Two lovers: la résilience d'un faible

Publié Samedi 22 novembre 2008

Two lovers, c'est d'abord le drame existentiel d'un trentenaire névrosé, Leonard (Joachin Phoenix), partagé entre deux femmes que tout oppose : la blonde Michelle (Gwyneth Paltrow), post-adolescente inconsistante et folle amoureuse d'un avocat new-yorkais déjà marié, et la brune Sandra (Vinessa Shaw), femme à marier, gentille donc forcément naïve, qui s'accommode plutôt bien de cette rencontre arrangée. Un scénario un peu casse-gueule, une intrigue d'une banalité affligeante, mais James Gray (Little Odessa, La nuit nous appartient, The Yards) réussit à transformer ce canevas fastidieux en une réalisation juste et élégante.
Le poids des autres
Car la subtilité du film est de montrer que ce choix n'en est pas un. Qu'inexorablement, Leonard se soumet aux choix parentaux. Que le poids de sa structure familiale, mère écrasante d'amour en tête, et que son environnement social choisissent pour lui : Sandra est juive, ses parents vont racheter la blanchisserie familiale, elle est douce, patiente, et manifestement amoureuse. Alors quand Michelle le quitte, aux détours glauques d'une cour d'immeuble, pour retrouver un amant porteur de nouvelles promesses, la passion obsessionnelle s'évanouit et Leonard, entre détresse et réconfort (tout « bipolaire » qu'il est) retourne auprès son deuxième amour. La sage Sandra ne représente plus qu'une certaine forme de fatalité ; et la nouvelle liberté, exaltante et enivrante, du frêle Léonard n'aura été qu'une illusoire parenthèse. Two lovers, c'est l'histoire d'un échec.
Ou alors ?
Ou alors... Et si ? Et si j'avais tout faux ? Si ce film n'était pas l'histoire d'un échec, mais celle d'un sauvetage ? Si, en s'enfuyant avec l'avocat new-yorkais, Michelle sauvait Leonard d'une nouvelle pulsion auto-destructrice ? Et si, en retournant dans les bras ouverts et réconfortants de Sandra, Leonard recherchait enfin la stabilité et l'équilibre offerts par un amour qui n'aurait, lui, rien d'obsessionnel ? Et si ce film était d'abord l'histoire d'un instinct de survie, d'une résistance, d'une résilience ?
Je suis une éternelle optimiste. Alors disons que Léonard a fait fi de l'atavisme familial et que grâce à l'aide d'une voisine elle aussi déphasée, il a retrouvé une certaine « Mélodie du bonheur ». Mièvre à bien des égards, certes, mais certainement plus (re)constructif que tout ce qu'on lui avait proposé jusqu'alors.