Pop rock / Feu ! Chatterton s'est imposé en deux albums comme l'un des groupes de rock français parmi les plus lettrés et possédant une créativité sans bornes. Avec la tournée accompagnant L'Oiseleur, leur second opus, la formation démontre encore que le cocktail mêlant écriture poétique ciselée, énergique scénique débordante et style dandy assumé fait feu de tout bois. Rencontre avec Clément Doumic, musicien du groupe, avant son passage aux Oreilles en Pointe.
Il est commun de dire que le passage du second album peut s'avérer délicat. Comment avez-vous abordé l'écriture de L'Oiseleur ? N'aviez-vous pas trop de pression avant la sortie de ce disque ?
Clément Doumic : C'est vrai que l'on dit souvent cela et nous le savions même avant de faire notre premier album. Et ce n'est pas un mythe, quand on arrive au deuxième album, c'est délicat. On ressent une certaine pression de la part des médias ou du public. C'est-à-dire qu'on ne sait pas trop ce qu'ils attendent mais on sait ce qu'ils n'attendent pas... On n'imagine déjà toutes les critiques : la redite, la facilité voire la médiocrité, la flemmardise, le manque de travail... C'est pour cela qu'on a essayé de nous couper le plus possible du monde. Nous nous sommes déconnectés des réseaux sociaux et pris du temps afin de ne plus penser qu'à l'écriture et à la composition.
Nous avons essayé de recréer les conditions de création du premier album.
Vous êtes-vous isolés dans un lieu pendant une période donnée pour vous consacrer à ce travail d'écriture ?
Lorsque tu as la chance d'avoir un premier album qui fonctionne bien, tu peux ensuite t'appuyer sur davantage de moyens et des pros autour de toi. Il existe alors une facilité un peu plus grande et c'est juste cette dernière qui nous faisait peur. Nous avons donc essayé de recréer les conditions de création du premier album. Certaines chansons de ce disque avaient été composées dans des situations "très simples", c'était chez les uns les autres, en prenant simplement une guitare et un ordinateur, on écrivait, on chantait et on répétait. Du coup, nous nous sommes loué un petit appartement dans le 11e arrondissement de Paris et nous avions tous la clé. Chacun venait quand il le voulait et contribuait à l'émergence des différents titres. Arthur est parti également de son côté quelques semaines en Espagne et en Italie, à Naples, pour se retrouver seul avec sa littérature. Il est revenu avec les thèmes d'écriture de l'album. Nous avons ensuite finalisé le tout en studio avec notre réalisateur Samy Osta. Nous sommes tous très fiers de cet album. Nous avons réussi à nous départir de cette pression et à trouver une lenteur qui n'existe plus vraiment aujourd'hui et qui est une richesse.
Nous discutons à chaque concert de la setlist que nous allons jouer.
Cette lenteur vous caractérise et confirme votre position un peu à contre-courant. Vous avez par exemple assuré de nombreuses dates dans de grands festivals "de l'été" où les line-up sont remplis de grands noms de la scène rap actuelle. Est-ce facile de passer entre NTM, Vald ou Damso ?
Les années 2017 et 2018 ont été deux grosses périodes pour le rap. Nous le savions et nous sentions que le rap prenait de plus en plus de place dans les festivals. Nous écoutons d'ailleurs beaucoup de rap dans le groupe et nous nous en inspirons. Nous sommes ouverts au mélange des styles. En même temps, notre ADN est de faire de la musique assez progressive, destructurée, dotée d'un langage précis, on aime le bon mot au bon moment. C'est vrai que se retrouver au milieu d'une programmation très rap, c'est impressionnant. Quand tu dois assurer entre NTM et Vald, tu te poses des questions sur le genre de musique à jouer et sur le public qui est devant toi. Mais au final, c'était très fort comme sensation. Le public était capté et nous étions fiers de jouer sur des grandes scènes des chansons comme Souvenir ou À l'aube et qui résonnaient dans les oreilles de personnes qui n'étaient pas spécialement venues pour nous.
Le concert est une communion entre un groupe et le public. C'est une résonance et il faut que le public prenne autant de plaisir que nous sur scène.
Entre le live de votre premier album et les concerts de L'Oiseleur, quelles sont les principales différences à noter ?
Déjà, nous avons davantage de chansons en stock et ce n'est pas anodin. Nous discutons à chaque concert de la setlist que nous allons jouer. La plupart du temps, on change quelques éléments et cela constitue une grande différence par rapport à la première tournée. Avec le nombre de chansons que nous avons désormais, nous pouvons adapter le concert à l'endroit où nous jouons et à notre humeur. Les concerts sont donc plus réfléchis et par conséquence, plus intenses. Notre expérience a également grandi, avec davantage de technique. Donc nous pouvons nous concentrer beaucoup plus sur les chansons et leur essence. Enfin, nous continuons à vouloir partager un réel moment avec le public. Feu ! Chatterton n'est pas un chanteur avec des musiciens devant un public. Le concert est une communion entre un groupe et le public. C'est une résonance et il faut que le public prenne autant de plaisir que nous sur scène.
Feu ! Chatterton + Medhi Cayenne, vendredi 16 novembre à 20h30 au Firmament à Firminy pour la Soirée Des Grands Départs