détendre et tenté des choses plus personnelles. Comme on tournait à la montagne, on avait toujours par sécurité un deuxième corps de caméras et je me disais qu’il n’allait pas rester tout le tournage dans le camion. Du coup, on a expérimenté avec. Plus on recevait les rushs de ces trucs bizarres, plus ça nous excitait. Au-delà du côté ludique et petit chimiste de l’image, ça s’est inscrit dans la cohérence qu’on partageait avec Isabelle et Thierry. C’est forcément moi qui ai généré cela et je l’assume pleinement, mais j’étais en confiance.

Pour parler du fait-divers, le fait qu’il se soit produit à un endroit que tu connais constitue-t-il la part autobiographique que tu mets dans chacun de tes films ?
Mon village natal n’est pas un village de chalets. Le chalet, c’est le folklore que voulaient les touristes en venant à la montagne. Je suis curieux de beaucoup de choses et ça déclenche tout de suite un récit. Quand il y a eu cette affaire, il y avait une sidération par rapport aux éléments que je découvrais : le cliché du meurtrier qui revient sur les lieux du crime, qui donne une interview à la télé au pied du chalet. Ça me parlait immédiatement car les images, je les connaissais. J’ai passé mon enfance dans ce petit village de prairies, d’hivers très enneigés, de forêts. Mon développement sensoriel s’est fait par cet univers-là. Quand je lis les articles, le bûcher dans la forêt m’évoque des images, beaucoup de choses me parlent. Mais je n’ai pas eu envie tout de suite d’en faire un film, j’ai surtout été effaré par cette affaire.

Tu parles d’un type de personnes que l’on voit peu au cinéma : ces gens qui ont profité de l’or blanc, des parvenus ayant surfé sur cette mode-là…
Ce n’est pas la première fois que j’entends ça. Je l’avais déjà abordé dans un de mes reportages sur France 3, où dans des coins comme Miribel, les gens étaient super-pauvres, et comme les petits-enfants, parce qu’ils avaient des terres, sont devenus très riches. Lors d’une projection aux Arcs, on m’a dit que je parlais d’un problème assez tabou : ces familles devenues riches sans l’assumer, sous peine de se faire montrer du doigt. J’avais quelque chose d’assez proche chez moi : c’est une zone frontalière, et il y avait ceux qui bossaient en France et ceux qui bossaient en Suisse. Au collège, il y avait les enfants des ouvriers en France et ceux dont les parents étaient ouvriers au CERN, qui gagnaient quatre fois mieux leur vie pour le même travail. Quand on allait dans les boums, ça se voyait, et je trouvais ça injuste.

Ces deux couples ne sont pas si éloignés de ça, il y en a juste un qui était là au bon moment et au bon endroit. Comme s’il y avait une fatalité sociale et existentielle et que le malentendu ne pouvait que s’installer…
Comme si l’un des couples était dans des sables mouvants : plus il bouge, plus il s’embourbe. Je suis assez d’accord. C’est assez troublant de voir un bâtisseur, un entrepreneur, un homme qui construit et un homme qui cherche à s’installer. L’un fait des fondations, l’autre cherche encore les fondations de son couple. Ce parallèle était réel, il était là. C’était tellement fort par exemple le double sens de la cheminée : le foyer de la cheminée et le foyer du couple. On décrivait Xavier Flactif comme un bon vivant, quelqu’un dans le partage, la jouissance, alors que les autres n’étaient jamais dans la jouissance, ils n’étaient que dans l’envie d’être voisins et voyeurs de la vie des autres. Je trouve ça furieusement contemporain, tellement humain aussi.

C’est comme ça que ça se déroule dans la fiction du film : ils sont toujours en train de mesurer ce qui les sépare, dès qu’ils ont quelque chose, ils veulent déjà quelque chose de plus…
Ils ne regardent pas seulement les autres, mais ils sont obsédés par l’écart. Au départ, il n’y a qu’une fracture, et à l’arrivée, c’est un canyon qu’ils pensent ne jamais pouvoir passer. C’est tellement invivable, insupportable qu’ils ne peuvent que le détruire. C’est plus le manque qu’ils regardent.

Comment as-tu géré ce problème incontournable : qui est le bourreau, qui est la victime et comment ne pas les désigner trop vite pour privilégier la mécanique qui conduit à la tragédie ?
Je n’ai pas assez de recul sur le film pour savoir si je l’ai bien géré. Je l’apprécie, mais chaque fois que je le revois, je me dis que j’aurais pu enlever ça, changer ça… Il y a encore des choses que je pourrais parfaire…

Tu as déjà beaucoup enlevé ?
J’avais une très bonne monteuse, et ce n’est pas tellement une question de couper, mais d’être vigilant sur cette question que tu abordes. Qu’est-ce qui sert vraiment notre projet qui consiste à être attentif pour ne pas être manichéen, injuste ou diffamatoire, ou encore tomber dans le romantisme du héros, lui donner raison de détruire cette famille. J’espère qu’on a répondu à ça, en tout cas, on y a mis une immense attention. Il n’y a pas de fautifs, de responsabilités. Quand Gladys est maladroite en voulant donner ses vêtements, elle est dans une réelle bienveillance. Parfois, tu peux être humiliant sans t’en rendre compte, juste parce que tu ne sais pas qu’en face il y a un baril de poudre.

Le personnage de Lucien Jean-Baptiste, au départ, est un propriétaire parfait, attentif, sympa ; puis tu montres qu’il est un peu le chef du village qui vit sur des arrangements pas très clairs, il a beaucoup de choses mais c’est un peu du sable…
Un truc me plait dans ce genre de personnages, comme celui de Mathieu Amalric dans Tournée : ce sont des flambeurs, des bons vivants, qui essaient toujours de montrer le meilleur d’eux-mêmes alors qu’ils sont en souffrance, qu’ils sont fragiles. Quand j’ai découvert le personnage de Xavier Flactif, j’ai découvert cela : un bon vivant, qui payait des coups au bar, mais qui suscitait aussi de l’animosité car il était dans le bluff. Je vois ça aussi dans le monde du cinéma, et c’est peut-être en cela où le film est assez personnel. On croise des gens qui sont soit dans la complainte, soit dans la surenchère : je fais un fim génial, avec un producteur énorme, avec de grands acteurs…

Dans le film, il y a un événement qui déclenche la mécanique tragique : quand Julie Depardieu s’introduit dans l’ordinateur du couple. Comme si c’était la frontière : d’accord pour partager l’espace privé, mais pas l’espace de l’argent. Ce qui dit beaucoup de choses sur le fossé de la société aujourd’hui : on sait que les gens sont riches, mais il ne faut pas savoir comment ils le sont devenus.
C’est vrai. Je n’y avais même pas pensé. On sent à plein de moments qu’elle est dans l’éblouissement ; mais le jour où le conte de fées s’arrête, c’est quand les chiffres sont là. On est dans du concret, et c’est insupportable pour elle. L’ultime intimité du couple, c’est les comptes. Quand elle rentre dans les comptes, elle veut leur régler leur compte (rires).

Le dernier espace privé, c’est l’argent.
C’est peut-être en cela que c’est un film social (rires). C’est aussi le fantasme des pauvres, on voit ça souvent dans les titres de Une : les vrais salaires des patrons. On a presque autant envie d’acheter le magazine que si il y avait des photos de vacances d’une star !

L’absence de l’ordre est très frappante dans le film, il n’y a pas ce retour rassurant de la police pour remettre la morale à l’endroit. C’est ce qui fait la différence avec L’Appât de Tavernier, par exemple…
C’est ce que je voulais, mais c’est dangereux. J’ai serré les fesses là-dessus. J’ai envie de continuer à considérer que le public peut par lui-même savoir où est la morale. Autant j’aime les contes et la structure des contes, et Possessions est d’une certaine manière un conte, autant la morale du conte ne m’intéresse pas. La morale, j’ai envie de la laisser dans le camp du public. Pour moi, c’est très clair, mais je reconnais que je brouille les pistes de temps en temps. Hier à la projection, quelqu’un était dérangé par ça, il se demandait si je ne disais pas qu’il avait bien fait de les assassiner.


Mais on peut le voir comme ça ! Il y actuellement des gens qui sont irréconciliables socialement et devant la volonté de ne pas partager des uns et la précarité des autres, il faut bien une solution…
Irréconciliables, c’est vraiment ça. Je ressens ça, c’est un divorce, une rupture définitive. C’est marrant que le film Intouchables s’appelle comme ça : deux milieux qui ne peuvent pas s’atteindre.

La dernière image est une image de solitude absolue : il n’y a plus de couple, plus rien. L’individu désolé, désorienté, perdu, face à lui-même…
C’est l’anéantissement. À vouloir réduire au néant les autres, il s’est réduit lui-même à néant. C’est comme un terroriste qui saute avec sa bombe. Il a tout perdu, et même pas gagné la considération qu’il voulait de sa femme. C’est aussi un réveil, du moins un peu. Il n’est plus dans le fantasme mais dans la réalité de ce qu’il a fait.

Tu le plonges dans la lumière bleue d’une télévision, comme s’il était noyé dans un océan…
La fascination de la télévision a tout aspiré, tout vidé, comme un trou noir. Il a créé un immense vide. La lumière, ce n’est pas forcément réfléchi, ça s’est fait sur le moment. Je me suis vraiment demandé comment ça s’est passé pour eux, comment tu vis tes nuits avec ce poids-là.

Il y a chez lui la sensation d’avoir fait ce qu’il fallait faire, qui est très dérangeante pour le spectateur.
C’est ce qu’ils disaient dans le 7 à 8. J’ai regardé les rushs du reportage. Ils disaient : «Bon, ils ont disparu, ils sont partis dans les îles. Ou alors on les a tués, et si ce n’est pas le cas, quelqu’un l’aurait fait à leur place.» Genre, ils l’ont bien cherché.

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