Mercredi 5 octobre 2022 La hype de la cave-bondée-comedy-club a enfin gagné Lyon. La recette ? Un bar, un resto, ou n’importe quel lieu culturel, une cave mal éclairée (une pièce (...)
Les pratiques amères d'Heineken en Afrique
Par Julie Hainaut
Publié Mardi 19 mars 2019 - 11432 lectures
Photo : © Dingena Mol
Lyon Bière Festival / Présent dans 170 pays, le groupe Heineken a fait de son implantation en Afrique un objectif prioritaire, avec un but annoncé : participer au développement du « continent de demain » en oubliant ses intérêts. Le journaliste d’investigation néerlandais Olivier Van Beemen a publié "Heineken en Afrique, une multinationale décomplexée", un livre qui entend rétablir la vérité sur la réalité du célèbre brasseur sur le continent africain : corruption des élites, évasion fiscale, collaboration avec des dictateurs et criminels de guerre, exploitation sexuelle… Une enquête choc qui pointe du doigt l’impunité garantie par les élites locales et permise par les États. Il tiendra une conférence sur le sujet lors du Lyon Bière Festival.
Qu’est-ce-qui vous a poussé à enquêter sur ce sujet ?
Olivier Van Beemen : Lors d’un reportage en Tunisie sur la chute du régime de Ben Ali, j’ai découvert un peu par hasard un lien entre Heineken et le régime du dictateur. Heineken avait nié. Mentir ouvertement à un journaliste est suffisamment motivant pour démarrer une enquête. J’ai décidé d’aller voir ce qu’il se passait dans d’autres pays d’Afrique où l’entreprise est implantée.
à lire aussi : Droit de Réponse de Heineken
Et vous n’avez pas été déçu… Pendant six ans, vous avez parcouru treize pays d’Afrique où Heineken est actif. Une multinationale que vous décrivez comme « décomplexée ». Qu’entendez-vous par là ?
En Afrique, il y a moins de contrôles qu’en Europe. Une multinationale comme Heineken peut vraiment faire ce qu’elle veut, il n’y a pas de presse vraiment critique, de contrôle sur l’application réelle de la législation… L’entreprise peut ainsi montrer son vrai visage. Sur le plan marketing déjà, c’est flagrant. Ils se croient tout permis. À Kinshasa, il y a des quartiers entiers peints dans les couleurs de la bière locale de Heineken, il y a des logos sur les pharmacies, les commissariats de police, les bus d’école…
Au Nigéria, vous expliquez que la marque a formé plus de 2000 prostituées pour encourager les clients à consommer Heineken plutôt qu’une autre bière…
Oui, et le directeur général de la filiale de la multinationale me l’a confirmé. Les ventes ont été boostées. L’idée était que les prostituées expliquent aux clients qu’en buvant cette bière (la Legend) plutôt que la Guinness (principale concurrente), leurs performances sexuelles seraient décuplées. C’était une campagne très précise. Ce qui est plus généralisé quasiment dans toute l’Afrique, ce sont les filles promotrices, des jeunes femmes qui doivent promouvoir la bière dans les bars. Évidemment, le harcèlement sexuel fait quasiment partie de l’emploi. Des jeunes femmes m’ont raconté qu’il faut accepter de se faire toucher intimement pour faire cette activité, et qu’elles doivent avoir des relations sexuelles avec leurs supérieurs pour obtenir l’emploi ou plus d’heures et donc plus d’argent. Elles ne sont pas directement engagées par Heineken, il y a une agence intermédiaire. En mars 2018, après la parution de mon livre aux Pays-Bas, Heineken a fait la promesse de créer de bonnes conditions de travail pour les filles promotrices dans les trois mois. Je suis allé vérifier au Kenya si c’était le cas. J’ai rencontré six filles promotrices qui m’ont garanti que rien n’avait changé. Il y a une vraie impunité.
Au Rwanda, vous affirmez que la multinationale a joué un rôle dans le génocide des Tutsis en 1994…
Heineken avait le monopole de la bière dès le début des années 90. Tout le monde dépensait son argent dans la bière, les milices hutus étaient ivres et la bière leur servait souvent de récompense après une journée de massacre. Heineken n’a pas arrêté la production. À l’époque, un porte-parole de Heineken a répondu dans un journal néerlandais que c’était une question d’offre et de demande. Un responsable de l’époque m’a affirmé qu’ils n’étaient pas la Croix-Rouge. Aujourd’hui, Heineken prétend que la brasserie rwandaise était autonome, qu’ils n’étaient alors en rien responsables. Jean-Louis Homé, le directeur Afrique de la multinationale à cette époque, a indiqué dans son livre Le Businessman et le Conflit des Grands Lacs qu’il y avait bien un contact quotidien entre les techniciens rwandais et la direction de la société, alors basée à Goma, en République Démocratique du Congo.
Au Burundi, vous écrivez que la multinationale a collaboré avec le régime de Pierre Nkurunziza, accusé de crimes contre l’humanité par l’ONU…
Oui. La constitution interdisant trois mandats présidentiels, le président a remis son sort entre les mains de la Cour constitutionnelle pour demander le droit de se présenter une troisième fois. Il a nommé le président de la Cour au sein du conseil d’administration de Heineken. Lorsque la Cour a accepté le troisième mandat, ce juge a été promu président du conseil d’administration. Aujourd’hui, Heineken au Burundi est présidé par l’un des juges les plus importants du pays.
On a le sentiment que tout est organisé, voulu, attendu, qu’il ne peut pas s’agir simplement d’incidents, de coïncidences…
Effectivement. Heineken essaie de présenter les dérives comme des incidents. Mais on le voit aussi bien dans le temps que dans l’espace géographique : il faut parler de système organisé plutôt que d’incidents isolés.
Avez-vous subi des pressions ?
J’ai eu des pressions par les services de renseignements congolais, mais comme beaucoup de journalistes. Il est difficile d’affirmer qu’il y avait un lien direct avec Heineken. En revanche, Heineken a souvent essayé de me dissuader de publier des articles. À l’époque, il y avait une grande affaire de fraude au Nigéria, et quand j’ai voulu publier l’article, Heineken a nié sa responsabilité en me précisant que cela ferait du mal aux personnes concernées si l’article paraissait. J’ai publié l’article. Il ne s’est rien passé ensuite.
Ces dérives ne concernent que Heineken ?
Je ne pense pas. Heineken est une étude de cas. Je souhaite montrer comment une multinationale décomplexée peut agir en Afrique. Je continue à enquêter. Heineken a fait des promesses. J’y crois peu. Je n’ai pas encore vu de résultats.
Olivier Van Beemen, Heineken en Afrique, une multinationale décomplexée (Éditions Rue de l’Échiquier)
À La Sucrière dans le cadre du Lyon Bière Festival le dimanche 28 avril
à lire aussi
derniers articles publiés sur le Petit Bulletin dans la rubrique Guide Urbain...
Mercredi 5 octobre 2022 L’association Superposition a carte blanche pendant quatre mois pour faire vivre un nouvel espace artistique au 120 — c'est ainsi qu'il est baptisé — (...)
Lundi 5 septembre 2022 Agir contre l’exclusion des personnes en grande précarité, c’est la raison d’être de l’association La Cloche. En mettant l’humain au centre de tout considération, elle déploie ses actions dans toute la France et notamment à Lyon.
Mardi 26 avril 2022 Le confinement, c’est loin. La preuve, vous avez arrêté de faire votre pain. Par chance, d’aucunes en ont fait leur profession. Elles œuvrent dans un fournil du haut des Pentes : Bonomia.
Mardi 12 avril 2022 Le jeu de société a la cote. Deux copains viennent d'inaugurer leur première boutique spécialisée dans les jeux, où il est possible d’acheter, de louer et de rencontrer des éditeurs : Master Yeti.
Mardi 12 avril 2022 Après s’être forgé une sacrée réputation dans la capitale, Paris-New-York va tenter de convaincre les Lyonnais que ses hamburgers sont « les meilleurs de la planète ».
Mardi 29 mars 2022 La Mare, petit lieu dédié à l’image, rouvre ses portes sur les pentes de la Croix-Rousse.
Mardi 29 mars 2022 Certains disent juin 2020, d’autres, une éternité. Voilà bientôt deux ans que le repaire des amateurs de musiques électroniques Chez Émile a fermé ses portes. Dans quelques jours, Mush et Guillaume Des Bois ouvriront une nouvelle boutique, à...
Mardi 29 mars 2022 Après deux annulations successives (vous en devinerez la cause), le Lyon Bière Festival fait son retour à La Sucrière pour deux jours de dégustations.
Mardi 15 mars 2022 Elle était prévue en septembre, elle se fera finalement à la mi-mars. Voici venir l’ouverture de Reverse, le nouveau spot à coloration musiques électroniques, mené par la bande de Club Safar et leurs amis, rue Royale.
Mardi 15 mars 2022 À Caluire, Guillaume Falguier vient d'ouvrir sa Minoterie : une petite pizzeria artisanale, en vente à emporter.
Mardi 1 mars 2022 La Baignoire est un de ces lieux où l’adresse se repasse en chuchotant, qui font écho à une époque en vogue dans le monde du cocktail actuel, celle de la prohibition des années 1920 aux États-Unis : un speakeasy.
Mardi 1 mars 2022 Les fondateurs du bar à chocolat Diggers se lancent dans la production de tablettes. Des "pures origines" dont ils travaillent eux-mêmes les fèves.
Mardi 15 février 2022 Nouveau-né dans le monde de la fripe lyonnaise, La Centrale se pose au 51 de la rue Salomon Reinach, à la Guillotière, pour mêler style et éthique à travers une esthétique rétro-futuriste.
Vendredi 4 février 2022 Le torréfacteur Mokxa ouvre un nouveau coffee shop sur le plateau de la Croix-Rousse, et fête la nouvelle avec un festival dédié à l’arabica.
Mardi 1 février 2022 Une micro-torréfaction cachée dans l’arrière salle d’un coffee shop : c’est dans les pentes et c’est Méta, installée chez Fika.
Mardi 1 février 2022 On la pensait poussiéreuse et surannée. Longtemps snobée, la céramique regagne une place d’honneur dans les cuisines de celles et ceux sensibles à l’artisanat et au Do It Yourself. À Lyon, un premier lieu entièrement dédié à cette pratique, vient...
Mardi 1 février 2022 À quelques encablures de Perrache, une nouvelle librairie indépendante a ouvert ses portes en novembre. Une librairie généraliste qui s'empare volontiers des questions sociétales actuelles avec un vrai esprit d'ouverture et une approche conviviale,...
Vendredi 7 janvier 2022 La troisième édition du Lyon Whisky Festival, initialement prévue en février, est déplacée aux samedi 14 et dimanche 15 mai, toujours au Palais de la Bourse.
Lundi 7 février 2022 Maxime Pujol, ancien second du chef étoilé Jérémy Galvan, s’émancipe du côté de Gerland.
Mardi 4 janvier 2022 De bons artisans rencontrent des jeunes cuistots et paf !, ça fait de la cuisine qu’on mange avec les doigts. Et à la fin, un livre de portraits et de recettes, Street Food des Gones.
Mardi 4 janvier 2022 Dans la rue Pasteur, à la Guillotière, vient d'ouvrir ce resto à bao. La brioche vapeur, star de la street food asiatique, s’y présente en petit sandwich et se mange à table.
Mardi 4 janvier 2022 L’un des meilleurs glaciers de la ville — Unico — s’étend, à deux pas des Terreaux, avec Minnà. Une extension qui sent le gâteau.
Jeudi 16 décembre 2021 L’émission culinaire de France Inter, On va déguster, réunissait en novembre dernier deux Lyonnaises dont on a récemment parlé : Anaïs Duraffourg et Géraldine (...)
Jeudi 16 décembre 2021 C’est l’histoire d’une poissonnerie ouverte entre deux confinements, qui n’a pas fait naufrage. Elle rouvre même en grand son accès à la mer.
Jeudi 2 décembre 2021 Spécialiste des épices de Madagascar (mais aussi d’ailleurs), Serge Barthès n’était jusqu’à alors présent qu’en ligne. Le Lyonnais vient d’ouvrir pour la Maison (...)
Jeudi 2 décembre 2021 C’est un succès populaire, brandi pour prouver qu’on mange bien dans la nouvelle Part-Dieu (oui, le centre commercial). Ses ingrédients ? Un thème éphémère, et de la vraie cuisine, aussi.
Mardi 14 décembre 2021 Dans l'une de ces rues que les couvre-feux plongeaient dans la pénombre, on refait la fête. On y mange aussi désormais thaïlandais, grâce à Chan.
Jeudi 2 décembre 2021 L’heure est à la seconde main, et c’est tant mieux. Une nouvelle boutique se pointe dans le paysage lyonnais des fripes, elle s’appelle Planète Seconde Main, elle est la fusion de trois structures et elle est éphémère.
Jeudi 2 décembre 2021 Depuis 2003, la librairie Le Bal des Ardents — et son fonds de quelque 25 000 livres — est devenue un véritable sanctuaire pour les (...)