de Robert Budreau (G.-B-E.-U.-Can., 1h37) avec Ethan Hawke, Carmen Ejogo, Callum Keith Rennie...
1966. Vaincu par ses addictions, Chet Baker n'est plus ce James Dean du jazz qu'il a été. Mais la rencontre avec la belle Jane, à la faveur du tournage d'un film hommage, l'encourage à entreprendre une renaissance. Ce ne sera pas la première, ni la dernière...
La douloureuse trajectoire torve de Baker appartient à cette mythologie du jazz faite de cycles de grandeur-déchéance, de caves enfumées et d'ivresses prolongées ; en cela, elle est éminemment cinématographique. Encore faut-il savoir y prélever les éléments les plus saillants, et confier cette réelle mission à un comédien inventif, capable de surcroît d'éviter l'odieux piège de la surcomposition. Ethan Hawke, décidément abonné aux vieilles gloires éthyliques (voir Les 7 mercenaires), se révèle excellent pour interpréter la partition du bugliste à la voix d'ange et au visage de jeune premier désespéré.
Dans cette élégie élégante et délicate, jouant parfois avec sa propre structure et faisant fi de toute prétention, il donne corps (et même souffle) à l'artiste, laisse entrevoir l'origine de ses cicatrices sans les transformer en plaies purulentes, et redonne à sa pauvre figure édentée son authentique charme tragique. Traversé par cet amour viscéral pour la musique et cette faiblesse pour les femmes donnant la force d'abattre les montagne, Born to be blue est de surcroît doté du magnétisme de l'actrice Carmen Ejogo dans le rôle de Jane.