Coraline

D’Henry Selick (ÉU, 1h40) animation

Henry Selick porte comme une croix son rôle de coréalisateur de L’Étrange noël de Monsieur Jack. Le film a tellement été identifié à l’univers de Tim Burton que l’on a pu penser que Selick n’y avait été qu’un excellent directeur de l’animation. Ses travaux en solo n’ayant pas franchement convaincu (James et la pêche géante et Monkey Bone), la répartition des tâches semblait actée — à Burton le génie, à Selick le boulot.

La sortie de Coraline, au moment où la carrière de Burton tourne en rond dans l’autocitation, vient redistribuer les cartes. Car non seulement le film est excellent, mais il retrouve l’esprit et l’imagerie de L’Étrange noël de Monsieur Jack. Il y est aussi question de deux univers parallèles renversant les clichés habituels sur le merveilleux et la normalité ou, sur un registre plus social, l’échec et la réussite.

La petite Coraline Jones s’ennuie dans sa nouvelle vie : un père qui peine à vendre un brevet pour des outils de jardinage, une mère qui n’arrive pas à finir son roman, une maison grise sur une colline dans une ville pluvieuse. Par la grâce d’une porte secrète, elle bascule dans un monde qui est la réplique inversée de celui qu’elle cherche à fuir : tout s’y révèle joyeux, enchanteur et coloré. Seule différence : les humains, dont les parents de Coraline, ont des boutons cousus à la place des yeux.

La réussite du film (inspiré de l’œuvre de Neil Gaiman, brillant auteur de BD ayant déjà œuvré au cinéma sur le script de Beowulf) tient à sa capacité à faire vaciller la frontière entre ses deux mondes : l’environnement gothique de la partie "réelle" est moins inquiétant que la vie de famille proprette de la partie "rêvée". Comme dans Le Labyrinthe de Pan de Del Toro, l’échappée dans l’imaginaire n’est pas une consolation, mais la matérialisation fantastique des angoisses enfantines.

Dans ce récit d’apprentissage aux relents freudiens, Coraline découvrira que la mère aimante peut cacher une araignée aux instincts morbides, et que ce petit garçon triste et solitaire est un meilleur compagnon que son double aventureux au sourire factice. L’animation magnifique, qui multiplie les matières et les couches à l’intérieur des plans, contribue à la beauté de ce film ambitieux, à placer aux côtés des merveilles signées Pixar. Et confirme Selick comme un auteur à suivre de près...
CC

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