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Publié Mardi 22 octobre 2013

Édito du n°905 - mercredi 22 octobre 2013 - Petit Bulletin Grenoble

Cette semaine, on fait donc la une sur Gravité d'Alfonso Cuarón, le film qui affole la planète cinéphile... et le box-office américain - 170 millions de dollars de recettes en trois semaines (oui, on compte en dollars aux États-Unis, pas en nombre de spectateurs). Gravité donc, et non Gravity.

« Ce que je voudrais moi, c'est inviter les Français à faire la grève [...] Chaque fois qu'un film ne sera pas traduit dans le titre, on ne rentrera pas dans la salle de cinéma [...] Â» Ã€ qui doit-on cette sortie ? Éric Zemmour ? Alain Finkielkraut ? Un autre de leurs petits camarades ? Non, pas du tout. Il s'agit ni plus ni moins que du philosophe Michel Serres, dans une courte interview accordée à La Dépêche.

Si le raisonnement n'est pas dénué d'intérêt, la démarche est quelque peu étrange, ratant carrément sa cible. Car ce qui est plus regrettable qu'une simple uniformisation linguistique, c'est l'uniformisation culturelle qui en découle. Qu'un artiste s'exprime en anglais n'a rien de choquant ; il est simplement regrettable que tout le monde (ou presque) se foute de ceux qui s'expriment dans une autre langue (oui, on peut même chanter de la pop en arabe - le brillant album Arabology de Yas sorti en 2009). Et qu'un homme de la trempe de Michel Serres nous demande implicitement de boycotter le film du Mexicain Cuarón simplement parce que le titre n'est pas en français (ce qui vaut mieux parfois, quand on voit les traductions hasardeuses auxquelles on a eu droit - My darling Clementine de John Ford par exemple, devenu La poursuite infernale) nous laisse de marbre.