God is an astronaut et Jo Quail : le vertige des astres

Publié Lundi 29 septembre 2025

Post-rock / Le 14 octobre, La Rayonne propose une soirée crépusculaire où la dramaturgie des cordes de Jo Quail augure la confrontation entre la mémoire intime et la démesure cosmique du groupe irlandais, God is an astronaut.

Photo : God is an astronaut ©Stuart Wood

Terrain particulièrement fécond pour le post-rock - genre insaisissable dont la plasticité autorise toutes les hybridations - notre région accueille l'attendu retour des frères Kinsella, trois ans après l'incandescente soirée au Ninkasi Kao. Leur onzième album, Embers, constitue une étape paradoxale : s'il s'impose par son ambition orchestrale, il échoue parfois à contenir le poids de ses propres élans. Dédié à la mémoire paternelle, le disque se déploie comme une cérémonie où la grandeur s'adosse à l'excès, et où la lumière projetée semble moins apaisée qu'embrasée, cherchant davantage le salut que la consolation.

Un édifice bâti dans le vertige

Sur scène, la setlist devrait proposer les sommets d'Embers, parmi lesquels l'inquiétude labyrinthique d'Oscillation, l'alternance d'ombre et d'éclat du morceau-titre - mais aussi des fragments plus anciens, devenus désormais emblématiques. Depuis deux décennies, le groupe sculpte un idiome immédiatement reconnaissable : une position stable mais insituable entre la méditation électronique héritée de Tangerine dream et la saturation gazeuse du shoegaze. Entre exaltation des intensités et dilatation des accalmies, leur langage provoque un mouvement perpétuel qui, paradoxalement, donne forme à l'immuable.

Une architecture de ruines et de cathédrales

La musique de God is an astronaut se perçoit moins comme une succession de morceaux que comme un chantier permanent. Chaque pièce est concrètement un édifice : d'abord des fondations discrètes, presque murmurées, sur lesquelles viennent s'agréger des couches rythmiques et des nappes harmoniques, avant l'effondrement soudain qui ouvre une brèche. Cette dramaturgie architecturale engendre une expérience totalisante, où la musique s'affranchit du risque de la consommation pour se transformer en sensation à accueillir. Notre corps devient ainsi une nef résonnante : le temps s'étire, et l'abandon s'installe comme une vibration qui envahit tout l'espace intérieur.

Jo Quail, passage liminaire

En ouverture, le set de la violoncelliste londonienne tient lieu de seuil initiatique. Forte de ses explorations récentes dans Notan, Jo Quail manipule les contrastes avec une rigueur quasi picturale : répétitions incantatoires, surgissements dissonants, superposition de textures qui se dissolvent dans le silence. Son usage des boucles et de l'amplification transcende l'instrument classique, métamorphosant le violoncelle en organisme polyphonique. Cette esthétique de l'ombre et du dévoilement prépare idéalement la suite : avant l'immensité cosmique de God is an astronaut, Quail propose une traversée plus souterraine, plus tellurique, mais d'une intensité comparable.

Il existe donc plusieurs modalités répondant à une même quête : éprouver la musique comme une architecture à habiter, une lumière à traverser, un vertige à partager.

God is an astronaut et Jo Quail
Mardi 14 octobre 2025 à 20h à la Rayonne (Villeurbanne) ; de 27, 55 à 29, 20€