Cristian Mungiu : « Parfois, il faut aller au-delà de la vingt-cinquième prise »
3 questions à... le Mardi 6 décembre 2016 | par Vincent Raymond
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Que reste-t-il en Roumanie quand on a tout oublié du communisme ? Son administration procédurière, ainsi que ses passe-droits, ses renvois d’ascenseurs, ses faveurs… Une source inépuisable d’inspiration pour les cinéastes du cru : après Porumbiu (Policier : Adjectif, Le Trésor) ou Muntean (L’Étage du dessous), voici que Cristian Mungiu s’en empare.
Pas pour une simple histoire de corruption ou de prévarication — car le héros, Romeo, demeure en dépit de ses travers conjugaux, un honnête homme — mais bien pire : l’autopsie d’un renoncement personnel ; d’un sabordage moral symbole d’un échec collectif. L’échec d’une génération d’idéalistes, jadis désireux de reconstruire sur des bases saines leur pays s’ouvrant au monde, mais qui peu à peu se sont transformés en petits notables désabusés. Alors, quitte à faire le deuil de leurs espérances, ils peuvent bien enterrer simultanément leur intégrité.
Si Romeo vacille en cherchant à transgresser les règles, c’est pour réparer une cascade "d’injustices originelles” : l’agression de sa fille sur le point de passer son examen, l’absence de sécurité ambiante et surtout sa responsabilité personnelle dans les circonstances du drame. Effacer l’incident apparaît comme un miracle à sa portée, pour ce médecin qui ne parvient pas à sauver ses malades, cet époux qui n’a su préserver son couple ; ce père voyant avec stupéfaction sa fille préférant une vie au pays plutôt qu’un avenir à l’étranger auquel il la prépare depuis le berceau…
3 questions à... le Mardi 6 décembre 2016 | par Vincent Raymond
Mungiu n’accable pas ce personnage, il l’accompagne plutôt pour nous faire partager dans de longs plans-séquences le poids de son quotidien erratique semé de doute, d’angoisses rentrées et de nomadisme contraint. Et comme dans 4 mois, 3 semaines, 2 jours, il nous rappelle les vertus de l’empathie. Un sentiment de partage et de compréhension, plus que jamais nécessaire dans un monde où le rejet haineux le dispute au cynisme goguenard.
Baccalauréat de Cristian Mungiu (Rou-Fr-Bel, 2h08) avec Adrian Titieni, Maria Drăguș, Lia Bugnar…
Que reste-t-il en Roumanie quand on a tout oublié du communisme ? Son administration procédurière, ainsi que ses passe-droits, ses renvois d’ascenseurs, ses faveurs… Une source inépuisable d’inspiration pour les cinéastes du cru : après Porumbiu (Policier : Adjectif, Le Trésor) ou Muntean (L’Étage du dessous), voici que Cristian Mungiu s’en empare.
Pas pour une simple histoire de corruption ou de prévarication — car le héros, Romeo, demeure en dépit de ses travers conjugaux, un honnête homme — mais bien pire : l’autopsie d’un renoncement personnel ; d’un sabordage moral symbole d’un échec collectif. L’échec d’une génération d’idéalistes, jadis désireux de reconstruire sur des bases saines leur pays s’ouvrant au monde, mais qui peu à peu se sont transformés en petits notables désabusés. Alors, quitte à faire le deuil de leurs espérances, ils peuvent bien enterrer simultanément leur intégrité.
Si Romeo vacille en cherchant à transgresser les règles, c’est pour réparer une cascade "d’injustices originelles” : l’agression de sa fille sur le point de passer son examen, l’absence de sécurité ambiante et surtout sa responsabilité personnelle dans les circonstances du drame. Effacer l’incident apparaît comme un miracle à sa portée, pour ce médecin qui ne parvient pas à sauver ses malades, cet époux qui n’a su préserver son couple ; ce père voyant avec stupéfaction sa fille préférant une vie au pays plutôt qu’un avenir à l’étranger auquel il la prépare depuis le berceau…
3 questions à... le Mardi 6 décembre 2016 | par Vincent Raymond
Mungiu n’accable pas ce personnage, il l’accompagne plutôt pour nous faire partager dans de longs plans-séquences le poids de son quotidien erratique semé de doute, d’angoisses rentrées et de nomadisme contraint. Et comme dans 4 mois, 3 semaines, 2 jours, il nous rappelle les vertus de l’empathie. Un sentiment de partage et de compréhension, plus que jamais nécessaire dans un monde où le rejet haineux le dispute au cynisme goguenard.
Baccalauréat de Cristian Mungiu (Rou-Fr-Bel, 2h08) avec Adrian Titieni, Maria Drăguș, Lia Bugnar…
Crédit Photo : © DR
De Cristian Mungiu (Rou-Fr, 2h08) avec Adrian Titieni, Maria Dragus...
De Cristian Mungiu (Rou-Fr, 2h08) avec Adrian Titieni, Maria Dragus...
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Romeo, médecin dans une petite ville de Transylvanie, a tout mis en œuvre pour que sa fille, Eliza, soit acceptée dans une université anglaise. Il ne reste plus à la jeune fille, très bonne élève, qu’une formalité qui ne devrait pas poser de problème : obtenir son baccalauréat. Mais Eliza se fait agresser et le précieux Sésame semble brutalement hors de portée. Avec lui, c’est toute la vie de Romeo qui est remise en question quand il oublie alors tous les principes qu’il a inculqués à sa fille, entre compromis et compromissions…
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