Critique de La Putain respectueuse
Inspirée d'une histoire vraie, cette pièce de Jean-Paul Sartre dénonce avec force le racisme et la manipulation. À voir pour apprécier un bon moment de théâtre.
Écrite par Jean-Paul Sartre, la pièce de théâtre “la putain respectueuse” plonge le public dans une petite ville des États-Unis, en pleine période de ségrégation raciale.
Un Noir vient d’être assassiné par le neveu du sénateur. À tour de rôle, plusieurs notables de la ville (un policier, le sénateur, etc.) tentent de manipuler l’unique témoin de la scène, une prostituée, pour qu’elle protège le véritable assassin en accusant un autre Noir à sa place. Venu se réfugier chez elle, ce dernier refuse de prendre un revolver pour se défendre. Il s’enfuit, mais la machine infernale est déjà en route…
Une œuvre pluri-disciplinaire Servie par d’excellents comédiens, la nouvelle création de la Compagnie Leïla Soleil est une œuvre pluri-disciplinaire associant la mise en scène d’Hadda Djaber, les décors du plasticien Yves Henri et la musique, omniprésente, à travers des respirations de jazz au saxophone par Stéphane Lambert. Comme pour mieux plonger les spectateurs dans l’atmosphère moite et glauque de cette petite ville américaine où un nouveau drame se prépare.
Une pièce encore d’actualité "“La putain respectueuse” est une pièce encore peu connue, elle a été rarement montée sur scène”, explique Hadda Djaber, directrice de la compagnie Leïla Soleil. À l’époque en effet, Sartre a eu des ennuis pour avoir utilisé le mot “putain”… “Cette pièce date des années 1940, mais elle reste encore d’une terrible actualité. Elle montre surtout que les monstres ne sont pas toujours ceux que l’on croit”.
Dans un décor épuré, toutes les formes de manipulation explosent ainsi au grand jour : les menaces, le chantage, le charme, la promesse d’une vie enfin meilleure… “Cette prostituée est au plus bas de l’échelle sociale, mais elle reste intègre en refusant de mentir aux autorités”, souligne Karine Relevant, son interprète. La comédienne apprécie d’autant plus ce rôle qu’elle le joua il y a quelques années pour entrer au Conservatoire de Lyon ; un retour aux sources en quelque sorte. Le résultat est convaincant avec un jeu tout en finesse, alternant une sensualité troublante, la résignation, la révolte, etc. Le reste de la distribution est au diapason avec un Joël Toussaint touchant dans sa composition d’homme traqué par Tommy Luminet et Bruno Miara, implacables en salauds qui se croient au-dessus des lois.
Le spectacle est accompagné d’une exposition de la plasticienne Jacqueline Li Michaud dont les peintures ne laissent personne indifférent. Vous comprendrez pourquoi en les découvrant…
Prochain spectacle de la compagnie Leïla Soleil : la lecture publique “Du Bronx à Manhattan : New-York City”, dans le cadre du cycle “Textes à Dire”, au Polaris de Corbas, mercredi 30 janvier 2013, à 19h30. Entrée libre.
À Martin Luther King (le 21 janvier est le Martin Luther King's day aux États-Unis ; même la Bourse ne travaille ce jour-là ! Ironie de l'Histoire, c'est ce jour-là que Barack Obama a prêté à nouveau serment en tant que Président des États-Unis).
© Bruno Sleepless