Communion électro

Interview / Après avoir écumé tous les clubs de France et sillonné l’Europe avec son électro tech teintée de new wave, Miss Veronika aura la lourde tâche d’ouvrir les hostilités mixées à l’ADAEP. Retour sur le parcours de la demoiselle, avant de la retrouver sous d’autres cieux, et peut-être sous un autre nom… Propos recueillis par François Cau

Petit Bulletin : Vos premières expériences musicales étaient plutôt rock ?
Miss Veronika : J’ai monté un groupe uniquement constitué de filles au début des années 90 et naturellement je me suis tournée vers le rock, qui était mon influence majeure avec la new wave. Je composais les morceaux en autodidacte, avec les quelques accords que je connaissais sur ma guitare, j’écrivais aussi des textes, puis les autres filles – qui étaient plus expérimentées que moi – arrangeaient le reste. Ça a duré deux trois ans, et ensuite, comme tout groupe, on n’a pas toujours le même emploi du temps, les mêmes motivations. Comment s’est opéré le passage du rock à l’électro ?
C’était en 1995, je commençais à sortir dans mes première soirées électro, j’ai vu un set de Laurent Garnier qui m’a fait tilter, j’y retrouvais les sonorités new wave que j’appréciais beaucoup, les émotions que j’avais ressenti en écoutant des groupes comme Depeche Mode. Il y avait aussi la découverte d’une sphère musicale où tout ne dépend que de soi, où tu te gères seul, c’est ce dont j’avais besoin à l’époque.Il a fallu repartir de zéro, avec un nouvel instrument…
En 1995-1996, il n’y avait pas encore beaucoup de Dj dans ma région, j’ai donc appris toute seule. J’ai commencé par acheter une platine, puis une autre, une table de mix. Je me suis enfermée chez moi un ou deux ans, j’apprenais sans connaître les bases. Je n’osais pas demander de conseils aux artistes qui évoluaient autour de moi, je les regardais faire en soirée et j’essayais de reproduire leurs mouvements à la maison.Et en termes d’éducation musicale ?
C’était tout aussi compliqué, quand j’ai commencé à mixer vers cette époque, j’achetais toujours un peu au hasard – les disquaires étaient aussi Djs, ça m’intimidait, je prenais ce qu’on me mettait dans les mains. Mais je ne m’y retrouvais pas vraiment, c’était de la techno schranz, du gros son allemand en boucle. Le déclic s’est fait un jour en entrant chez un disquaire, il y avait un des premiers disques de Gigolo Records qui passait, de Miss Kittin et The Hacker, un son avec un côté très new wave, une voix féminine par dessus, je n’avais jamais entendu ça et j’ai trouvé ça énorme. Là, j’ai arrêté d’hésiter, je me suis précipitée et j’ai découvert par la suite le label Gigolo de Dj Hell, ce côté électro tech mélodieux avec du chant, et j’ai su que c’était mon son.Comment s’est passé le premier set en public ?
C’était une soirée avec énormément de monde, près de Metz, avec une vingtaine de Djs locaux ; je me retrouve sur une grosse scène en plein air, avec un gros stress, et c’est vrai que c’était assez laborieux, je me suis un peu planté. Bizarrement, j’ai eu beaucoup de retours, parce que finalement la sélection de disques que j’avais préparée pendant ces années faisait que j’avais vraiment mon style à moi, qui était assez unique dans la région, et qui m’a permis ainsi d’évoluer. J’ai été largement soutenu par les différents sites et forums électro du coin, et je me suis retrouvée à enchaîner des sets pendant deux ou trois ans dans tous les clubs et bars de la région. Par la suite, vous avez brisé votre vœu de solitude pour le projet Melody Maker…
Ça s’est fait avec Dacom@, un Dj de Metz qui a un peu le même parcours musical, les mêmes influences. On s’est rencontré, on a animé une émission sur l’électro ensemble, et un jour je lui ai dit que j’aimerais bien allier la musique électronique et le côté scénique qu’il y avait dans le rock, faire un duo avec du chant, et lui m’a répondu que c’était son rêve. Melody Maker est né comme ça : on a travaillé des morceaux chacun de notre côté, on se retrouvait pour bosser dessus ensemble, on a fait nos premières scènes et c’était très bien. Le problème avec ce genre de duo est que c’est très dur de trouver sa place dans la scène actuelle – pour une fin de concert rock, c’est assez délicat parce que le public n’est pas toujours prêt à écouter de l’électro, et dans une soirée techno, ça ne marche pas vraiment non plus. On s’est retrouvé par exemple à la Laiterie, à Strasbourg, à deux heures du matin pendant une soirée techno, ça n’a pas pris et on a vidé la scène. Les gens ont eu deux Djs avant qui ont tabassé, on arrive avec un son complètement différent et ça ne marche pas. À force, c’était un peu décevant. Au bout de toutes ces années, j’ai eu envie de composer. Je le faisais un peu au sein de Melody Maker, mais dans la tête des gens, quand tu as un garçon et une fille qui chante, c’est le garçon qui compose. J’ai ce besoin de reconnaissance en tant que productrice de musique électronique. C’est ce que je privilégie aujourd’hui, quitte à mettre le Djaying de côté pour le moment. Je veux me retrouver sur scène face à mes machines, de faire des lives seule, de chanter, de jouer.Ce sera le cas à l’ADAEP ?
Aymeric m’a demandé un Dj set, je pense que je vais faire une première partie sur mon ordinateur, avec un petit contrôleur et des effets, ce qui va me permettre de caser pas mal de morceaux inédits, avant de rebasculer en deuxième partie sur les platines, pour un Dj set classique.Il y a déjà un album en préparation ?
J’aimerais bien, j’y travaille sérieusement depuis quelques mois, j’ai mis de côté tout le reste pour m’y consacrer. Pour l’instant, j’ai sept ou huit morceaux de prêt, mais ce n’est pas suffisant. Il n’y aura pas que de la techno, il y aura des choses plus lentes, des clins d’œil à tout ce que j’ai pu faire jusqu’à maintenant. L’idée d’un redémarrage à zéro me plaît assez, par exemple trouver un label dans un pays où j’ai tout à refaire. J’ai besoin de repartir sur carrément autre chose, quitte à envisager une autre identité, un autre nom de scène.

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