« Des lieux où on a le droit de se tromper » : La BF15 a 30 ans

par JED
Publié Lundi 8 septembre 2025

Entretien / À l'occasion des 30 ans de la BF15, Perrine Lacroix, artiste et directrice du lieu, revient sur son histoire et les enjeux des lieux d'exposition intermédiaires, pour les artistes comme pour le public.

Photo : Perrine Lacroix DR

Le Petit Bulletin : Quelles ont été les grandes étapes de l'histoire de La BF15 depuis 30 ans ?

Perrine Lacroix : L'aventure de La BF15 a démarré en 1995, avec un groupe d'amis désireux de présenter des artistes en dehors des musées et des galeries. Depuis, c'est plus de 300 artistes qui nous ont ravies et ravis.

La BF15 a déménagé plusieurs fois avant de s'installer place des Terreaux en 1999, puis chassée par l'OL - pour une brasserie éphémère - s'est implantée fin 2006 au 11 quai de la Pêcherie face à la colline de Fourvière.

« Dans le contexte actuel, il est indispensable que nos structures d'utilité publique perdurent et se propagent »

Comment pourriez-vous définir la ligne artistique de la BF15 ? Quels sont vos critères de choix des artistes ?

PL : Il n'y a pas de ligne artistique à proprement parler. Je privilégie la singularité des univers avec un engagement plastique et poétique fort. Les artistes invité(e)s sont de tous horizons, sans préoccupation d'âge, de genre ni de notoriété. Il s'agit fréquemment de premières expositions. Ainsi toutes les générations d'artistes ont façonné l'espace de la BF15, de Marion Baruch (89 ans en 2018) ou Hessie (80 ans en 2016) à Dominique Ghesquière (56 ans en 2009) d'Edith Dekyndt (53 ans en 2013) à Anne le Trotter (30 ans en 2015) ou Tristan Chinal-Dargent (25 ans en 2024).

Chaque invitation est une opportunité de penser un projet spécifique, en adéquation avec le lieu et son environnement. Il s'agit essentiellement d'expositions personnelles pour privilégier un univers et mieux s'en imprégner, pour que le travail habite l'espace et qu'une adoption mutuelle opère, pour créer un contexte et favoriser une rencontre avec le public, qu'une immersion dans l'œuvre advienne.

Face aux baisses de subventions publiques, quel est l'avenir de la BF15 ?

PL : J'imagine que nous allons avoir de plus en plus recours aux mécénats privés. La recherche de mécénat est un vrai travail qui demande énormément d'énergie et qui nous détourne de notre propre mission. Sachant qu'en fin de course, ces soutiens privés bénéficient de réductions fiscales, c'est beaucoup d'énergie et de détours pour une même dépense.

Dans le contexte actuel, il est indispensable que nos structures d'utilité publique perdurent et se propagent. Depuis plus de trente ans, à Lyon, s'est tissé un réseau d'associations qui accompagnent le travail des artistes. Ce tissage permet aux artistes de trouver un terrain propice à la recherche sans préoccupation de valeur marchande. Ce sont des lieux où on a le droit de se tromper, le droit de tenter, d'expérimenter, le droit à la tolérance comme à l'irrévérence, des lieux qui défendent la liberté d'expression, en-dehors des normes et de l'institution. Chaque structure participe à sa manière pour que l'art demeure à la portée de tous et soit gratuit.

Rester de Béatrice Balcou et Husz, Haunt, Hôtes de Blankett (Rodrigue de Ferluc, Juliette George) et Julie Béna
Du vendredi 12 septembre au samedi 8 novembre 2025 à la BF15 (Lyon 1er) ; entrée gratuite

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