Profession : amuseur

Vincent Dedienne

Salle Victor Hugo

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Et si l’humour et le théâtre se réconciliaient ? C’est ce que propose le jeune comédien Vincent Dedienne avec son spectacle "S’il se passe quelque chose", un seul-en-scène alternant sketchs et textes plus personnels. Un véritable bijou, accessible, drôle et surtout excellemment bien écrit. Propos recueillis par Aurélien Martinez

Comment un comédien de formation classique, après avoir joué divers grands auteurs comme Hugo, Molière ou Duras, se retrouve à faire un spectacle d’humour ?
Vincent Dedienne : Parce que j’en rêve depuis que j’ai découvert le théâtre par ce biais. Muriel Robin, Pierre Palmade : ce sont eux qui m’ont donné envie de faire le métier de comédien. L’idée d’être seul en scène m’a toujours excité. Avant de connaître Shakespeare, Claudel ou je ne sais qui, je pensais que le théâtre, c’était ça : uniquement des gens qui écrivent leurs propres textes et qui les disent seuls en scène. J’y suis donc revenu quand j’ai eu un peu moins de travail, pour voir comment ça pouvait se réconcilier avec une formation classique [à l’école de la Comédie de Saint-Étienne, NdlR]

Avec l’idée d’être mieux armé grâce à cette formation  ?
Ce n’est pas tant d’être armé... Dans une école supérieure d’art dramatique, quand tu fais justement de l’art dramatique, il y a l’idée que c’est honteux d’avoir l’ambition d’être un amuseur. Être acteur et amuseur, c’est une paire qui ne va pas de soi. Alors que je trouve que c’est le même métier – celui que je voulais faire petit ! C’est donc plutôt : rien à faire, j’assume ce désir. Je pourrais l’enfouir et me dire que je ne suis pas un amuseur, que je ne rêve pas de l’être. Mais je préfère m’assumer et voir quel amuseur je peux être en utilisant la plus-value qui me vient de la formation reçue. D’où l’idée que S’il se passe quelque chose soit présenté comme un seul-en-scène, et non comme un one-man-show... Être un amuseur, ce n’est pas la même chose qu’être un comique. Je n’ambitionne pas de faire marrer les gens. J’ambitionne de faire un spectacle, c’est ça que j’aime ; pas les blagues... Après, avec le terme seul-en-scène, le glissement sémantique façon Télérama est un peu risible, certes.

Comment a été pensé le spectacle et sa répartition entre sketchs et textes plus personnels ?
Le tout début, c’est le sketch sur Marie-Antoinette. Un jour, j’ai entendu la comédienne Dominique Reymond, invitée à la radio par Guillaume Gallienne, lire la lettre de Marie-Antoinette adressée à sa sœur avant d’être guillotinée. Du coup, j’ai eu l’idée d’écrire la réaction de la sœur. En parallèle, j’avais commencé un monologue plus personnel. Je me suis alors rendu compte que ce sketch et ce monologue étaient deux aspects de moi à des âges différents : les sketchs, c’est le goût pour l’humour que j’ai depuis tout petit, et le monologue, c’est vraiment mon expérience de lecteur de romans issus du courant de l’autofiction, comme ceux d’Hervé Guibert.

Les sketchs du spectacle sont de véritables petites pièces, avec la création d’un personnage, d’une situation, d’une intrigue...On est donc loin d’une partie de la scène comique actuelle, issue de la culture stand-up, avec ses éternels thèmes : mon mec / ma meuf, mes amis, mon téléphone, l’alcool... C’est assumé ou inconscient ?
Je ne me suis jamais dit que j’allais faire un truc à contre-courant. Simplement, comme je n’ai pas beaucoup de goût pour ce qui se passe maintenant, j’étais content de voir que ce qui sortait naturellement de ma plume et de celle de Juliette [Chaigneau, sa co-auteur et metteur en scène, NdlR], ce n’était pas ça. On me dit souvent qu’il y a un côté un peu désuet dans le spectacle. En plus, je cite des gens que ma génération ne connaît plus trop, comme Jacqueline Maillan. Mais en même temps, comme je n’ai pas quarante-cinq ans, le tout donne une alchimie à mon avis marrante.

L’avenir, c’est de développer le spectacle. Ce qui, on imagine, ne veut pas dire l’abandon du théâtre plus classique, par exemple ?
J’espère. Je veux tout faire ! Quand j’étais petit, je disais que ma vie idéale serait de faire un one-man-show en janvier, en février un Claudel, en mars un spectacle de danse, en avril de la radio... Je trouve qu’un comédien a plus de facettes que ce dont on a l’habitude en France. Du coup, si je développe mon spectacle dans les mois qui viennent, j’espère qu’on me laissera la possibilité de faire autre chose dans deux ans. J’ai notamment hâte de rejouer de grands auteurs...

S’il se passe quelque chose
A la salle Victor Hugo, jeudi 26 juin à 20h30

 

Ca se passe comme ça chez Dedienne

Entre sa galerie de personnages savoureux (une vielle comédienne, un vendeur de jeux, une conseillère Pôle emploi...) et des moments plus intimes mais tout aussi réjouissants, Vincent Dedienne ne laisse pas une seconde de répit au public dans S'il se passe quelque chose. Il faut dire que le jeune homme a un talent indéniable de comédien, qui l'inscrit dans la lignée des plus grands, de Philippe Caubère à François Rollin, et une plume acérée, notamment dans façon de jouer finement avec les codes de l’humour. D’où le fait que de nombreux professionnels de la chose comique l’aient approché en un laps de temps assez court (son seul-en-scène a tout juste un an) pour lui proposer tout un tas de choses. On les comprend : S’il se passe quelque chose est l’un des spectacles les plus drôles que l’on ait vus depuis longtemps, et Vincent Dedienne un jeune talent dont on n'a sans doute pas fini d’entendre parler.

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