A voiles et à vapeurs

La Femme + Granville

Le Kao

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

De tous les groupes qui jumellent pop d'outre-Manche et grammaire d'ici, le quatuor normand Granville est le plus remarquable. Et son premier album, avec ses mélodies yéyé, son romantisme godardien et ses accords californiens, l'un des disques les plus attachants de l'année. Benjamin Mialot

Hier encore, l'île anglo-normande de Jersey était un paradis fiscal comme les autres. Soit un triste caillou occupé par de vieux satyres aux tours de taille de sinistre augure, que toute personne animée par un semblant d'humanisme souhaiterait voir converti en site d'essais nucléaires. Depuis la diffusion de Jersey, premier single de Granville, c'est un éden sentimental unique en son genre, un riant atoll peuplé de jeunes naïades aux lignes de hanche porte-bonheur, où tout être doué d'un minimum de romantisme rêverait de bâtir une résidence secondaire.

Un «Hawaï» fantasmé où «tout recommencer» à deux, dans la langue, candide et pleine de malice, de ce groupe normand qui après les Concrete Knives et avant Jesus Christ Fashion Barbe, affirme la suprématie de Caen en matière de french pop. Est-ce à dire qu'une mélodie peut changer le monde ? Aussi entêtante soit celle dont il est ici question, non. Mais elle peut, pour reprendre la formule de Daniel Pennac, changer le décor. Ce n'est déjà pas si mal.

C'est Caen le bonheur

D'autant que des mélodies de cet acabit, le quatuor en a plein les manches de ses marinières. Une douzaine figure au générique de Les Voiles, premier album tout entier conçu comme un road movie Nouvelle Vague : les oreilles tournées vers la Californie – comme chez Best Coast ou Wavves, entre autres néo-surfeurs préférant les tunnels d'électricité aux rouleaux d'eau salée, les accords de guitare semblent s'évaporer sous l'effet de la chaleur solaire - et la plume trempée dans l'encre acidulée des années yéyé.

Mélissa, chanteuse à la voix de joli cœur (de Pirate) que le reste du groupe a repéré lors d'une soirée open mic, n'aurait d'ailleurs sans doute pas laissé indifférent le Belmondo rimbaldien de Pierrot le fou. Elle lui aurait raconté ses balades d'été entre sable et rochers (Adolescent) et lui aurait montré un portrait saturé de son ex (Polaroid), avant de lui accorder une maladroite danse (La Robe rouge) et de finalement l'éconduire au moment du quart d'heure américain (Le Slow).

Et comme nous, sous le charme de son féminisme boudeur à la Lio et de sa grâce teenage façon France Gall, il en aurait redemandé.

Granville – Les Voiles (East West / Warner)

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