Morts et vifs

Confidences d'outre-tombe. Les archéologues interrogent les squelettes

Musée Dauphinois

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Après la lumière des cadrans solaires, le Musée dauphinois nous plonge dans le noir, métaphoriquement, avec sa nouvelle exposition intitulée "Confidences d'outre-tombe", mettant en scène des crânes et des squelettes de toutes époques. Une visite joyeusement macabre, entre ludisme et poésie. Charline Corubolo

Pour une bonne "skeleton party", il y a le cimetière Saint-Laurent ou encore le Musée archéologique de Grenoble. Pourtant, c'est au Musée dauphinois que la fête bat son plein, et en grande pompe. La nouvelle exposition de l'institution, intitulée Confidences d'outre-tombe, squelettes en question, s'inscrit dans une démarche à la fois ludique, historique et artistique, avec comme objectif de se pencher sur les relations qui existent, depuis tout temps, entre les vivants et les morts. Dans ce périlleux exercice de l'au-delà, le Musée dauphinois a décidé de croiser les regards afin d'offrir une triple approche et un balayage assez large du sujet.

En collaboration avec le Musée archéologique de Grenoble et la Casemate (le Centre de culture scientifique technique et industrielle de Grenoble), avec le concours de l'Institut national de recherches archéologiques préventives et le soutien des Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération grenobloise, le musée a élaboré un parcours judicieux qui débute avec la découverte du crâne d'Alexandre et du squelette de la dame assise, nos ancêtres du début du siècle dernier trouvés respectivement dans la grotte de Balme-de-Glas à Fontaine et dans la grotte des Sarrasins à Seyssinet-Pariset.

Puis la visite dévoile les rites funéraires d'antan, ancienne sépulture en brique et coffre maçonné, ponctuée ici et là d'installations réalisées par la Casemate révélant les secrets des archéologues et des anthropologues : le Strat'Os, simulation d'une fouille préventive, ou encore le Profil'Os'cope, qui montre comment déterminer le profil biologique d'une personne selon la taille et la forme de ses restes. Une amusante balade faite d'os et de reliques où l'on découvre également la typologie des tombes du site Saint-Laurent et l'évolution des cérémonies au fil des siècles.

Mort parlant

Tout cela reste cependant dans le champ de l'analyse scientifique, et rien ne vaut la parole actuelle de l'un des nos aïeuls pour savoir ce qu'il s'est réellement passé. C'est d'ailleurs le postulat de départ de l'exposition : « Que peuvent nous apprendre les morts de leur vie ? » Plein de choses, si tant est que l'on tende l'oreille pour écouter. Car malgré les apparences, Alexandre le montagnard ne cesse de jacasser et, de toute évidence, Baltazar, le défunt syphilitique dont le squelette est aussi présenté (il y en a plus d'une dizaine d'autres), n'aurait pas dû s'encanailler avec une fille de joie. Oui, l'exposition fait parler les morts, ou plutôt ce sont les squelettes exhumés qui ont murmuré des mots doux à l'oreille des archéologues.

C'est là que réside la véritable surprise de l'événement : chaque corps nous livre sa confidence, mêlant habilement réalité médicale et fiction délirante. Comme les données recueillies ne suffissent parfois pas à percer les mystères d'une vie passée, notamment si les stèles, les registres paroissiaux ou encore les registres d'état civil sont mal renseignés, l'imagination et le romanesque rentrent en jeu, donnant vie aux ossements. On apprend alors qu'Alexandre ne s'appelle pas ainsi et qu'il n'apprécie guère sa nouvelle nomination. Un exemple décalé de notre fascination pour le squelette et ce qu'il reste de nous après la vie.

Mon voisin le squelette

Une fascination qui dépasse parfois le fait scientifique. L'ossature livre en effet d'autres éléments pour les adaptes de la phrénologie, le pendant squelettique de la série Lie to me, autrement dit l'étude de la personnalité selon la forme de son crâne. Une pratique apparue au XIXe siècle dont on découvre un exemple avec le crâne d'une jeune fille, prêté par le Muséum d'histoire naturelle de Grenoble, sur lequel sont inscrits plusieurs qualificatifs, comme la gentillesse par exemple, suivant les zones et la forme de l'os. Cette fin de parcours s'ouvre donc sur le pouvoir symbolique de notre charpente et explore la vision de la mort à travers les âges et les cultures.

On découvre des "memento mori", des planches de la danse macabre du cimetières des Innocents à Paris ou encore celle du dessin animé de Walt Disney datant de 1929. Une véritable déambulation dans les méandres sombres de nos sociétés, prolongée avec la collecte de la mort réalisée à Grenoble au près des habitants, qui ont prêté leurs biens mortels pour l'exposition. On y retrouve du crâne à toutes les sauces, du mug au stylo en passant par le t-shirt, sans oublier le célèbre Mr Jack de Tim Burton. Si auparavant il était considéré comme un signe contestataire, le squelette est aujourd'hui un motif récurrent qui passionne. Et pour ceux qui ont toujours rêvé de faire un IRM entier pour s'observer sous toutes les coutures, le Musée dauphinois propose une alternative avec le dernier dispositif de la Casemate, le Mir'Os grâce auquel vous pourrez découvrir votre corps comme vous ne l'avez jamais vu, uniquement fait d'os.

Confidences d'outre-tombe, squelettes en question, jusqu'au dimanche 20 décembre 2015, au Musée dauphinois

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