Chronicle

Surfant plus ou moins habilement sur la mode du faux documentaire en l’hybridant avec le film de super-héros, Chronicle hume l’air du temps hollywoodien où le cinéma tente de rivaliser avec la série télé. Christophe Chabert

Hollywood doit faire face à une double crise : la fuite de ses cerveaux vers la télévision et ses machines narratives, et celle de la désaffection, inéluctable, des spectateurs, qu’on ne sait plus comment retenir dans les salles. Chronicle est presque aussi intéressant par ce qu’il représente que par ce qu’il est sur l’écran. Son opportunisme manifeste qui consiste à marier économie (le tournage, peu coûteux, en caméra embarquée façon faux documentaire) et concept dans l’air du temps (des teenagers qui se découvrent des super-pouvoirs) évoque une foule d’autres films récents. Le nouveau venu Josh Trank a tout vu et Chronicle souffre, entre autres, de ce côté compilation, notamment quand il s’agit d’inventer des sources d’images qui ne soient pas issues de la fiction. La base, c’est le lycéen qui s’achète une caméra pour documenter sa vie ; mais en cours de route, téléphones portables, caméras de surveillance et images télé sont aussi mis à contribution pour raconter l’histoire — Cloverfield, Paranormal activity ou Redacted sont passés par là.

Un faux pas assez vrai

L’idée est donc de montrer trois ados qui, à la suite d’un contact avec un objet mystérieux, développent des pouvoirs de télékinésie et de lévitation. Chronicle tient d’abord assez bien la route : sa forme lui permet même de belles audaces, comme le fait de faire passer dans une ellipse la découverte des pouvoirs, pour aller directement à leur application. Les ados n’en font d’ailleurs rien d’exceptionnel, sinon des gags extrêmes à la Jackass ou de l’épate auprès de leurs camarades. Le dispositif connaît ensuite de sérieux ratés, prouvant par l’absurde que ce style ultra-réaliste tolère encore moins l’approximation que le cinéma classique. L’arrivée d’un personnage féminin muni d’une bien pratique caméra numérique permet des scènes en champ-contrechamp parfaitement absurdes, et qui plus est banalement dialoguées. Enfin, le réalisateur, qui a envie de se fabriquer une carte de visite vers le cinéma traditionnel, finit par trouver une astuce pour faire de «beaux» plans, en faisant à son tour léviter la caméra. Le combat final est ainsi toujours d’une parfaite lisibilité, là où l’on aurait dû avoir des brides d’action, un espace éclaté et flou ou un son chaotique. Chronicle tente alors de rivaliser avec les blockbusters ; il arrive à peine à la cheville d’un pilote de série télé. C’est bel et bien la crise à Hollywood.

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