Littérature et authenticité

Rencontre / Maintenant qu’on connaît les frasques entourant ses œuvres (involontairement ?) polémiques, il serait grand temps d’ausculter les livres de Pierre Jourde pour ce qu’ils sont : d’authentiques et d’irrésistibles tours de force. Petit récapitulatif de la carrière de l’auteur, en attendant de le retrouver à la librairie Le Square ce jeudi. FC

Il était une fois un universitaire érudit, exigeant dans ses goûts comme dans sa plume, qui se fit discrètement remarquer dès ses premiers essais publiés. En 1991, dans Géographies Imaginaires, il cite déjà avec déférence l’influence majeure de Julien Gracq, auteur dont le legs devait lui peser dans des proportions qu’il ne soupçonnait sans doute pas. En hommage à l’humble écrivain français presque oublié, Pierre Jourde sort en 2002 un essai redoutable sur la littérature française contemporaine, La Littérature sans estomac. Redoutable car écrit avec une efficacité acérée, en violente opposition avec le tout venant de la critique littéraire. Des auteurs non reconnus et des écrivains people y sont respectivement encensés et conspués avec la même passion, mais le vitriol l’emportera bien évidemment sur la louange. En particulier le chapitre consacré à Philippe Sollers, et par corollaire les liens “consanguins“ rattachant l’auteur au Monde des Livres. Les démêlés de Pierre Jourde avec Josyane Savigneau, directrice de la parution, éclipseront quasiment le reste d’un essai au charme imparable (lire, relire et rerelire C’est Toto qui écrit un roman, le chapitre sur Beigbeder). Et donneront naissance à un deuxième essai en deux parties, la première (Petit Déjeuner chez Tyrannie) signée de l’éditeur, Éric Naulleau, transcription atrocement hilarante de son entrevue avec ladite Savigneau et deux critiques du Monde des Livres ; et la deuxième (Le Crétinisme Alpin) rédigée par Jourde avec fougue, en réponse aux insultes -dont le fameux “crétin des Alpes“ - proférées à son endroit par sa détractrice.Direct dans l’estomacAu-delà des querelles de clochers, il faut être d’une vigoureuse mauvaise foi pour ne pas reconnaître à l’auteur un style particulièrement alerte, un sens de la formule évitant soigneusement tout côté poseur, et par dessus tout une véritable jubilation dans l’écriture, explosant littéralement dans ses romans. Dans Pays Perdu (2003), Pierre Jourde évoque le climat pesant de son enfance dans un village auvergnat reculé avec une acuité assez terrifiante, sans ironie malgré la drôlerie de certaines situations. Mais une nouvelle fois, le focus sur les aspects les plus sombres de son œuvre devait se retourner contre lui : de retour dans ledit village, les habitants qu’il connaît depuis toujours l’accueillent à coups de caillasses, blessent son bébé au visage. De son roman suivant, l’excellent Festins Secrets, on ne retiendra que la charge à l’encontre de l’éducation nationale. Son nouvel opus, L’heure et l’ombre, superbe récit amoureux a priori détaché de tout passif soi disant sulfureux, devrait enfin remettre les compteurs à zéro : Pierre Jourde est un auteur majeur. Point.Pierre JourdeLe 28 septembre à 18h30, au Square-Librairie de l’UniversitéLivre : “L’heure et l’ombre“ (L’Esprit des Péninsules)

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