Arme de réflexion massive

Quand le théâtre s'empare de l'histoire contemporaine, il peut parfois faire des miracles. David Hare relate jusqu'à samedi 27 mars au TNP l'après 11 Septembre en donnant la parole à ses plus influants protagonistes. Indispensable. Nadja Pobel

Cette saison, nous n'avions pas tari d'éloges devant «Notre terreur», programmé au Théâtre Les Célestins en décembre. Cette pièce de Sylvain Creuzevault évoquait la période de la Terreur, en 1793, au cœur de la Révolution Française après l'exécution de Danton. Robespierre et le Comité de salut public devisaient sur les modes opératoires à adopter pour poursuivre le mouvement de contestation. Le dispositif scénique consistait en un espace de jeu quasiment dénudé : quelques tables et chaises éparses. Les spectateurs se faisaient face, enserrant les comédiens. Pour "Stuff happens", les metteurs en scène Bruno Freyssinet et William Nadylam ont opté pour une scénographie semblable, des écrans vidéos en plus, XXIe siècle oblige. "Notre Terreur" et "Stuff happens" ont aussi en commun d'être des textes qui mélangent les faits historiques connus aux coulisses de l'histoire. L'Histoire n'a jamais autant de portée que lorsque ses protagonistes sont envisagés non seulement comme des machines d'exécution mais aussi à travers leurs singularités.Distribution impeccable
Les personnages de "Stuff happens" se nomment Dick Cheney, Colin Powell, Condoliza Rize, Tony Blair, Donald Rumsfeld ou Dominique de Villepin. Ils parlent de la riposte à donner aux attentats du 11 Septembre 2001. Bush fils est dépeint comme un fou de Dieu imbécile, s'endormant aux réunions, ânonnant quelques borborygmes en réponse à des questions cruciales et riant franchement aux blagues douteuses de son vice-président. L'attitude nonchalante du comédien, sa démarche les pieds «en dedans» est saisissante. Tous ses partenaires sont à ce niveau de crédibilité sans jamais tomber dans la caricature. Ils évoluent comme des pions sur ce plateau vide, parfois ils le quittent, le fuient en silence lorsqu'ils s'embourbent dans des thèses foutraques. Le malaise de Powell, l'absence de position claire de Condy Rize, la grandiloquence de Villepin et la souricière dans laquelle s'est coincée Blair, tout est là. David Hare signe un condensé de ces deux années (2001 à 2003) qui ont vu les Américains mentir au monde pour justifier une guerre qu'ils pensaient légitime. Le théâtre remplit alors pleinement son rôle de médiateur, croyant encore à la force du message qu'il peut transmettre.

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