À perdre la raison
ECRANS le Mardi 30 novembre 1999 | par Christophe Chabert
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Qu’il situe ses histoires dans le cadre intime d’une famille en train de se disloquer (Nue Propriété, À perdre la raison) ou, comme ici, au sein d’un groupe gagné par le doute et miné par les tensions, Joachim Lafosse suit film après film des shémas psychologiques comparables : il décrit des relations excessives, où un dominateur abusif exerce une subjugation dévastatrice sur son entourage. Cette figure charismatique n’est pas toujours ab initio animée d’intentions malveillantes : le personnage que joue Lindon dans Les Chevaliers blancs est mu par une mission humanitaire qu’il considère comme supérieure à toute autre considération, toute contingence, y compris la sécurité des membres de son équipe.
La poursuite orgueilleuse de son idéal va le faire glisser dans une spirale perverse. Hors de tout manichéisme, Lafosse ne réduit pas ce mentor déviant aux seuls effets de sa malignité : sans chercher à l’exonérer, il le montre dévoré par de sincères souffrances ; pareil au Drogo du Désert des Tartares, écrasé par la chaleur, l’attente, l’impatience — plus éprouvé et manipulé en somme, que délibérément manipulateur.
ECRANS le Mardi 30 novembre 1999 | par Christophe Chabert
On ne s’étonnera pas de retrouver Vincent Lindon dans l’uniforme de ce chef de meute jusqu’au-boutiste — un rôle tout en tension, dont l’incandescence contenue lui sied à merveille. Sa décision de l’incarner a été fondée sur une conjonction entre “l’envie immédiate, instinctive, animale d’être le personnage”, sa crédibilité, et le rapport humain qu’il imaginait pouvoir construire avec le réalisateur.
Car lorsque Lindon s’investit dans un film, c’est de manière plus que physique : entière — davantage qu’un comédien classique : « Je suis un acteur qui adore être un compagnon énorme pour le metteur en scène ; être là tout le temps, présent pour l’épauler et, accessoirement, jouer la comédie entre “moteur” et “couper”. J’aime partager tout comme un assistant, un copilote. » Une approche maïeuticienne, qui réclame aussi un lien exclusif — en résonance parfaite, donc, avec les préoccupations ordinaires de Lafosse. De là cette osmose, qui rend Les Chevaliers blancs si intense et humaine, à la lisière permanente de l’explosion, alors que cette équipée de pieds-nickelés aurait pu virer au pathétique. VR
Les Chevaliers blancs
De Joachim Lafosse (Fr/Bel, 1h52) avec Vincent Lindon, Louise Bourgoin, Valérie Donzelli, Reda Kateb, Bintou Rimtobaye…
Qu’il situe ses histoires dans le cadre intime d’une famille en train de se disloquer (Nue Propriété, À perdre la raison) ou, comme ici, au sein d’un groupe gagné par le doute et miné par les tensions, Joachim Lafosse suit film après film des shémas psychologiques comparables : il décrit des relations excessives, où un dominateur abusif exerce une subjugation dévastatrice sur son entourage. Cette figure charismatique n’est pas toujours ab initio animée d’intentions malveillantes : le personnage que joue Lindon dans Les Chevaliers blancs est mu par une mission humanitaire qu’il considère comme supérieure à toute autre considération, toute contingence, y compris la sécurité des membres de son équipe.
La poursuite orgueilleuse de son idéal va le faire glisser dans une spirale perverse. Hors de tout manichéisme, Lafosse ne réduit pas ce mentor déviant aux seuls effets de sa malignité : sans chercher à l’exonérer, il le montre dévoré par de sincères souffrances ; pareil au Drogo du Désert des Tartares, écrasé par la chaleur, l’attente, l’impatience — plus éprouvé et manipulé en somme, que délibérément manipulateur.
ECRANS le Mardi 30 novembre 1999 | par Christophe Chabert
On ne s’étonnera pas de retrouver Vincent Lindon dans l’uniforme de ce chef de meute jusqu’au-boutiste — un rôle tout en tension, dont l’incandescence contenue lui sied à merveille. Sa décision de l’incarner a été fondée sur une conjonction entre “l’envie immédiate, instinctive, animale d’être le personnage”, sa crédibilité, et le rapport humain qu’il imaginait pouvoir construire avec le réalisateur.
Car lorsque Lindon s’investit dans un film, c’est de manière plus que physique : entière — davantage qu’un comédien classique : « Je suis un acteur qui adore être un compagnon énorme pour le metteur en scène ; être là tout le temps, présent pour l’épauler et, accessoirement, jouer la comédie entre “moteur” et “couper”. J’aime partager tout comme un assistant, un copilote. » Une approche maïeuticienne, qui réclame aussi un lien exclusif — en résonance parfaite, donc, avec les préoccupations ordinaires de Lafosse. De là cette osmose, qui rend Les Chevaliers blancs si intense et humaine, à la lisière permanente de l’explosion, alors que cette équipée de pieds-nickelés aurait pu virer au pathétique. VR
Les Chevaliers blancs
De Joachim Lafosse (Fr/Bel, 1h52) avec Vincent Lindon, Louise Bourgoin, Valérie Donzelli, Reda Kateb, Bintou Rimtobaye…
Crédit Photo : © Fabrizio Maltese / Versus Productions / Les Films du Worso
De Joachim Lafosse (Fr-Bel 1h52) avec Vincent Lindon, Louise Bourgoin...
De Joachim Lafosse (Fr-Bel 1h52) avec Vincent Lindon, Louise Bourgoin...
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