Critique d'EFFRACTION

Publié Vendredi 29 mars 2013

Deux hommes qui ont pour profession d'extorquer des fonds dus par de mauvais payeurs débarquent chez un « client » qui est absent. En l'attendant ils découvrent qu'une jeune fille est séquestrée dans l'appartement. Que faire ?

Cela aurait pu être un sujet de cinéma…


Disons-le tout de suite on ne s’ennuie pas. Je dis ça parce qu’au théâtre ce n’est pas toujours le cas.

Il y a suffisamment d’action et de jeu pour qu’on ne regrette pas d’avoir payé sa place.

L’auteur (dont c’est le coup d’essai ?) a aussi fait la mise en scène, ce qui est très très cohérent, très très courageux et aussi très très risqué.

Je ne peux m’empêcher d’éprouver de l’admiration pour celui qui a fait profession de critique (excellent critique !) et qui soudain s’expose lui-même à la critique en proposant sa propre création artistique.

Je trouve ça vraiment chouette !

Je vais essayer d’être un peu « technique » dans mon commentaire.

Comédie ou tragédie ? Personnellement je dis comédie. Pourquoi ?

Parce que les protagonistes semblent maitres de leur destin et c’est d’ailleurs un peu le sujet de la pièce : l’éternel problème de l’éthique. Comment se comporter dans une situation hautement problématique?

Il y a bien des démiurges qui tirent les ficelles en dehors de la scène mais ce ne sont pas des dieux, seulement des hommes.

Un des deux « rançonneurs » est clairement le personnage principal et également le plus réussi.

Il a des états d’âmes, il a des rêves, il aime la musique et compose artistiquement avec le sexe opposé. C’est lui qui fort logiquement (et fort dramatiquement) clôturera la pièce.

L’autre est une brute aux ordres de son commanditaire. Il est le plus directement responsable de l’action telle qu’elle se déroule.

La jeune fille ? Et bien je trouve que l’auteur n’en a pas pris assez soin. Son personnage n’est pas suffisamment caractérisé pour donner le maximum de tension dramatique. Peut-être aurait-il fallu rajouter quelques dialogues pour que l’on en sache un peu plus sur elle ? Prendre le risque d’allonger un peu la pièce.

Le quatrième personnage qui est le mauvais payeur est joué par Jacques Chambon. Il est « bien joué » ce qui est agréable pour le spectateur mais ce qui a l’inconvénient de démontrer que les autres acteurs sont « un ton en dessous ».

C’est lui qui doit livrer la fille à l’un de ces démiurges qui opèrent hors de la scène et il exposera ses motivations dans un monologue qui a tout à voir avec le sujet (bien qu’assez inattendu) mais qui n’est sauvé que par la qualité du jeu de Jacques Chambon (car ce personnage lui aussi n’a pas su prendre suffisamment d’épaisseur pour nous toucher véritablement).

Après on peut discuter de la pertinence du sujet mais là c’est une autre histoire.

En résumé je ferai la pire des critiques que l’on puisse faire d'une œuvre d’art (mais que l’on peut presque toujours faire) et c’est de ne pas avoir donné suffisamment d’impact au sujet. Peut-être en partie à cause du personnage de la jeune fille qui n’est pas assez présent à mon goût (et qui incarne après tout le nœud dramatique principal).

Pas assez d’impact mais quand même largement assez pour provoquer l’intérêt et les rires et pour permettre de passer un bon moment de théâtre.

C’est une première pièce et espérons qu’il y en aura d’autres...